Au procès de Rédoine Faïd, un neveu en colère
Liazid Faïd est en colère. C'est la troisième fois qu'il est mis en cause et incarcéré dans un dossier de son oncle Rédoine. Alors, ce mercredi, au procès de l'évasion par hélicoptère du braqueur multirécidiviste en 2018, il ne dira "rien" à la cour.
Liazid Faïd, 44 ans, fait partie des cinq membres de la famille de Rédoine Faïd à comparaître aux côtés du braqueur multirécidiviste devant la cour d'assises de Paris. Ils sont soupçonnés de l'avoir aidé durant son évasion du centre pénitentiaire de Réau, ou la cavale de trois mois qui a suivi.
A Liazid Faïd, on reproche d'avoir cherché des planques et de l'argent pour soutenir son oncle pendant sa fuite. Il n'est cependant pas question de ça en ce deuxième jour de procès, la cour veut seulement l'entendre sur sa "personnalité", son parcours de vie.
"La coupe est pleine, vous ne m'entendrez plus jusqu'à la fin", jure d'entrée de jeu Liazid Faïd, depuis les bancs des accusés comparaissant libres.
Son avocate Me Victoria Anfuso rappelle ses gardes à vue dans les années 90, ses deux années de détention provisoire, une en 2000 et une 2010. A chaque fois, dans des affaires de hold-up ou braquages de son oncle (ils n'ont que sept ans d'écart) Rédoine, assis dans le box.
A chaque fois, Liazid Faïd avait finalement été mis hors de cause par la justice.
"Est-ce que cela peut expliquer le manque de confiance de monsieur dans l'institution judiciaire ?", demande innocemment Me Anfuso à l'enquêtrice de personnalité qui a examiné son client.
"Monsieur...", tente la présidente Frédérique Aline, qui l'encourage à parler, dans son "intérêt".
"Je suis pas +monsieur+, je suis un condamné", s'énerve Liazid Faïd, crâne rasé, polo bleu ciel. "Je suis dans le +clan Faïd+, je vous ai entendu hier... pourquoi vous dites +clan+ ? Vous pouvez pas dire famille ?"
La présidente se défend, répète qu'elle n'a fait que reprendre les mots des enquêteurs lors de la lecture du rapport la veille.
- "Défiance personnelle" -
"Y a mon casier judiciaire qui parle pour moi, mon casier, il est nickel", s'énerve encore Liazid Faïd, en repoussant à chaque fois bruyamment le micro, malgré les appels de la cour à "respecter le matériel".
Liazid Faïd répète qu'il gardera le silence - "je parle pas à la cour !", s'exclame-t-il à un moment - mais a vraisemblablement besoin de lâcher ce qu'il a sur le coeur.
"Y en a qu'un qui a choisi une trajectoire dans les années 90, c'est Rédoine. Il assume. Tout le reste de la famille c'est des honnêtes travailleurs".
Celui qui soutient qu'il est innocent dans ce dossier aussi se lance dans une longue tirade sur l'horreur de son incarcération. "Quatre ans et demi", alors qu'il ne comparaît que pour des délits, souligne sa défense, à subir l'isolement, les transferts, les fouilles à nu. Il a été remis en liberté sous contrôle judiciaire en mars dernier.
Ses avocats rappellent qu'il n'était pas là pour la naissance de son deuxième enfant, que sa fille de deux ans ne le "reconnaissait plus". Mentionnent cette note de l'administration pénitentiaire qui justifie notamment son statut de "détenu particulièrement signalé" parce que "la ressemblance avec son oncle présente un trouble grave à l'ordre public résultant de la médiatisation de l'affaire".
Redemandent encore si on peut comprendre la "méfiance" de Liazid Faïd.
"Vous avez pu le sentir un tant soit peu énervé, je vous remercie de ne pas l'avoir stoppé", dit à la cour son autre avocat, Me Romain Vanni, demandant à ce qu'on y voit pas une "défiance personnelle". "Parfois quand la coupe est pleine, il vaut mieux se taire pour ne pas que la coupe déborde".
Rédoine Faïd sera interrogé sur son parcours jeudi après-midi.
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