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Biathlon au Grand-Bornand : pourquoi cette compétition déclenche une polémique

Le défilé de camions remplis de neige sous les fenêtres des habitants n’est pas passé inaperçu à l’approche de la Coupe du monde de biathlon au Grand-Bornand.

SPORT - La Coupe du monde au Qatar, une aberration écologique, mais quid du biathlon au Grand-Bornand ? C’est la réflexion qui est en train de naître autour de la couverture artificielle de la piste de l’étape de Coupe du monde de biathlon prévue du 15 au 18 décembre en Haute-Savoie.

Le défilé de camions remplis de neige sous les fenêtres des habitants n’est pas passé inaperçu, en l’absence de manteau blanc, et soulève de vives critiques. La neige utilisée, en partie artificielle, avait été conservée depuis la dernière saison hivernale sur site et à proximité sous une couche de sciure.

Les images sont assez saisissantes, alors que la neige est encore peu tombée cette année dans la station des Aravis : un serpent de neige ondule au milieu d’une verte vallée.

La FNE et plusieurs associations de défense de l’environnement (Mountain Wilderness, Résilience Montagne, La Nouvelle Montagne, Pour une transition participative) se sont élevées contre le « ballet de camions » qui a, début décembre, assuré le transport de plusieurs milliers de mètres cube de neige destinés à couvrir la piste en vue de la compétition.

« On a tiré à boulets rouges sur (les JO d’hiver à) Pékin. Ou plus récemment sur les Jeux asiatiques d’hiver attribués à l’Arabie saoudite. On s’est beaucoup moqué de ça, en France en particulier. Mais là, on se rend compte qu’on est aussi dans les mêmes logiques absurdes », déplore Corentin Mele, de France Nature Environnement Haute-Savoie.

Le Grand-Bornand se défend

Face à l’avalanche de critiques, le comité d’organisation du Grand-Bornand a publié un communiqué pour répondre à ses détracteurs. « Nous sommes conscients que tout événement, et notamment d’ampleur internationale, a un impact environnemental non négligeable », commence André Perrillat-Amédé, président du CO et maire du Grand-Bornand avant de poursuivre : « C’est pourquoi nous continuons de travailler en poursuivant les efforts déjà entrepris comme l’organisation du déplacement collectif des spectateurs depuis les vallées, qui pèse pour plus de 80 % de notre empreinte carbone ».

Il précise également que ces transports représentent moins de 1 % des émissions de CO2 de l’événement (4500 tonnes en 2021), soit, selon le calcul de la station, 38 tonnes. Il précise que l’immense majorité des émissions sont liées au transport de personnes (public, athlètes, journalistes). Environ 60.000 à 65.000 personnes sont attendues pour les compétitions prévues sur quatre jours à environ 1000 m d’altitude. Un événement « extrêmement populaire et rassembleur », rappelle le maire. À l’issue de la compétition de biathlon, la neige sera utilisée pour les activités à venir de la station, précise la mairie.

Du côté de l’équipe de France de biathlon, on explique auprès de 20 Minutes que « ce recours au snowfarming (réserve de neige) existe partout ». « Nous étions en Finlande le week-end dernier pour la première étape de Coupe du monde et il y avait déjà de la neige artificielle », assure-t-on.

« Continuer de choquer » pour faire changer les choses

« Pékin a participé à la banalisation de la langue de neige au milieu du désert. Il faut que ça continue de choquer, comme au Grand-Bornand », peste Vincent Neirinck, de Mountain Wilderness. « Il y a un modèle du ski dans sa globalité qui est perpétué », regrette Valérie Paumier, de Résilience Montagne, alors que, dans les Alpes comme ailleurs, le réchauffement climatique interroge sur l’avenir de l’industrie du ski.

Du côté des sportifs, on est divisé. Kilian Jornet, fervent défenseur de l’environnement et traileur s’est insurgé sur Twitter : « Les sports de neige sont certainement les plus affectés par le changement climatique. Ils devraient mener le monde du sport vers une transition plus durable au lieu d’ignorer ce qu’il se passe », regrette-t-il.

Quand on l’interpelle à ce sujet sur Twitter, Simon Fourcade rappelle, lui, que cet événement sportif est loin d’être le plus nocif pour l’environnement. « En tant que fan de tennis, j’espère que vous vous montrez tout aussi critique concernant votre discipline de cœur et un célèbre tournoi français ? À titre informatif, la Coupe du monde du Grand-Bornand c’est 60.000 spectateurs », écrit-il en faisant référence à Roland Garros, à un internaute visiblement amateur de tennis, qui juge « aberrant » la tenue de cette compétition dans ces conditions. Son tweet précise que pour le tournois de tennis, en 2017, 470.000 personnes s’étaient déplacées.

Le ski, la « victime » du réchauffement climatique

Le maire du Grand-Bornand, André Perrillat-Amédé, tient enfin à rappeler que « le ski n’est pas la cause du réchauffement climatique » mais « la victime ».

Il note par ailleurs que même si l’épreuve avait lieu plus tard dans l’année, quand le taux d’enneigement est plus sûr, le cahier des charges de l’Union internationale de biathlon (IBU) reste drastique quant à la qualité de la neige - compacte, régulière.

« Il est nécessaire d’ouvrir un chantier avec toutes les fédérations sportives hivernales. Engagements environnementaux ou pas, quand l’épreuve arrive, il faut faire quoi qu’il en coûte », regrette Vincent Neirinck.

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