Cœur de loser

PHILIPPE MATSAS/LEEXTRA/OPALE

Il y a de ces incipits qui ne vous lâchent pas et qui resserrent le propos comme on ferme un poing : avant de le coller dans une mâchoire. Celui de Maresia, le premier roman de François-Loïs Gautier, est une de ces mandales : « Je n’ai pas toujours été un enculé : j’ai d’abord été un lâche. » Le ton est donné : à rebours de Platon, il y aura du faux, du laid, du vil. Et de ce triptyque désastreux jaillit parfois, en littérature du moins, une vérité indiscutable : celle de nos propres bassesses.

Dès la fin du premier chapitre, l’issue est claire : « Ce n’est pas un cambriolage, c’est un assassinat : ce jour est mon dernier, ce soir je serai mort. » Mais quoi, qui, où, comment et pourquoi ?

Distiller la fin au début est une construction souvent maligne mais jamais simple. Elle est ici très bien maîtrisée : tandis que l’échec d’une vie lumineuse est inexorable, tandis que le point final approche irrésistiblement avec son lot de drames amoureux et de désolations morales, tandis que tout, métaphoriquement ou non, semble être un aller sans retour, l’auteur multiplie les sauts dans le temps, en arrière, en avant, comme un héros de tragédie grecque résiste à sa destinée. Et tout le sel de la lecture viendra des renoncements et des espoirs, qui sont nombreux pour Saul Pessoa, un jeune avocat parisien paumé comme beaucoup.

Lorsqu’il retombe sur son ami perdu de vue Martim Von Manstein, il n’est qu’un de ces CSP+ interchangeables : sans vrai désir, sans ambition, sans espérance. C...


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