Ehpad: pour Victor Castanet, "la macronie a essayé de mettre le sujet Orpea sous le tapis"
Le vainqueur du prix Albert Londres pour son enquête sur les Ehpad d'Orpea sort une édition augmentée de son livre, dans laquelle il révèle comment la majorité présidentielle a accueilli sa publication et le scandale qui en a découlé.
Un an après la publication de son livre Les Fossoyeurs, qui avait mis en lumière des cas de maltraitance systémique au sein des Ehpad du groupe Orpea, Victor Castanet sort une nouvelle édition augmentée de dix chapitres.
Il y décrit les pressions reçues de la part du groupe juste avant et après la parution de son enquête, mais aussi la réaction politique, notamment du côté de la majorité présidentielle.
"La macronie a essayé de mettre le sujet Orpea le plus rapidement sous le tapis", a déclaré le journaliste dans le dernier épisode du podcast de BFMTV "Le Titre à la Une".
Quelques jours après les révélations, qui ont fait grand bruit, Brigitte Bourguignon, ministre de la Santé et de la Prévention de l'époque, a décidé de "mettre en place une vaste enquête pour voir les dysfonctionnements au sein d'Orpea", confie le journaliste, via l'Inspection générale des affaires sociales (IGAS) et l'Inspection générale des finances (IGF).
"Je sais que tout a été fait de manière précipitée, a alors commenté Victor Castanet, la campagne présidentielle commençait le 28 mars et on leur a demandé de rendre leurs conclusions le 26 mars."
Pas de commission d'enquête parlementaire
Autre illustration d'une réticence présumée du parti d'Emmanuel Macron, d'après l'auteur: le refus d'ouvrir une commission d'enquête parlementaire à l'Assemblée nationale.
Le 15 février 2022, plus de 70 députés de tout bord politique et les représentants des trois principaux syndicats ont signé une tribune dans le journal Le Monde demandant la création de cette commission. Les signataires estimaient que la commission d'enquête sur les Ehpad ouverte au Sénat quelques jours plus tôt - où les dirigeants d'Orpea et Victor Castanet ont été auditionnés - était plus axée sur la politique de contrôle des Ehpad que sur les pratiques d'Orpea.
Or, "au sein de la macronie, on fait bloc pour qu’il n’y ait pas de commission d’enquête" à l'Assemblée nationale, révèle Victor Castannet.
Il prend alors l'exemple d'Annie Vidal, députée de la majorité présidentielle, qui a signé cette tribune.
"Elle m’explique les menaces de la part d’un certain nombre de ses collègues députés qui lui expliquent que la commission d’enquête est préjudiciable au président de la République et qu’elle n’a plus rien à faire dans le parti", rapporte-t-il dans notre podcast.
Le spectre de la loi Grand Âge
Victor Castannet avance alors la raison de ce "bloc" pour mettre le sujet "sous le tapis": "Emmanuel Macron n'a pas de bilan sur la question du grand âge."
"Cela fait des années qu’il promet une fameuse loi grand âge [...] Si elle avait été mise en place, on aurait pu stopper un certain nombre de pratiques irrégulières", a-t-il développé.
Toutefois, un an après les révélations, Victor Castanet remarque des efforts du ministre de l'Autonomie Jean-Christophe Combe qui multiplie "les débats et les rencontres avec des acteurs du secteur" tandis que les contrôles sont amplifiés. Des mesures "importantes mais très loin d'être suffisantes", selon le journaliste.
Il lance donc: "Il faut une réponse importante des pouvoirs publics [...] Les solutions, ils les ont. Maintenant, il faut les mettre en place."
Article original publié sur BFMTV.com
VIDÉO - Orpea s'effondre en Bourse après l'annonce d'une baisse de ses marges
