Une étudiante canadienne aurait trouvé le moyen d’enrayer le développement du cancer et du VIH

Caitlin Miron vient de faire une grande découverte, comme en atteste l’hommage qui lui a été rendu la semaine dernière. En effet, la jeune femme a découvert un composé chimique potentiellement capable d’enrayer le développement du cancer, mais également d’empêcher la propagation du VIH. L’étudiante en doctorat canadienne a accepté de participer à une interview exclusive avecYahoo Canada News. Selon elle, sa découverte pourrait avoir des répercussions bien plus importantes que prévues, qu’il s’agisse du VIH, du virus Zika…

« Une séquence de type quadruplex existe également dans une zone du VIH responsable des infections chez les hôtes humains », a confié à Yahoo Canada News Caitlin Miron, la jeune femme qui a identifié le composé et qui suit actuellement un doctorat au Département de Chimie de l’Université Queen’s.

Les recherches de C. Miron découlent de l’étude de l’ADN. Nous sommes nombreux à avoir déjà vu le modèle en double hélice de l’ADN, mais l’ADN doit temporairement être à un seul brin dans nos cellules afin que les informations soient accessibles dans cette double hélice.

Miron utilise l’image d’un collier afin d’illustrer le fonctionnement de l’ADN à un brin. Le brin d’ADN représente la chaîne du collier, et les perles (ou la machinerie cellulaire qui lit et analyse l’ADN afin de créer des protéines) sont capables de se déplacer librement le long de cette chaîne.

« Elles peuvent continuer à se déplacer tant qu’elles ne rencontrent pas de noeud », précise C. Miron. « La cellule trouve généralement un moyen de défaire le noeud, mais si quelqu’un passait par-là avant et appliquait une sorte de superglue sur ce nœud… Il s’agirait en gros d’un objet fixe, d’une barrière infranchissable pour les perles ».

Ce nœud est un repli inhabituel d’ADN, appelé G-quadruplex ou G4, et le composé fraîchement découvert est en fait cette superglue capable de stabiliser l’architecture inhabituelle et d’empêcher l’accès à certaines sections.

D’après C. Miron, les recherches et les découvertes en bioinformatique effectuées au cours des dix dernières années indiquent que certains de ces nœuds peuvent se former directement en face d’oncogènes, des sections de l’ADN qui, une fois traitées, créent des protéines qui contribuent au développement du cancer et à la métastase, l’expression employée pour décrire la propagation d’un cancer vers une autre partie du corps.

« Nous pourrions contrer certains aspects du développement du cancer ou de la métastase en bloquant ce processus », confie C.Miron.

Les recherches de C. Miron montrent que les effets de ce composé pourraient aller au-delà du traitement contre le cancer.

« Ces nœuds se forment également dans le cas de nombreux autres virus, comme le virus Zika. L’impact potentiel de la recherche va donc au-delà du traitement contre le cancer », a confié C. Miron.

Miron s’est exprimée à propos des différentes applications possibles dans le cas du traitement du cancer, précisant que les nœuds étaient différents en fonction des différents quadruplex, et que certains étaient associés à la plupart des cancers alors que d’autres étaient plus spécifiques.

« Au moins un de [ces nœuds] qui permettent aux cellules cancéreuses de survivre, de continuer à se diviser inlassablement, est associé à environ 85 % des cancers », a confié C. Miron. « La spécificité pourrait jouer un rôle important, mais il pourrait également s’agir d’un spectre plus général, nous l’ignorons encore pour le moment ».

Nous avons reçu des nouvelles incroyables dans le domaine de la recherche contre le cancer cette semaine, félicitations à l’étudiante en doctorat canadienne Caitlin Miron pour son incroyable travail !

Le début des recherches

La jeune femme née à Ottawa a commencé son parcours dans le laboratoire du Dr Anne Petitjean à l’Université Queen’s. C. Miron s’est portée volontaire au cours du premier cycle, d’abord dans le domaine de la biochimie avant de passer à celui de la chimie suite à une expérience positive au laboratoire. Elle s’intéresse également à l’étude de l’ADN depuis le lycée, ce qui lui a permis de rester particulièrement motivée tout au long de ses recherches, du premier cycle au doctorat.

Une étape importante a été franchie lorsque l’étudiante en doctorat a décroché des bourses du Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie du Canada (CRSNG) et de Mitacs Globalink. La jeune femme a ainsi été en mesure d’étudier les composés découverts au laboratoire du Dr Petitjean (à Kingston, en Ontario) à l’Institut Européen de Chimie et Biologie à Bordeaux sous la supervision du Dr Jean-Louis Mergny.

« Le Dr Jean-Louis Mergny est probablement l’un des chercheurs les plus éminents dans le domaine des G-quadruplex », a confié C. Miron. « Ils ont inventé une sorte de plateforme de criblage à haut débit qui permet de tester un nombre important de composés ».

À son arrivée à l’IECB, C. Miron ne maîtrisait pas encore très bien les recherches particulières de J-L. Mergny sur le G4 et a donc dû apprendre beaucoup de choses sur le tas, en utilisant les composés chimiques qu’elle avait ramenés de l’Université Queen’s.

« Il ne s’agissait pas d’un domaine de recherche sur lequel nous nous basions vraiment, je connaissais donc assez mal les techniques que j’allais devoir étudier et le domaine en lui-même », a confié C. Miron. « Il s’agissait surtout de se lancer et de poser des questions, de passer d’expert en expert avec mes composés ».

Statut actuel et futurs projets

Le brevet provisoire a été rempli et la publication des conclusions de la jeune femme devrait suivre. Il sera toutefois peut-être nécessaire de compter un an avant que le brevet officiel ne soit complété, et des recherches plus approfondies seront nécessaires avant de présenter ces recherches à l’industrie médicale de manière officielle.

« Nous essayons de déterminer comment mieux cibler ces composés sur les cellules cancéreuses, comment favoriser leur entrée à travers une membrane cellulaire à l’intérieur d’une cellule, tout ce qui à trait à la biocompatibilité, tous ces éléments auront un impact sur l’industrie pharmaceutique plus tard », confie C. Miron.

Miron jouit aujourd’hui d’une importante notoriété grâce au succès de ses recherches. Elle est actuellement en train de finaliser le travail qu’elle a effectué avec le laboratoire Petitjean et l’IECB, et se concentre également sur la transmission des techniques acquises en France à l’Université Queen’s. L’étudiante en doctorat a été honorée de voir son travail reconnu par l’intermédiaire duprix Mitacs pour innovation exceptionnelle 2017, précisant qu’elle avait été très touchée par tous ces événements et par les mots de Kirsty Duncan, Ministre de la Science, et de Navdeep Bains, Ministre de l’Innovation, de la Science et du Développement économique.

« C’est un beau prix qui confirme l’importance de la recherche et de nos efforts », a confié C. Miron.

La carrière de C. Miron ne fait que commencer, et la jeune femme prévoit de travailler dans l’industrie plutôt que dans le monde universitaire. Elle souhaiterait également élargir la portée de ses recherches en intégrant un programme post-doctoral, et éventuellement demander aux membres du labo Petitjean de prendre le relais concernant ses découvertes de composés.

« J’aimerais beaucoup voir où tout cela va nous mener, mais, ces quatre dernières années m’ont également permis de comprendre que j’aime apprendre de nouvelles choses, explorer de nouveaux domaines et me concentrer sur des recherches multidisciplinaires », a confié C. Miron. « J’aimerais continuer à travailler dans le domaine de la santé, mais je ne pense pas vouloir me limiter à la recherche contre le cancer. J’ai réellement envie de travailler sur d’autres sujets aussi ».

Elisabetta Bianchini