Le gouvernement pourrait-il ressortir son vieux projet de réforme de la retraite à points?

Une potentielle sortie de secours si le gouvernement se retrouvait dans l'impasse pour faire adopter le recul de l'âge de départ à la retraite? D'un point de vue constitutionnel, rien n'empêcherait le Sénat, qui avait commencé à étudier la réforme de la retraite à points, après son adoption par l'Assemblée nationale en 2020, de s'emparer du texte de l'ancien projet de réforme des retraites du premier quinquennat Macron dans les prochaines semaines.

Loin de la philosophie de l'actuelle réforme des retraites que défend le gouvernement, Emmanuel Macron avait fait campagne en 2017 sur un système à points qui visait à calculer la pension de retraite non plus sur les 25 meilleures années de carrière mais sur un ensemble de points accumulés pendant la vie professionnelle.

"Si demain, quelqu'un souhaite la réactiver, c'est possible"

Après plusieurs journées de grève, la réforme de la retraite à points avait finalement été adoptée au Palais-Bourbon par 49.3 en février 2020 quand Édouard Philippe était Premier ministre, face à une majorité très divisée.

Le Sénat s'était ensuite emparé du texte le 4 mars. Mais le 16 mars, Emmanuel Macron annonçait le confinement liée au Covid-19 et la suspension de toutes les réformes en cours. La retraite à points ne sera finalement jamais soumise au vote des sénateurs et donc jamais déployée.

De quoi laisser la possibilité au Palais du Luxembourg ou au gouvernement d'aller au bout de la procédure parlementaire laissée en suspens il y a près de 3 ans.

"Là où à l'Assemblée nationale, tous les textes qui n'ont pas été votés en fin de mandature disparaissent, le Sénat est une assemblée permanente. Si demain, quelqu'un souhaite réactiver l'examen du projet de loi sur la réforme des retraites, c'est tout à fait possible", avance Jean-Philippe Derosier, professeur de Droit public à l'Université de Lille auprès de BFMTV.com.

Une hypothèse improbable

Avec deux options sur la table: d'abord celle d'un exécutif qui est à la manœuvre et qui peut réinscrire le texte à l'ordre du jour du Sénat ou bien la chambre haute qui décide elle-même de s'emparer du projet de loi.

"Sur le papier, tout cela fonctionne bien. Mais je ne vois pas pourquoi le Sénat voudrait reprendre ce texte. Et je vois encore moins pourquoi le gouvernement présenterait un projet de loi pour lequel il serait très surprenant qu'il ait la majorité des sénateurs", décrypte Benjamin Morel, maître de conférences en droit public à Paris-2.

L'hypothèse semble d'autant moins probable que l'exécutif est en grande difficulté politique. 72% des Français se disent opposés à la réforme des retraites d'après un sondage Elabe pour BFMTV. La sortie du ministre des Relations avec le Parlement qui a reconnu que les femmes seraient "un peu pénalisées" par la réforme a contribué à la défiance.

Les syndicats et la gauche présentent de leur côté un front uni contre la retraite à 64 ans et espèrent mobiliser très largement le 31 janvier après la grève du 19 janvier qui a été l'une des plus suivies de ces 3 dernières décennies.

Article original publié sur BFMTV.com