Le « privilège des minces » pourrait bien gouverner les réseaux sociaux

Un tweet sur le « privilège des minces » (‘thin privilege’) fait actuellement le buzz. Ce privilège concerne notamment les femmes minces qui sont félicitées sur les réseaux sociaux lorsqu’elles publient des photos de leurs repas riches en calories.

Le post du 15 juin, publiée par la star Youtube et auteure basée au Royaume-Uni Gracie Victory, auteure du mémoire à paraître No Filter, précise : « Si jamais vous vous demandez à quoi ressemblent la phobie des grosses et la glorification des minces », juste à côté de plusieurs images. La première : des captures d’écran d’une jeune femme toute menue fière de s’attaquer à une immense montagne de burgers et de frites, affirmant fièrement : « il me restait de la place pour le dessert ». Puis, des images d’une jeune fille britannique ronde de 13 ans, qui s’est récemment fait remarquer sur Instagram après avoir affronté sa « plus grande peur » en enfilant un maillot de bain avant de se rendre à la plage.

La jeune femme mince qui s’est fait plaisir au fast-food a reçu de nombreux commentaires d’internautes impressionnés et encourageants, dont « mon cerveau me dit de l’épouser », « une femme de rêve », « mon héros », « c’est sexy » et « elle déchire ».

Pourtant, l’image de l’adolescente britannique en maillot de bain, qui s’appelle Paris Harvey, a reçu les réactions suivantes (en plus d’autres messages de soutien) : « C’est dégoûtant », « je vois juste une baleine », « je ne savais pas qu’on encourageait l’obésité maintenant » et « c’est de sa faute si elle est grosse ».

Le post de G. Victory a eu un impact de taille, accumulant plus de 69 000 partages, 113 000 likes et 640 commentaires, de nombreuses personnes étant particulièrement sensibles à son message :

D’autres ont bien évidemment profité de l’occasion pour se moquer des personnes grosses à nouveau :

Les femmes minces qui sont félicitées lorsqu’elles se goinfrent ne représentent pas un nouveau phénomène, bien sûr. Au printemps, la reine de beauté et candidate à l’élection de Miss New York, Sarah Gould basée à Long Island a fait le buzz en publiant une vidéo Instagram d’elle en train de dévorer une part de pizza de 60 centimètres de long. Le post a attiré les éloges et les médias du monde entier ; elle a depuis publié des images d’elle en train de déguster des beignets, un énorme pretzel, des cheesesteaks et de gigantesques pancakes, sans attirer de moqueries.

Rares sont les personnalités sur les réseaux sociaux en mesure de s’en sortir indemnes lorsqu’elles sont grandes tailles et fières de manger en même temps. Virgie Tovar, activiste hyper populaire et défenseuse des rondeurs, y est parvenue, en devenant une héroïne fière de son corps et en montrant l’exemple à ses 27 300 followers sur Instagram qui adorent ses aventures gastronomie audacieuses et révélatrices. Mais, ça n’a pas toujours été tout rose, car elle a dû affronter pas mal de moqueries négatives pour en arriver là.

Mais, V. Tovar a récemment précisé qu’il ne fallait pas confondre son objectif à une forme de tolérance.

« Je ne cherche pas à être tolérée. Je souhaite que les intolérants se taisent et cessent de blesser les autres », a-t-elle confié dans un essai pour Ravishly. « Je souhaite que les forces culturelles qui isolent et stigmatisent les autres cessent. Je veux choisir de vivre ma vie comme je l’entends, sans avoir peur des réactions négatives des autres ».

« Tovar a ajouté que, « lorsque la taille du corps est concernée, le fait d’être gros est toujours considéré comme l’espace laissé derrière par la minceur ou les gens minces ». Elle qualifie cela de « relation binaire réductrice », où « l’embonpoint ne peut jamais exister sans être accompagné de justifications. D’après ce modèle, l’embonpoint ne peut jamais être un choix, un état souhaité, une manifestation d’intégrité et de désir. L’embonpoint est toujours associé à un espace négatif ».

Les choses ne devraient pas être ainsi, précise V. Tovar. Et G. Victory, mannequin Nike qui a collaboré avec la marque pour le lancement de sa collection grandes tailles au printemps dernier, est probablement d’accord elle aussi. « Se moquer de mon poids et de celui de ma copine suite à notre campagne Nike est hilarant » avait-elle tweeté à l’époque. « On va bien se marrer sur le chemin de la banque ».

Beth Greenfield