Les Français font moins l'amour au profit d'autres activités

De nombreux Français choisissent de délaisser les câlins sous la couette au profit d’autres activités jugées aussi voire plus satisfaisantes et surtout moins coûteuses en énergie. Quelles sont-elles ? Et pourquoi ce transfert ? Nous avons tenté de répondre à cette question.

Crédit Getty
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“Depuis quelques mois, mon mari et moi passons beaucoup de soirées à regarder des séries au lit ! Je crois que cela nous permet de nous vider la tête plus facilement qu’une partie de jambes en l’air”, explique Nadia qui ne s’inquiète pas particulièrement de la situation. Comme eux, de nombreux Français désinvestissent leur sexualité “de couple”. Une étude, réalisée en 2013 par Ipsos pour Philosophie, montre d’ailleurs que 45% d’entre eux pensent que l’énergie sexuelle peut être dépensée aussi bien dans le sexe que dans d’autres activités, comme le travail par exemple.

Quand le smartphone et Netflix tuent l’amour

Mais les activités qui éclipsent le plus les rapports sexuels restent le plus souvent celles liées aux écrans, comme la consultation des réseaux sociaux, le streaming, les services de vidéos en ligne comme Netflix, ou encore l’envoi de textos. “Le problème est qu’il y a quelques années, lorsque l’on éteignait la télévision à 22h30, il n’y avait rien d’autre à faire comparé à aujourd’hui et à la vérification systématique de nos smartphones” a expliqué dans The Telegraph le statisticien anglais David Spiegelhater, qui affirme que “les couples n’auront plus aucun rapport sexuel en 2030”.

Et les résultats d’études lui donnent en partie raison. Celle réalisée par l’Ifop pour l’hebdomadaire Marianne en 2014 révèle que les Français de plus de 18 ans ont moins de 6 rapports sexuels par mois en moyenne, contre 8,7 par mois en 2007 selon l’étude de l’Inserm, l’Ined et l’Anrs intitulée “contexte de la sexualité en France”.

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En cause également, quelques paramètres sociologiques comme le rythme de vie plus intense, la baisse du nombre des partenaires sexuels, l’augmentation de la part de célibataires mais aussi une conscience plus aiguisée des dangers : “Les jeunes de moins de 18 ans exposés à la séparation des parents s’avèrent plus frileux quant à l’union et aux relations sexuelles […] les conséquences de la libération sexuelle de leurs parents les choquent” explique Valérie Cordonnier, psychothérapeute et sexologue à Paris 14.

Mais la spécialiste incrimine aussi la tendance au “zapping” de stimulations et d’activités : “On ne peut pas tout mettre en priorité : être en couple, travailler, sortir, faire du sport, partir en week-end avec des amis. Le couple a l’impression qu’il aura toujours le temps pour la sexualité et “consomme” d’autres plaisirs plus éphémères en priorité. L’exhibitionnisme sur les réseaux sociaux laisse peu de temps à l’intimité et le sport souvent pratiqué pour le culte du corps et de l’esthétisme prend également du temps…”

La pornographie en ligne de mire

Valérie Cordonnier note aussi une augmentation de la masturbation, qui, chez les garçons comme chez les filles et “avec l’aide de supports très accessibles depuis les années 2000 est pour beaucoup plus satisfaisante que le rapport sexuel”. Et cette tendance pourrait s’amplifier avec la démocratisation de la réalité virtuelle qui va rendre possible une sexualité exempte de contraintes et de limites.

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Une évolution inquiétante selon la sexologue qui y voit “le développement de l’individualisme, l’éloignement du concret, du partage et de l’attention à l’autre”. “Il n’y a pas couple sans une sexualité qui permet cet espace intime ou l’on se retrouve pour oublier le quotidien et avoir du plaisir”, explique-t-elle.
“On ne cherche plus à exprimer son désir et on oublie de stimuler l’autre”, regrette de son côté Marie-Line Urbain, sexothérapeute à Levallois-Perret, qui prône un certain retour à l’effort : “Il ne s’agit pas de se forcer à faire l’amour avec un partenaire pour lequel on a pas d’attirance ou avec lequel on est en conflit, mais de se motiver à entrer en relation quand le quotidien et la routine font que l’on a autre chose à faire”, précise la thérapeute. Un conseil qui ne concerne pas les couples pour lesquels moins faire l’amour ne pose pas problème : “Il est sûr que si dans un couple, l’un veut faire l’amour une fois par semaine et l’autre quatre ou cinq fois, ça peut créer des conflits. Mais il y a des couples qui n’ont pas de sexualité et si cela leur va, il n’y a pas de jugement à porter”…