Complexes, injonctions, mauvais partenaires… Les Françaises sont les Européennes les plus insatisfaites au lit

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Une Française sur trois n'est pas satisfaite dans sa vie sexuelle et sentimentale. Un triste constat fait par Ifop et son Observatoire européen de la sexualité féminine. Menée sur près de 5 000 participantes partout en Europe, l'enquête dévoile les causes qui les empêchent de jouir d'une vie intime épanouie.

De la théorie à la pratique, l’heure est à la libération de la parole sur la sexualité des femmes. Mais si les réseaux sociaux ont été pris d’assaut par la notion de consentement, les débats autour du genre et du plaisir en solo ou à plusieurs, qu’en est-il de l’influence de porno ? Alors que dans les contenus classés X les femmes semblent jouir de leur position de soumise et d’une image bien souvent dégradante, la réalité est tout autre. Bien loin des clichés de la femme libérée épanouie sous la couette, une étude de l’Ifop révèle que les Françaises ne prennent pas leur pied… contrairement à leurs voisines européennes.

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L’enquête menée auprès de 5 025 femmes vivant dans les cinq plus grands pays européens (Espagne, Italie, France, Allemagne, Royaume-Uni), s’est intéressée à leur bien-être sexuel et sentimental à l’heure de le Covid-19. Et ce, en mesurant la fréquence de l’activité sexuelle et comparant les différences de pratiques sexuelles entre les grandes aires culturelles. Résultat : 35% des Françaises sont insatisfaites de leur vie sexuelle, c’est quatre points de plus qu’en 2016. En Allemagne, elles sont 23% à ne pas trouver leur plaisir, contre 27% au Royaume-Unis, 30% en Italie et 28% en Espagne.

Ifop
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Des partenaire pas assez attentifs aux besoins des femmes

Entre la charge mentale et les diktats de beauté, sans oublier les pratiques popularisées par le porno, nombreuses sont les entraves à l’épanouissement sexuel. Et le partenaire a un rôle notable à jouer. "38% des Européennes qui jugent leur partenaire ‘moins beau’ qu’elles se disent insatisfaites sexuellement, contre 11% chez celles qui le jugent ‘beaucoup plus beau’", apprend-t-on. Et lorsque ce n’est pas le désir qui est en cause, elles estiment à 56% que "leur conjoint n’est pas très attentif à leur plaisir" ce qui nuit à leur désir. Un triste constat qu’a fait Ana*. À 27 ans, la jeune femme confie n’avoir jamais eu de compagnon ou "plan cul" suffisamment "attentif" à ses ressentis. "Je crois même que certains n’ont jamais trop fait la différence entre quand je prenais du plaisir ou pas. Soit, c’était parce qu’ils n’osaient pas poser la question, soit ils étaient un peu trop sûrs d’eux et donc passaient complètement à côté du sujet". Elle ajoute : "Et puis, il y a ceux qui se prennent pour des dieux. Se pensant hyper doués, ils font les choses à leurs façons persuadés que je vais apprécier… alors que pas du tout. Prendre le contrôle oui, mais uniquement si la personne en face apprécie. La remise en question et la communication, vraiment, c’est important. Sinon, on ne s’en sort pas !"

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Quand les diktats de beauté perturbent la sexualité

Pour d’autres, ce sont les injonctions et normes physiques imposées aux femmes qui les empêchent de profiter de leurs moments d’intimité. "Le fait de ne pas correspondre aux normes esthétiques dominantes – de manière objective ou subjective – semble aussi constituer une variable ‘lourde’", rapporte le sondage. Ainsi, 33% des Européennes obèses ont fait part de leur mécontentement contre 23% chez les femmes maigres. Même constat pour celle qui ne se trouvent "pas jolies" avec 45% contre 15% de d’interrogées à l’aise avec leur image. Il faut croire que les complexes "qui découlent de cette mésestime de soi" freinent le relâchement nécessaire à leur épanouissement sexuel. "Je ne suis pas spécialement à l’aise avec mon corps, même s’il est tout ce qu’il y a de plus normal. Je ne suis pas maigre, mais je ne suis pas grosse non plus. J’ai des formes, mais assez pour dire que je suis ronde. Et si même un homme me dit que je suis jolie ou que j’ai de jolies formes, me laisser complètement aller dans une relation sexuelle n’est pas toujours facile. Je me demande toujours à quoi je ressemble, quel bourrelet va se plier, à l’aspect que je vais avoir selon les positions, à ma cellulite, ou à n’importe quel autre défaut que je pourrais me trouver. Bref, si on n’est pas dans le noir complet, il est quasiment impossible que je me détende et laisse suffisamment aller pour avoir du plaisir", déplore Ava*.

Celles qui votent à gauche, moins satisfaites au lit

Parmi les facteurs qui provoquent autant d’insatisfaites "made in France", la charge mentale trouve sa place sur le podiums. "Il semble que le non-respect de l’idéal d’égalité entre les sexes contribue également à ce mal-être sexuel", peut-on lire. Et pour cause. 26% des moins heureuses sous la couette effectuent "beaucoup plus" de tâches ménagères que leur conjoint actuel, contre 15% pour celles qui ont droit à une répartition équitable du travail domestique. Enfin, "l’expression d’un mal-être qui varie beaucoup en fonction du degré de religiosité". "A peine 18% des femmes pratiquant leur religion régulièrement se disent insatisfaites sexuellement, contre 35% des non-pratiquantes". Et même dans la sexualité, la politique semble avoir une influence : "Le degré d’insatisfaction sexuelle étant plus fort chez les femmes situées à la gauche de la gauche (33%) qu’à la droite de la droite (22%), sachant qu’elles ont généralement une sensibilité féministe plus marquée". Enfin, François KRAUS, directeur de l'expertise "Genre, sexualités et santé sexuelle" à l’IFOP note : "La plus forte insatisfaction mesurée en France tient sans doute à des éléments culturels – comme l’injonction à la performance qui pousse à des pratiques qui ne sont pas les plus épanouissantes – mais surtout à une pluralité de facteurs (ex : forte consommation d’antidépresseurs, chômage élevé, stress lié à vie professionnelle, conditions de confinement…) qui s’avèrent défavorables à cet épanouissement sans pour autant relever de leur sexualité stricto sensu".

Ifop
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*L'étude a été réalisée à l'occasion du lancement de Pokmi (première plateforme décentralisée de contenu pour adulte basée sur une cryptomonnaie de The Poken Compan) par le pôle "Genre, sexualités et santé sexuelle" de l’Ifop qui a mis en place un "observatoire de la sexualité féminine".

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