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Regina, 79 ans et Marjorie, 82 ans, amoureuses et en EHPAD : "On a longtemps cru qu'on ne pourrait jamais se marier"

Regina, 79 ans et Marjorie, 82 ans, amoureuses et en EHPAD :
Regina, 79 ans et Marjorie, 82 ans, amoureuses et en EHPAD : "On a longtemps cru qu'on ne pourrait jamais se marier" © Getty Images

Adoptée au Parlement le 23 avril 2013, la loi ouvrant le mariage aux couples de personnes de même sexe a été promulguée le 17 mai 2013. 10 ans plus tard, les personnes du même genre continuent de savourer le fait d'enfin pouvoir se dire oui. Regina et Marjorie* ont respectivement 79 et 82 ans. Elles se sont connues il y a 20 ans de cela, et sont tombées amoureuses. Aujourd'hui, elles vivent ensemble dans un Ehpad, et envisagent de se marier.

Le 15 novembre 2022, Liliane et Andrée se sont dit "oui" dans un Ehpad du Nord de la France. Les deux femmes, en couple de 47 ans, ont prouvé qu'il n'y avait pas d'âge pour s'unir à la personne que l'on aime. Toutes deux ont connu l'époque où deux femmes n'avaient pas le droit de se marier. Elles ont également connu l'époque où deux femmes n'avaient pas le droit de se pacser, ou même de s'établir en concubinage. Leur histoire a fait la Une des médias, et a eu le don d'inspirer de nombreuses personnes âgées. Regina et Marjorie en font partie.

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Une histoire d'amour commencée sur le tard

Les deux femmes sont résidentes dans Ehpad, dans le sud de l'Île-de-France, et leurs familles ne tiennent pas à préciser lequel, pour préserver leur intimité. "Mon fils a eu beaucoup de mal à accepter mon divorce, et le fait que je fasse mon coming-out l'a beaucoup surpris", glisse Regina. Née en Italie, la veille dame âgée de 79 ans a presque toujours vécu en France, mais sa famille a été élevée dans la tradition catholique italienne, et dans les doctrines des papes qui ne voyaient pas l'homosexualité d'un bon oeil.

"J'ai toujours été attirée par les femmes, mais je savais que mes parents n'approuveraient pas", regrette-t-elle. "Du coup, j'avais réussi à m'auto-persuader que je pourrais aimer un homme. Que le fait d'avoir des enfants suffirait à mon bonheur. Je me suis mariée en 1963 avec un homme que je n'aimais pas, mais pour qui j'avais beaucoup d'affection. Nous avons vécu vingt ans ensemble, et j'ai eu cinq enfants." Son ex-mari savait son attirance pour les femmes, et n'a pas été surpris de leur séparation. "Il m'a juste demandé d'en parler moi-même à nos enfants. Tous ont été surpris, mais mon fils aîné a été le plus réfractaire à l'idée. Je pense que c'est notamment pour lui que je ne me suis pas affichée très vite avec des femmes.

Marjorie, elle, n'a jamais été en couple avec une femme avant de rencontre Regina. "Je n'ai pas été mariée à un homme non plus", précise-t-elle. "Le sexe ne m'intéressait pas. J'étais très bien dans mon célibat, dans mon rôle de vieille fille à chat. Je ne m'étais même pas posé la question avant de rencontrer ma compagne via le milieu associatif. Une petite fille que je gardais régulièrement, devenue ado, venait de faire son coming-out, et je voulais avoir suffisamment d'informations pour la soutenir, car sa famille n'était pas très ouverte. Regina m'a proposé de me renseigner autour d'un café." A l'époque, elles avaient respectivement 59 et 62 ans. Et elles sont tombées amoureuses.

"Je n'avais pas grand-monde à qui faire mon coming-out"

Surprise de tomber sous le charme d'une femme, Marjorie décide de se laisser tenter : "Au risque de manquer totalement de pudeur, je ne m'attendais pas à attendre la soixantaine pour avoir mon premier orgasme", affirme la vieille dame avec un grand sourire. "J'ai compris que ce n'était pas le sexe qui m'indifférait. Mais le sexe avec des hommes, les pauvres. Gina a été la seule dans mon lit, ma première depuis bien des années aussi. Ma révolution sexuelle, c'est elle", clame-t-elle avec tendresse.

Si Regina avait déjà fait son coming-out à ses proches, sa relation avec Marjorie a été la première qu'elle a officialisé à ses proches. "Moi, je n'avais pas grand-monde à qui faire mon coming-out", souligne Marjorie. "Mes parents sont morts, je n'ai pas de famille, pas d'enfants. Mais la petite fille que je gardais, devenue une magnifique jeune femme, a été l'annonce la plus importante. Pas de bol : elle m'a dit l'avoir su avant moi, et que c'est pour ça qu'elle n'avait pas eu peur de me parler. Elle aurait pu me le dire quand même !", rit-elle, sur un faux ton de reproches. "En 2013, dès que la loi est passée, elle s'est mariée avec sa compagne, et c'est moi qui l'ai amenée à l'autel", affirme la vieille dame. "Elle est un peu notre fille adoptive, et sa femme aussi."

Un projet de mariage pour les deux femmes ?

L'union de leur jeune amie a été très émouvante pour le couple de lesbiennes seniors : "Pensez-vous, à notre époque, c'était quelque chose de caché ! On aura jamais cru avoir le droit de se marier", explique Marjorie. "On en était tellement sûres que l'idée ne nous a pas traversées tout de suite. Je mets ça sur le compte de l'âge, nos cerveaux sont trop vieux, ils n'ont plus les mêmes réflexes", sourit sa compagne. Depuis un peu plus d'un an, les deux femmes vivent ensemble dans un EHPAD, et pour des questions administratives, elles envisagent désormais d'officialiser leur union.

"Je pense que nous avons encore quelques belles années devant nous", affirme Marjorie. "Mais je ne suis pas en parfaite santé. Je veux que Regina puisse prendre toutes les décisions en ce qui me concerne, et c'est toujours plus facile en étant mariées. Avant, on n'en voyait pas l'utilité, on s'aime, c'est tout." Ce à quoi sa compagne répond, avec tendresse : "Tu sais ce qu'il te reste à faire. Moi, j'attends la bague."

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