Livres : le top 10 du mois de décembre
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Livres : le top 10 du mois de décembre
Le mois de décembre s’installe et si on ne rechigne pas à binge watcher des films de Noël, on apprécie fortement de se lover chez soi avec un bon livre (ou tout une pile). L’activité idéale pour combattre les températures en berne et occuper nos prochaines soirées hivernales – au coin du feu pour les plus chanceux d’entre nous. Alors ni une ni deux, on pioche à l’envie dans notre top ten du mois, composés de petites pépites littéraires.Des livres à dévorerAu programme : sauts dans le passé, romans palpitants, histoire de Noël, et recueils frissonnants. Découvrez nos dix coups de cœur livres du mois de décembre. Une sélection lue et approuvée par la rédaction qui vous donnera peut-être de (bonnes) idées de cadeaux à mettre au pied du sapin.© Getty - 2/7
« Une famille inquiète », de Renan Luce (Flammarion)
« Délicatesse », c'est le mot qu'on a constamment en tête en lisant Renan Luce. L'artiste, qui déjà en classe de maternelle rêvait de devenir « chanteur-compositeur-interprète » – comment résister au chic de la formule ? –, a choisi, pour son premier livre, de raconter son enfance : « Il me faut déplier mes souvenirs. Les étirer comme le ferait un chat après une sieste au soleil. » Et ce faisant, il nous présente sa famille. Unie, complexe, dysfonctionnelle… comme toutes les familles ? Entre cette fratrie de trois enfants, désormais adultes, et leurs parents, il y a presque autant d'amour que de non-dits : de sa grande sœur, Claire, qui ne peut vivre seule, Renan mettra quarante-trois ans à connaître le nom du handicap de naissance. Syndrome de Saethre-Chotzen, lâche enfin le père, médecin, le jour où le chanteur tente d'en finir avec les sujets tabous. À son grand frère, Damien, musicien génial trop souvent terrassé par des épisodes dépressifs, l'écrivain veut dire son admiration, mais aussi sa colère et sa culpabilité, d'avoir réussi à sa place, peut-être. Et puis il y a les parents, dépeints avec une immense finesse. Des gens malmenés par la vie, qui ont fait ce qu'ils pouvaient. Le livre s'appelle « Une famille inquiète », il aurait pu s'appeler « Voyez comme on s'aime ».
Alix Girod de L’Ain
© Presse - 3/7
« Fragile réputation », de Sarah Vaughan (Préludes)
Au cœur de « Fragile réputation », il y a d'abord une formidable idée : celle de construire un roman avec en toile de fond le harcèlement dont sont victimes les femmes politiques. Emma Webster, 44 ans, est divorcée et mère d'une adolescente. Engagée auprès des électeurs de sa circonscription, elle a porté un projet de loi contre le harcèlement en ligne. Mais pour les trolls anonymes des réseaux sociaux, elle est une « cinglée », une « salope », une « cochonne ». Séduite par un journaliste de tabloïd qui la soutient dans son combat politique, elle passe une nuit avec lui, avant de se raviser et de le congédier un peu brusquement. Mais lorsqu'elle retrouve Mike (c'est son nom), le crâne fracturé, dans sa maison londonienne, sa vie bascule vers le sordide. Variant les formes et les points de vue, l'autrice décortique le mécanisme qui transforme une femme de pouvoir engagée et forte en une proie si terrifiée par ses prédateurs, tapis dans l'ombre des pixels, qu'elle en arrive à commettre l'irréparable. La deuxième partie du roman, axée sur le procès d'Emma, est l'occasion de creuser cette machine à broyer la confiance en soi. Difficile de résumer sans trop en dire, alors contentons-nous d'écrire que, comme dans tout bon thriller, la vérité est plus compliquée qu'il n'y paraît. Qu'il est bon de se laisser manipuler par une autrice compétente !
Clémentine Goldszal© Presse - 4/7
« L’amour de ma vie », de Rosie Walsh (Les Escales)
Après dix ans de mariage, Emma et Leo s'aiment encore follement. Parents d'un petit garçon de 3 ans, ils sont des amis, des amants, des alliés, qui ont mené main dans la main le combat contre le cancer d'Emma. Mais dans l'attente angoissée des résultats des examens de contrôle, voilà que Leo se met, comme pour conjurer le sort, à écrire en cachette la nécrologie de sa compagne. Il faut dire que c'est son métier (il travaille dans un grand journal et la mort est son quotidien) et qu'Emma est une biologiste marine reconnue, qui a connu son quart d'heure de célébrité grâce à une émission de télé où elle recherchait dans le sable des spécimens rares. Bien entendu, c'est d'abord un détail, une petite incohérence de rien du tout, qui attire l'attention de Leo : sur sa photo de remise de diplôme, la couleur de l'habit de sa femme ne correspond pas à l'université où elle prétend avoir étudié. Mais les lectrices de romans à suspense savent bien ce qui arrive aux curieux qui décident de tirer sur un fil : ils détricotent la belle tapisserie de leur existence. Le pitch est familier (votre femme n'est pas celle que vous croyez), mais la beauté du roman de Rosie Walsh est d'aimer également tous ses personnages, et de croire jusqu'au bout en leurs justes intentions. Il n'y a pas ici de perverses manipulatrices, mais plutôt des humains parfois trop faibles pour assumer. Un très beau roman d'amour.
Clémentine Goldszal© Presse - 5/7
« Jean-Louis Trintignant, une histoire de famille », de Laurent Del Bono (Éditions Prisma)
De Jean-Louis Trintignant, on croyait presque tout savoir. Lors de sa disparition, le 17 juin dernier, à l'âge de 91 ans, nous nous étions penchés avec tristesse et admiration sur le parcours de ce monstre sacré, émaillé de films mythiques autant que de drames intimes. Dans une biographie passionnante, « Jean-Louis Trintignant, une histoire de famille », le journaliste Laurent Del Bono dresse le portrait d'un homme à l'indéniable mélancolie, né dans une famille de notables de Pont-Saint-Esprit, de parents qui ne furent jamais heureux ensemble. Plus tard, le garçon timide, introverti, incapable de jouer autrement que tête baissée, se révélera devant la caméra de Roger Vadim, lequel l'avait choisi justement pour son physique peu charismatique. La suite lui donnera tort. Au rayon des anecdotes, on apprend que l'acteur a avalé quarante blancs d'œufs afin d'être diagnostiqué diabétique pour échapper au service militaire, qu'il était un cousin éloigné de Jackie Kennedy, qu'à la productrice Margaret Menegoz, qui essayait de le persuader de tourner dans « Amour », de Haneke, il répondit : « Je songe à me suicider. » « Eh bien, vous le ferez une fois le film terminé », lui dit-elle, ce qui acheva de le convaincre. Aussi modeste que discret, cet acteur de génie et père deux fois endeuillé n'aura eu de cesse de fuir une gloire pourtant tellement méritée.
Nathalie Dupuis© Presse - 6/7
« Taormine », d'Yves Ravey (Les Éditions de Minuit)
« Je le répète Luisa, tant que rien ne change, tant que personne ne nous pose la question, nous ne sommes pas concernés. » Le narrateur conseille à son épouse de faire comme si de rien n'était, mais la voiture qu'ils ont louée vient tout de même de heurter « quelque chose » qui pourrait être quelqu'un. D'une langue sans adjectifs, lisse, rythmée, dont l'ironie est époustouflante, Yves Ravey raconte l'engrenage d'un mensonge émis par deux individus sans vergogne. Le narrateur et Luisa, sa femme, ne s'entendent pas bien. Entre eux, ça grince. Ils partent en vacances en Sicile, espérant se reposer et se réconcilier. À la place du repos, c'est l'angoisse qu'ils récoltent : la faute qu'ils ont commise – cogner un corps avec leur voiture et continuer leur route – a laissé des traces, et ils sont recherchés. Plus ils nient la gravité de ce qu'ils ont fait, plus ils se mettent en difficulté, deviennent glaçants et fascinants. À leur façon, ces êtres insipides sont exceptionnels. L'écrivain rend sensible de la plus discrète des manières la nervosité du couple. Elle devient la nôtre. Dans cette déclinaison du roman noir, l'humour est partout. Luisa et le narrateur se débattent avec la culpabilité ; ils l'envoient balader. La morale ? Très peu pour eux. « Taormine », dont le décor italien n'a rien d'une carte postale, est un roman admirable sur la responsabilité. Les voyageurs restent fidèles à leur lâcheté : « Voici ma consigne, ai-je déclaré : ne pas changer d'un iota notre programme. » Ce plan leur portera-t-il chance ?
Virginie Bloch-Lainé© Presse - 7/7
« Hommes », d'Emmanuelle Richard (Éditions de l'Olivier)
Décembre 2018. Lena, 28 ans, passe un été à la campagne, échangeant le gîte et le couvert contre des travaux de jardinage dans une propriété anglaise. Là, elle rencontre Aiden, un Australien plus âgé qui réveille en elle une libido en sommeil. Et puis, un soir, Aiden se change en bête. Les mains autour du cou de Lena, il sert. Elle prend peur, et l'histoire se termine là. Sans drame, mais avec le souvenir lancinant de cette puissance masculine passée en un instant de désirable, « sexy », sensuelle, à inquiétante, abusive, « verticale ». Vingt ans plus tard, le visage de l'ancien amant s'affiche à la télévision. Il est accusé d'agressions sexuelles, et la mémoire revient comme un boomerang. Celle d'Aiden mais aussi de Gwyn, un amant intelligent, qui ouvrit à Lena les portes d'une sexualité consentie, épanouissante, partagée. Emmanuelle Richard, romancière du désir et de la colère, du sexe et du féminisme, révélée avec le sublime « Pour la peau », interroge les effets pervers de la domination sur l'intimité avec une verve et une fureur galvanisantes. La romancière se fait polémiste, se dressant contre le désir masculin érigé en totem. Mais là où Richard excelle, c'est quand son « female gaze » se porte sur le désir féminin. Avec une acuité et une sensualité extraordinaires, elle explore ce continent sous-exploré de la littérature. Un geste artistique et politique puissant.
Clémentine Goldszal
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© Presse
Décembre est là et apporte avec lui notre sélection du mois. Cap sur nos dix coups de cœur littéraires à savourer.Le mois de décembre s’installe et si on ne rechigne pas à binge watcher des films de Noël, on apprécie fortement de se lover chez soi avec un bon livre (ou tout une pile). L’activité idéale pour combattre les températures en berne et occuper nos prochaines soirées hivernales – au coin du feu pour les plus chanceux d’entre nous. Alors ni une ni deux, on pioche à l’envie dans notre top ten du mois, composés de petites pépites littéraires.Des livres à dévorerAu programme : sauts dans le passé, romans palpitants, histoire de Noël, et recueils frissonnants. Découvrez nos dix coups de cœur livres du mois de décembre. Une sélection lue et approuvée par la rédaction qui vous donnera peut-être de (bonnes) idées de cadeaux à mettre au pied du sapin.