La manifestation du 23 mars est celle où la jeunesse s’est le plus mobilisée

La jeunesse s’est massivement mobilisée  ce jeudi 23 mars, pour la neuvième journée de mobilisation contre la réforme des retraites.
La jeunesse s’est massivement mobilisée ce jeudi 23 mars, pour la neuvième journée de mobilisation contre la réforme des retraites.

Les jeunes expliquent que le recours au 49.3, les images de violences policières ou les dernières prises de parole d’Emmanuel Macron ont été des déclencheurs.

MANIFESTATIONS - Dans les cortèges, ils se sont fait applaudir par leurs aînés. En colère contre le recours au 49.3 ou les violences policières, une partie de la jeunesse a amplifié sa mobilisation ce jeudi 23 mars contre la réforme des retraites, avec des actions de blocages dans des lycées et des universités, et une forte participation aux manifestations.

Dès ce jeudi matin, des dizaines de lycées et établissements universitaires ont été le théâtre de blocages ou rassemblements dans toute la France, à l’appel de différentes organisations. Une aussi forte représentation de la jeunesse dans les cortèges est nouvelle depuis le début des mobilisations contre la réforme des retraites.

L’Université d’Assas bloquée pour la première fois

Dans la matinée, l’accès à des lycées et sites universitaires a notamment été bloqué à Paris, Rennes, Marseille ou Toulouse. L’une des actions les plus symboliques a été celle de l’Université d’Assas, qui a été bloquée pour la première fois de son histoire. « On veut montrer notre mécontentement face à cette réforme, même à Assas il y a de la colère », a déclaré à l’AFP Redouane, 23 ans, devant cette fac de droit parisienne.

Au total, le ministère de l’Éducation nationale a signalé « 148 incidents » dans des lycées en France, dont 38 blocages, 70 blocages filtrants, 14 tentatives de blocages et 26 autres formes de perturbations. L’Hexagone compte quelque 3 700 lycées.

Le syndicat étudiant L’Alternative a lui comptabilisé quelque 80 écoles d’enseignement supérieur et universités mobilisées, dont une soixantaine bloquées ou occupées. L’Unef, principal syndicat étudiant, a aussi revendiqué des « records de mobilisation » dans la rue.

Forte mobilisation hors de Paris

À Paris, étudiants et lycéens ont défilé par milliers, beaucoup plus nombreux que les fois précédentes, ont constaté des journalistes de l’AFP. Avant le départ du cortège parisien, Philippe Martinez (CGT) a souligné la présence de « beaucoup de lycéens, d’étudiants ». Nombre d’entre eux ont décidé de se mobiliser une fois passées les épreuves de spécialité du bac, de lundi à mercredi.

Une mobilisation accrue que l’on retrouve également hors de la capitale. À Montpellier, le préfet de l’Hérault a relevé une présence de jeunes « plus importante que d’habitude ». « Il y a un mois, on n’aurait pas pu faire un tel cortège », a indiqué Adèle Choppé, 16 ans, secrétaire générale du syndicat lycéen FIDL à Montpellier. « L’interview de Macron m’a plutôt mobilisé. Et j’ai des amis à qui ça a fait prendre conscience qu’il fallait y aller », dit Arthur, 22 ans, à Dijon.

À Toulouse, de « grosses grappes » d’étudiants ont pris corps au cortège, rapporte 20 Minutes, ajoutant que leurs aînés ont applaudi leur venue. La jeunesse marseillaise a, elle, manifesté en masse sur les voies de la gare Saint-Charles, selon les journalistes de BFM TV sur place. À Lyon, « on finit nos études à 23-24 ans, donc l’âge légal de départ à 64 ans, pour nous, ce sera beaucoup plus tard », a déploré Zaziz Roques, vice-présidente de l’UNEF Lyon, au micro de BFMTV.

Plus à l’ouest, place de la Bourse à Bordeaux, les jeunes manifestants se sont mobilisés criant « grèves, blocages, Macron dégage » et « de l’argent il y en a dans les caisses du patronat », rapporte Jean Cittone, journaliste au Figaro, sur Twitter.

« Les jeunes, ça amplifie le mouvement, ça crée de la dynamique, on passe un cran », estime Benoît Teste (FSU), rappelant la formule qui veut que les mouvements de jeunesse soient « comme le dentifrice : quand ils sont sortis du tube, on ne peut plus les faire rentrer ».

Le déclic du 49.3

Jusque-là plus timide, tant le sujet des retraites peut sembler éloigné de leurs préoccupations, la mobilisation de la jeunesse s’est renforcée depuis une semaine. Les raisons de cette évolution ? Le recours au 49.3, les images de violences policières ou les dernières prises de parole d’Emmanuel Macron, qui a estimé que la « foule » n’avait « pas de légitimité » face aux élus, selon les témoignages recueillis dans les cortèges.

Des étudiants se sont rapprochés des travailleurs de différents secteurs (éboueurs, cheminots...) et participé à des actions communes (par exemple une manifestation jeudi devant l’incinérateur de déchets d’Ivry-sur-Seine, Val-de-Marne) ou se retrouvent le soir pour manifester.

Célia, 20 ans, en DUT infocom, a manifesté pour la première fois. « C’est le 49.3 qui m’a énervée », a-t-elle dit à l’AFP. Cécile, 22 ans, souligne « ne jamais avoir eu autant d’amis » dans les manifestations. Pour elle, « le 49.3, c’est une manière de faire qui ne passe plus, de même que les violences policières ». Le 49.3 « m’a réveillée », renchérit Camille, 18 ans, étudiante à l’institut catholique de Paris, qui se dit « révoltée » par les discours de la Première ministre Élisabeth Borne et du président Emmanuel Macron.

Stéphane Sirot, historien et sociologue, spécialiste des mouvements sociaux, relève « une présence plus marquée des jeunes, étudiants surtout ». « Ils s’impliquent davantage. Cela marque sans doute un tournant, car la question va au-delà de la réforme des retraites en elle-même ». « Depuis l’adoption du 49.3 par le gouvernement, la question démocratique les taraude », ajoute-t-il. « Ça peut apporter du grain à moudre à la mobilisation », conclut-il.

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