Le ministre de la Justice Éric Dupond-Moretti sera jugé à partir du 6 novembre pour prise illégale d’intérêts
Le garde de Sceaux sera jugé par la Cour de justice de la République du 6 au 17 novembre prochain. Il s’agit d’une grande première pour un ministre en exercice.
JUSTICE - C’est un procès inédit qui s’annonce pour l’automne. Le ministre de la Justice Éric Dupond-Moretti doit comparaître devant la Cour de justice de la République pour des soupçons de prise illégale d’intérêts à partir du 6 novembre et jusqu’au 17 novembre, comme l’a décidé la Cour de cassation ce jeudi 14 septembre. Une situation inédite pour un ministre en exercice.
La Cour de Cassation avait déjà confirmé ce renvoi d’Éric Dupond-Moretti devant la CJR le 28 juillet dernier, alors que le ministre avait formé sept pourvois contre la procédure et un huitième contre l’arrêt d’octobre ayant prononcé son renvoi en procès.
Alors que sa défense misait beaucoup sur cette série de recours, la Cour de cassation a largement validé l’enquête, suivant intégralement les réquisitions formées par l’avocat général Frédéric Desportes lors de l’audience du 7 juillet. Le procureur général près la Cour de cassation, Rémy Heitz, représentera l’accusation à ce procès.
Des saisines abusives de l’inspection générale de la justice ?
Éric Dupond-Moretti est soupçonné d’avoir profité de sa fonction de ministre pour régler des comptes avec des magistrats auxquels il s’était opposé dans sa première vie d’avocat. Tout au long de cette information judiciaire ouverte début 2021, le ministre a répété n’avoir fait que « suivre les recommandations de son administration » en déclenchant des enquêtes contre des magistrats, et dénoncé une instruction de la CJR à charge.
Dans le détail, et comme l’a confirmé le procureur général près la Cour de cassation Rémy Heitz dans un communiqué publié ce jeudi, Éric Dupond-Moretti se voit reprocher l’infraction de « prise illégale d’intérêts » dans deux affaires de saisine potentiellement abusive de l’inspection générale de la justice.
Un premier dossier concerne l’enquête administrative ordonnée en septembre 2020 à l’encontre de trois magistrats du Parquet national financier (PNF). Ceux-ci avaient fait éplucher ses factures téléphoniques détaillées (fadettes) quand Eric Dupond-Moretti était encore une star du barreau, dans le but de débusquer une éventuelle taupe qui aurait informé l’ex-président Nicolas Sarkozy qu’il était sur écoute, dans l’affaire de corruption dite « Paul Bismuth ».
Le second dossier concerne l’enquête administrative contre un ancien juge d’instruction détaché à Monaco, Edouard Levrault, qui avait mis en examen un de ses clients quand M. Dupond-Moretti était avocat. Ce dernier avait à l’époque critiqué des méthodes de « cow-boy ». Aucun de ces quatre magistrats n’a été sanctionné. Ils avaient été mis hors de cause par l’organe disciplinaire des magistrats.
Si la Première ministre Élisabeth Borne a jusqu’ici maintenu sa confiance envers son ministre, cette audience et surtout son issue pourraient remettre en question l’avenir politique d’Éric Dupond-Moretti.
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