OnlyFans est-il le nouveau MySpace (du sexe) ?

Side view of sexy young woman in black lingerie making selfie using a smartphone and smiling while lying on bed
© Getty Images

Lancé en 2016 en Grande-Bretagne, OnlyFans est un service de contenu par abonnement qui fait de plus en plus d'émules, en particulier les travailleurs et travailleuses du sexe. Les internautes peuvent y partager leurs photos, vidéos, musiques, textes et créations, auxquels le public peut accéder moyennant un abonnement. Un service qui n'est pas sans rappeler MySpace, et qui attire de plus en plus d'adeptes. Zoom sur un nouveau phénomène qui ne fait que monter en puissance.

Après avoir fait son petit bonhomme de chemin de manière plutôt discrète, le site OnlyFans a connu une véritable médiatisation à l'occasion du confinement. Privées de leurs revenus à cause de la crise sanitaire, de nombreuses personnes ont décidé de tenter leur chance sur cette plateforme qui permet de vendre du contenu, grâce à un système d'abonnement. Et plus précisément : de vendre du contenu à caractère sexuel, puisque les travailleurs et travailleuses du sexe y sont particulièrement présents.

Un bon moyen de reprendre le contrôle sur son image

Les sites sur lesquels il est possible de diffuser de la nudité ou du contenu à caractère pornographique sont rares, et risquent de l'être encore plus si les nouvelles lois sur le porno finissent par passer. Pendant longtemps, des travailleurs et travailleuses du sexe (TDS) ont utilisé des sites tels que Patreon, qui proposaient des systèmes d'abonnement, pour vendre du contenu érotique. Mais les conditions d'utilisation générales ont évolué, et interdisent désormais la pornographie. Il en va de même sur Instagram, toujours prompt à censurer le moindre petit téton.

La solution ? Twitter, pour beaucoup, puisque le réseau social à l'oiseau bleu est aujourd'hui le seul à ne pas censurer les photos et vidéos dénudées, y compris à caractère pornographiques. Seulement voilà : Twitter est un réseau social public, et le risque est donc de voir son contenu être volé, diffusé à son insu sur des sites pornos, utilisé comme revenge porn par des individus mal intentionnés. Et surtout, sur le réseau, tout est gratuit, ce qui prive les TDS d'une potentielle rentrée d'argent importante.

Ce sont ces raisons qui ont poussé Lowiness à tenter sa chance sur OnlyFans. La jeune femme évolue dans le milieu du porno depuis quelques années, et possède désormais un compte sur OnlyFans depuis 6 mois. Et elle ne tarit pas d'éloge sur la plateforme : "Ça faisait longtemps que je vendais des photos et des vidéos via Twitter, mais il fallait passer par Paypal pour le paiement, par Wetransfer pour les envois... C'était une vraie galère. Là au moins, tout est regroupé dans un seul outil, toute la logistique est prise en charge par la plateforme. Et le système d'abonnement est pratique, ça permet d'avoir une rentrée d'argent qui est assez régulière."

De l'art de se créer une communauté

Sur sa page, la performeuse dit proposer "du porn à sa manière" : "Des photos de moi en sous-vêtements, des nudes, des petites vidéos courtes où je me déshabille, je m'habille, je danse... Des vidéos de masturbation aussi, mais très légères. Pour avoir du contenu plus graphique, il faut payer en supplément. Ça me permet vraiment d'avoir un contrôle sur le contenu que je diffuse, par rapport à Twitter par exemple. C'est une petite communauté, donc les gens sont moins susceptibles de voler mon contenu ou de le diffuser là où je n'ai pas envie que ce soit diffusé, surtout qu'il y a un watermark. Ça renforce la tranquillité d'esprit.

OnlyFans rappelle forcément MySpace, qui a permis à de nombreux artistes de se faire connaître par le passé. La plateforme est payante, ce qui fait que seules les personnes vraiment intéressées par le contenu que l'on y propose sont présentes, et selon Lowiness, la bienveillance est toujours au rendez-vous. "Mes fans sont trop doux ! C'est un peu la communauté que je me suis forgée sur tous les réseaux sociaux : des hommes, majoritairement, entre 20 et 50 ans, je dirais, quelques femmes aussi, mais assez peu. Et uniquement des gens très bienveillants. Ils sont toujours partant pour me faire des retours, sont toujours très positifs. J'ai de la chance de ne jamais avoir eu droit à de propos ou de comportements déplacés. Comme les gens payent pour venir, l'engagement de l'abonnement fait que les gens sont plus respectueux."

Une plateforme qui fait polémique

Mais comme souvent dans l'univers du travail du sexe et de la pornographie, OnlyFans n'est pas exempt de polémiques, en particulier sur les réseaux sociaux. Le hashtag #OnlyFans fait partie des plus discutés presque toutes les semaines, et regroupe de nombreuses insultes à l'égard de ces femmes – même si de nombreux hommes sont aussi présents sur la plateforme ! – qui osent monétiser leur corps.

Ces critiques, Lowiness refuse de les laisser l'atteindre. "C'est limite un marronnier. Dès que, en tant que femme, on monétise notre sexualisation, on s'en prend plein la gueule. Ça a commencé avec les actrices porno qui enregistraient des films sur cassette, aujourd'hui, c'est sur OnlyFans. Moi, aujourd'hui, ça ne me touche plus. Au contraire, je me dis que quand ça arrive en TT, ça va me faire des nouveaux abonnés. Je sais qu'il y a des gens qui ne supportent pas ce harcèlement, mais moi ça me passe au dessus. J'ai l'habitude, avec le militantisme, le féminisme. Je suis trop éduquée à toutes ces choses pour que ça m'emmerde, ce genre de polémique."

OnlyFans pour les artistes, c'est possible ?

Si la plateforme OnlyFans est principalement connue pour son utilisation liée au porno, de plus en plus d'artistes s'y intéressent pour proposer des chansons, des vidéos de danse, ou même des dessins et des tours de magie. Et selon Lowiness, le site représente un vrai attrait pour les gens qui bénéficient déjà d'une belle communauté. "Je pense que les YouTubeurs, par exemple, peuvent trouver un public sur OnlyFans, une manière de monétiser leur contenu de façon différente. C'est le but de la plateforme, après tout : monétiser l'amour des fans. Pour des artistes comme des chanteurs, c'est plus compliqué, parce qu'il n'y a pas forcément le même attrait à la nouveauté, à moins d'avoir une communauté déjà bien fournie et bien présente."

La jeune femme estime en effet qu'OnlyFans est "connoté par usage" : "Forcément, quand les TDS de tous vents ont découvert cette plateforme, qui autorise le porno, tout le monde s'y est jeté. Mais si deux trois grosses têtes de la pop culture, des gens connus, s'y mettent pour proposer un autre type de contenu, la connotation va changer. Leur présence pourrait "déporniser" OnlyFans." D'ailleurs, Cardi B compte bien le prouver. En proposant des backstages sur sa page OnlyFans, la rappeuse pourrait bien se faire des millions de dollars grâce au système d'abonnement. La plateforme pourrait bien devenir le nouveau moyen de soutenir nos artistes préférés dans le futur... D’ailleurs, des drag queens, des chanteurs et chanteuses ou mêmes des acteurs et actrices tels que Bella Thorne se sont déjà lancés à sa suite. Reste à savoir si leurs fans suivront le mouvement.

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