La rentrée parlementaire s’annonce électrique, malgré le spectre de la dissolution

Les députés « au taquet » pour cette rentrée malgré le spectre de la dissolution
CHRISTOPHE ARCHAMBAULT / AFP Les députés « au taquet » pour cette rentrée malgré le spectre de la dissolution

CHRISTOPHE ARCHAMBAULT / AFP

Les députés « au taquet » pour cette rentrée malgré le spectre de la dissolution

POLITIQUE - Le théâtre lève son rideau. Les députés font leur rentrée ce lundi 3 octobre dans l’hémicycle de l’Assemblée nationale après un mois de septembre en coulisses, partagé entre travail en circonscription et commissions pour défricher les textes. Au programme de ces premières heures au Palais Bourbon : un débat sur la guerre en Ukraine et ses conséquences en France, puis le texte clivant sur l’assurance chômage.

Un bon échauffement avant la bataille la plus rude, celle du budget, prévue pour le 10 octobre prochain. Majorité relative oblige, tous les états-majors s’attendent à des discussions acharnées, deux mois après les premières anicroches sur le projet de loi pouvoir d’achat, pourtant bien plus consensuel que le nouvel ordre du jour.

L’Union de la gauche, qui a fourbi ses arguments tout l’été, va s’élever d’un bloc contre la réforme de l’assurance chômage, tandis que la majorité promet de ne pas se faire marcher sur les pieds. En toile de fond, le spectre de la dissolution, récemment agité par Emmanuel Macron, reste dans toutes les têtes.

« Le débat sera difficile tant sur le fond que sur la méthode », pronostique une macroniste, qui se remémore une session de juillet déjà « violente » pour le paquet pouvoir d’achat, avec de « l’hyperthéâtralité » dans l’hémicycle. Rebelote ? Les insoumis, fidèles à leur opposition musclée, promettent « une guérilla parlementaire, une bataille féroce et farouche » à la majorité, selon l’élu de Seine-Saint-Denis Alexis Corbière, cité par l’AFP.

« Vous allez nous entendre ! Là on a été arbitre de Roland Garros à regarder passer les balles, mais c’est fini ! »
Karl Olive, député Renaissance des Yvelines

« On est au taquet pour cette rentrée », confirme son collègue LFI, le député de Paris Rodrigo Arenas au HuffPost. Et ils ne sont pas les seuls. La rentrée parlementaire « tombe à point nommé », renchérit un parlementaire écolo, pas mécontent de sortir de l’ornière après un mois de septembre contraint par les affaires de violences sexistes et sexuelles, soldées par les « mises en retrait » d’Adrien Quatennens (LFI) et de Julien Bayou (EELV).

Sur le fond, la NUPES, opposée aux projets phares du gouvernement débattus cet automne, n’a pas prévu d’abandonner la lutte pour la taxation des superprofits. La proposition de loi, présentée le 21 septembre, a été soumise au Conseil Constitutionnel qui a un mois pour se prononcer. En attendant, les mélenchonistes misent sur leur grande marche contre la vie chère le 16 octobre pour mobiliser l’opinion publique. « La colère sociale peut monter crescendo une fois l’argent caritatif - la ristourne de Total - épuisé », veut croire Rodrigo Arenas.

Dans ce contexte, les troupes d’Emmanuel Macron, mises en minorité sur certains votes au cours de l’été, n’entendent pas se laisser faire. Le groupe, qui n’est plus composé uniquement de novices comme lors de la précédente législature est bien décidé à peser au sein du Palais Bourbon, et à rendre coups pour coups.

« Vous allez nous entendre ! Là on a été arbitre de Roland Garros à regarder passer les balles, mais c’est fini ! », insiste le député LREM Karl Olive auprès d’une poignée de journalistes, en marge de ce retour dans l’hémicycle. Pour l’un de ses collègues dans le groupe Renaissance la meilleure voie est plutôt celle du dialogue, pour « lâcher quelques trucs à l’opposition.  » « C’est peut-être un mal pour un bien après tout cette majorité relative », veut-il croire.

« L’objectif pour nous c’est de montrer qu’on est apte à gouverner. Donc on va poursuivre ce qu’on a fait au mois de juin »
Un stratège au groupe RN à l’Assemblée

Les enjeux sont quelque peu différents au Rassemblement national, où l’on tient, avant tout, à conserver l’image de « sérieux » travaillée dès le mois de juin. Quitte à laisser la palme de la virulence à la France insoumise et à certains élus de l’Union de la gauche à l’Assemblée.

Le RN veut « convaincre de son sérieux »

« L’objectif pour nous c’est de montrer qu’on est une force d’alternance, qu’on est apte à gouverner. Donc on va poursuivre ce qu’on a fait au mois de juin », détaille un stratège du groupe RN, sans bouder le bazar provoqué par les affaires Quatennens et Bayrou de l’autre côté du spectre politique. « Quand on voit comment la gauche est dans l’autodestruction et nous facilite le travail, on a tout intérêt à poursuivre dans cette voie », insiste-t-il, jugeant qu’« il n’y a plus de plafond de verre, donc maintenant il faut convaincre de notre sérieux ».

Un nouveau chapitre de la stratégie de « banalisation » redoutée par la majorité. « Ils vont continuer sur leur lancée : sages comme des images. Pendant que la NUPES donne une image déplorable. C’est très dangereux », s’inquiète-t-on du côté du groupe Renaissance au Palais Bourbon, quand un député marcheur renchérit : « Franchement, il faut se méfier du Rassemblement national. Ils font de la veille et bossent plus, ils ne faisaient pas ça avant. »

Il ne manquait, dans ce contexte, que l’intervention d’Emmanuel Macron pour finir de pimenter la rentrée parlementaire. Le chef de l’État n’a pas hésité à agiter la menace de la dissolution, jeudi dernier pour faire passer sa réforme des retraites, si les oppositions se coalisent pour faire tomber le gouvernement. De quoi relancer une hypothèse tenace en temps de majorité relative. « Chiche », lui a immédiatement répondu Marine Le Pen, imitée par le député insoumis Antoine Léaument.

On est prêt à repartir en campagne, allons-y ! La menace ne nous fera pas renoncer
Sandrine Rousseau sur France 3

En public, nombreux élus, toutes sensibilités confondues, disent se réjouir, bravaches, d’une telle hypothèse. Ce serait une « opportunité », pour conquérir le pouvoir, selon les mots de Jean-Luc Mélenchon. « Il peut appuyer sur le bouton. J’y suis prêt », commente de son côté Karl Olive qui a passé le mois de septembre en circonscription à parcourir les 23 communes de son territoire. « On est prêt à repartir en campagne, allons-y ! La menace ne nous fera pas renoncer », ajoutait, sur le même ton, Sandrine Rousseau dimanche sur France 3.

En privé, le discours est quelque peu différent. « Vu notre état, s’il dissout, on est mal », résumé un élu EELV, qui veut relativiser cette hypothèse : « Mais je pense que ce serait aussi compliqué pour Renaissance et donc que Macron ne le fera pas ». Du côté de l’extrême droite, on estime que Les Républicains pourraient également perdre des plumes dans cette histoire, ce pourquoi « jamais », ils « ne voteront la motion de censure ». « Ils ont trop à perdre. Ils passeraient de 62 à 40 députés, et je suis gentil », cingle notre source au groupe RN.

En attendant cette fameuse réforme, « avant la fin de l’hiver », l’Assemblée nationale va devoir surmonter l’épineux dossier du budget, lequel comprend le bouclier tarifaire sur l’énergie et les hausses de salaires pour les enseignants, entre autres. Le groupe LR a déjà prévenu qu’il voterait contre ce texte qu’il juge trop dépensier. Sans majorité absolue, le gouvernement n’aura donc d’autres choix que de recourir à l’article 49 alinéas 3 de la Constitution pour le faire passer sans vote. Ce sera pour l’acte 2.

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