Risque nucléaire : pourquoi des pastilles d’iode sont-elles distribuées autour des centrales ?
Une nouvelle campagne de distribution préventive de pastilles d’iode stable a été lancée au mois de septembre. Les pastilles sont à retirer dans les pharmacies d’officine de chaque commune qui se situe dans un rayon de 10 kms autour de certains sites nucléaires français. Particuliers, établissements recevant du public, entreprises et collectivités sont concernés. Pour savoir si vous êtes concerné, cliquez ici.
C’est quoi l’iode ?
L’iode est un oligo-élément essentiel à notre organisme, notamment pour le développement du cerveau et le métabolisme général. La glande thyroïdienne stocke naturellement l’iode où il participe à la synthèse des hormones thyroïdiennes. On en trouve au quotidien dans le sel enrichi, les fruits de mer, le poisson et les algues. Mais aussi dans la viande d’animaux d’élevage nourris avec des aliments enrichis en iode.
A quoi servent les pastilles d’iode ?
Les pastilles sont indiquées en cas de rejet d’iode radioactif dans l’atmosphère lors d’un accident nucléaire. L’iode stable sert à protéger les populations exposées aux iodes radioactifs.
Stable ou radioactif, l’iode se fixe naturellement sur la thyroïde, celle-ci ne fait pas la différence. Respiré ou avalé, l’iode radioactif rejeté dans l’environnement se fixe ainsi sur la thyroïde et accentue le risque de cancer thyroïdien. L’idée, avec la prise d’iode stable, est de saturer la glande thyroïdienne pour que l’iode radioactive ne puisse pas s’y fixer.
Les personnes les plus à risque
La campagne de distribution préventive s’adresse à la totalité de la population. Toutefois, certains groupes de personnes sont plus à risque de développer un cancer de la thyroïde :
Les nouveau-nés et les enfants dont la thyroïde est encore en formation
Les femmes enceintes et allaitantes (risques pour le fœtus et le bébé)
Les fœtus, nouveau-nés et enfants sont en effet plus exposés car chez l’adulte, la glande fixe 25 à 30 % de l’iode incorporé. Chez l’enfant, la dose délivrée est plus élevée. « Environ 6 500 cas de cancers de la thyroïde chez les enfants ont été documentés à Tchernobyl. Pour les adultes, la thyroïde, plus mature, a un développement naturel très lent et le risque de cancer de la thyroïde est donc beaucoup moins élevé », explique l’Inserm.
Si la distribution préventive s’adresse à toutes les populations, l’Inserm soulignait en 2022, que l’apport massif d’iode stable après 40 ans pourrait avoir des effets négatifs supérieurs aux bénéfices. « En effet, elle peut conduire à une dérégulation de l’organe et de sa production d’hormones. Par exemple, en rendant la thyroïde hyperactive (hyperthyroïdie), des troubles de la fréquence cardiaque et de la tension artérielle peuvent survenir ainsi que des excès d’angoisse ou des bouffées de chaleur », explique l’organisme de recherche scientifique.
Quand faut-il prendre la pastille d’iode ?
L’iode stable doit être ingéré uniquement lorsque le préfet en donne la consigne. Il doit être pris quelques heures avant le passage d’un nuage radioactif, au plus tard huit heures après. Pris trop longtemps avant, le médicament perd totalement son efficacité et ne protège plus la thyroïde.
« En France, en ligne avec les recommandations de l’AIEA – Agence internationale de l’énergie atomique – et de l’OMS, le seuil à partir duquel il faut protéger la thyroïde est fixé à 50 millisieverts. Lorsque les prévisions des experts dépassent ce seuil, le préfet donne l’ordre de prendre le comprimé », explique l’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (INRS). Si on prend la pastille trop tôt, la thyroïde ne sera plus saturée quand le nuage passera.
Quelle quantité d’iode prendre ?
A partir de 12 ans et pour les adultes et femmes enceintes : 2 comprimés de 65 mg sont nécessaires
Pour les enfants de 3 à 122 ans : 1 comprimé d’iode
Les bébés de 1 mois à 3 ans : un demi-comprimé d’iode
Les nouveau-nés (jusqu’à 30 jours) : un quart de comprimé d’iode
A noter : l’iode stable ne protège que contre l’iode radioactif. Il ne protège pas contre les autres éléments radioactifs qui peuvent aussi être rejetés dans l’atmosphère lors d’une catastrophe nucléaire ; uranium, césium, strontium. La mise à l’abri et l’évacuation des populations sont dans ce cas recommandés.