Serena Williams : plus qu'une championne, une icône pour les droits des femmes et des minorités
Avec son programme, Richard Williams a fait de ses filles Vénus et Serena, les plus grandes joueuses de l'histoire du tennis. À l'occasion de la sortie du film retraçant l'enfance des championnes "La méthode Williams", le mercredi 1er décembre 2021, retour sur le parcours et les engagements de la Beyoncé du sport.
Championne, maman, icône de mode, femme d’affaires, féministe engagée pour les droits des femmes et contre le racisme… Serena Williams impose son style et ses combats. Avec plus de 38 titres en Grand Chelem (22 en simple, 14 en double et 2 en double mixte) et 4 médailles d’or aux Jeux olympiques (dont une en simple et trois en double avec sa soeur Venus Williams, ndlr), elle est l’une des plus grandes joueuses de tous les temps. Un jeu puissant qui la rend redoutable de l’Open d’Australie, à Wimbledon en passant par Roland-Garros, où l’athlète impressionne autant que ses adversaires la craignent. Numéro un mondial en 2015, sportive la mieux payée au monde, élue à plusieurs reprises Championne des champions mondiaux par le journal L’Equipe, la maman d’Olympia laisse planer le doute sur la suite de sa carrière. "Si un jour je fais mes adieux, je ne le dirai à personne, alors…", déclare-t-elle en février 2021 après sa défaite en demi-finales de l'Open d’Australie. Un revers inattendu après des années à briller la raquette à la main.
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La Beyoncé du sport contre le sexisme
Redoutable sur les courts, elle l’est tout autant face au sexisme. Alors quand Bernard Giudicelli (le président de la Fédération française, FFT) critique sa tenue inspirée du film Black Panther lors de l’US Open, elle apparaît sur une photo à Paris avec le message : "Vous pouvez lui retirer son costume de super-héros mais vous ne pourrez jamais lui retirer ses super-pouvoirs". Dans la foulée, elle souligne que sa tenue est avant tout un dispositif médical destiné à lutter contre ses problèmes récurrents de circulation sanguine. Tout en se réjouissant : "Je me sens comme une princesse guerrière dedans. J’ai toujours voulu être une super-héroïne". Pas question non plus de se laisser faire lorsqu’elle est attaquée sur son physique. Surnommée la "Beyoncé du sport", celle qui est souvent critiquée pour son corps jugé robuste, confie dans les colonnes de Vogue. "Quand j'ai grandi, ce qui était célébré était différent. Venus ressemblait davantage à ce qui est vraiment acceptable : elle a des jambes incroyablement longues, elle est vraiment, vraiment mince. Je ne voyais pas à la télévision des gens qui me ressemblaient, qui étaient épais. Il n'y avait pas d'image positive du corps. C'était une époque différente". Avant de rappeler : "C'est incroyable que mon corps ait été capable de me donner la carrière que j'ai eue, et j'en suis vraiment reconnaissante. Je regrette seulement de ne pas l'avoir fait plus tôt. La boucle est bouclée quand je regarde ma fille".
Serena Williams "la meilleure joueuse de tennis au monde" et non pas "la meilleure joueuse ‘femme’ de tennis"
Et lorsqu’elle n’est pas pointée du doigt pour son allure, c’est sur sa carrière dans le tennis. Fière de ses prouesses sportives, Serena Williams défend son parcours et prône l’égalité entre les hommes et les femmes surtout quand on la compare aux grands champions. En 2017, McEnroe la tacle lors d’une interview : "Si elle jouait sur le circuit masculin, elle serait aux alentours de la 700e place mondiale". Ce à quoi, elle lui répond sur Twitter : "Cher John, je t'adore et te respecte, mais s'il te plaît, laisse-moi tranquille avec tes déclarations qui ne sont pas étayées par des faits. Je n'ai jamais joué contre un joueur classé (du circuit masculin) et je n'en ai pas le temps. Respecte-moi, respecte ma vie privée alors que j'essaye d'avoir un enfant, bonne journée Monsieur". En 2016, elle écrit une lettre ouverte inspirante sur le sujet, dévoilée dans l’édition spéciale Femmes influentes du magazine Porter Magazine. Revenant sur son rêve d’enfant "de devenir la meilleure joueuse de tennis au monde" et non pas "la meilleure joueuse ‘femme’ de tennis au monde", elle confie avoir appris "à quel point il est important de se battre pour ses rêves, et, plus important encore, de viser le sommet". Tout en déplorant : "Mais, trop souvent, les femmes ne sont pas assez encouragées dans la poursuite de leur rêve, voire en sont découragées. J’espère qu’ensemble on peut changer cela. Pour moi, cela a été une question de résilience. Tout ce que les gens pointaient comme étant un désavantage chez moi - ma race, mon sexe -, je m’en suis servie comme d'un carburant pour mon succès. Je n’ai jamais laissé quoi que ce soit ou qui que ce soit me définir, moi ou mon potentiel". La joueuse assène : "J’ai contrôlé mon avenir".
Serena Williams une "folle" bien décidée à venir à bout des clichés sur les femmes
Alors lorsque le sujet de l’égalité des salaires hommes-femmes ressort, elle ne cache pas sa frustration : "J’ai fait les mêmes sacrifices que les hommes. Je ne voudrais jamais voir ma fille être payée moins que mon fils pour le même travail effectué. Et vous non plus". Ainsi, elle invite les femmes à "faire tomber de nombreuses barrières sur leur route vers le succès". Parmi elles, "le fait que l’on nous rappelle constamment que nous ne sommes pas des hommes, comme si c’était un défaut". La femme d’affaires poursuit en s’interrogeant : "Les gens m’appellent ‘l’une des meilleures athlètes féminines’. Est-ce qu’ils disent de LeBron (James) qu’il est l’un des meilleurs athlètes masculins ? Ou de Tiger (Woods)? Ou de Federer ? Pourquoi pas ? Bien sûr que ce ne sont pas des femmes". "Nous ne devons jamais laisser passer cela. Nous devrions toujours être jugées par rapport à nos accomplissements, pas à notre sexe (…). Nous devons continuer à viser les étoiles. En faisant cela, nous habiliterons la prochaine génération de femmes à être aussi puissantes que nous lorsqu’elles poursuivront leurs rêves".
En 2019, elle prend à nouveau la parole pour défendre les droits des femmes dans le spot publicitaire Nike appelée "Dream Crazier" ("Rêve follement", en français). Un clip, dans lequel elle dénonce les allégations faites à l’égard des femmes. "Si nous nous montrons émotives, nous sommes appelées dramatiques. Si nous voulons jouer contre des hommes, nous sommes cinglées. Si nous rêvons d'opportunités égales, nous sommes en pleine illusion. Si nous nous battons pour quelque chose, nous détraquons. Quand nous sommes trop fortes, il y a quelque chose qui ne va pas chez nous. Une femme qui fait de la boxe, c'est une folle. Une femme qui fait un dunk, c'est une folle. Une femme coach d'une équipe de NBA, c'est une folle". Un monologue, qu’elle conclut par : "S'ils veulent vous qualifier de folles, laissez-les. Montrez-leur ce qu'une folle peut faire".
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Une femme noire championne d'un sport "qui n'est pas vraiment fait pour les noirs"
Sur les terrains, dans ses affaires et à la Une des magazines, elle défend les droits des personnes racisées en faisant de son parcours un exemple. En 2017, elle déclare dans les pages de Wired : "Je suis une femme noire et je suis dans un sport qui n'est pas vraiment fait pour les Noirs. Donc, pour ceux d'entre vous qui sont impliqués dans des mouvements qui prônent l'égalité et la justice comme le mouvement Black Lives Matter, je vous dis : ‘Tenez bon ! Ne laissez pas ces trolls vous arrêter !’ Nous avons vécu tellement de choses pendant des siècles, et nous parviendrons à les surmonter aussi". En avril 2017, elle annonce sur Instagram le lancement de sa société de capital-risque : Serena Ventures. L’objectif de celle-ci : soutenir les entreprises fondées et dirigées par des femmes de couleur et des groupes sous-représentés. Femme d’affaires engagée et philanthrope, depuis 2014, elle finance de nombreuses sociétés parmi lesquelles Little Spoon, qui livre de la nourriture pour bébés, The Wing, un collectif de femmes travaillant dans des espaces de coworking à New York et San Francisco. Sans oublier son soutien apporté à l’application de rencontres Bumble afin de "renforcer et accélérer la mission de la marque qui est de mettre fin à la misogynie et de donner plus de pouvoir aux femmes".
En 2018, la meilleure amie de Meghan Marle dévoile "Serena", sa propre ligne de vêtements éponyme. Bien décidée à lutter contre les standards de beauté, elle renomme les tailles "plus" en "great". Un choix qu’elle explique au magazine Marie Claire : "J'en ai marre du mot ‘plus’. Je ne veux pas être ‘plus'. Je veux être géniale. Je veux que les autres femmes se sentent aussi comme ça. Je voulais créer des vêtements qui conviendraient à une femme galbée pour lui permettre de se sentir bien". Un parcours et une carrière, que Serena Williams doit à son travail, à ses combats et à sa force, qui ont commencé avec son père l'entraîneur de tennis Richard Williams. Un homme sans expérience dans le sport qui a pourtant tout fait pour que la championne et sa soeur Venus Williams s'imposent sur les courts de tennis. Alors qu'elles n'ont que quarte ans, "il élabore un plan de 78 pages décrivant l'entraînement des futures championnes". Un programme qui fait d'elles, les deux des plus grandes joueuses de l'histoire du tennis. Une histoire que retrace Reinaldo Marcus Green, dans le film King Richard (La méthode williams, en français), sorti au cinéma le 1er décembre 2021.
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