Publicité

Le sexe après un accouchement, un tabou que ces femmes ont vécu de plein fouet

Young adult mother sitting in chair at home, holding her three month old baby son, feeling tired, sleepy or having a headache.
urbazon / Getty Images Young adult mother sitting in chair at home, holding her three month old baby son, feeling tired, sleepy or having a headache.

SEXUALITÉ - « On est passés d’une vie de couple tranquille à une famille de quatre personnes, ça a été un choc. » Quand Adja, 33 ans, a accouché de jumeaux, sa relation avec son conjoint s’est vite détériorée. La principale source de tension au sein du couple ? Leur absence de vie sexuelle. « Il réclamait tout le temps et j’ai fini par accepter, se souvient-elle. Je pensais que ça pouvait être un moyen de calmer les tensions qu’il y avait entre nous, mais pas du tout. Il me disait que je n’étais plus une femme, mais une mère. » Deux ans plus tard, le couple a fini par se séparer.

Comme Adja, elles sont nombreuses, parmi les jeunes mamans, à reprendre une activité sexuelle après l’accouchement sans vraiment en avoir envie. Selon une étude de l’Ifop publiée en décembre 2022, les couples qui viennent d’avoir un enfant reprennent en moyenne leur vie sexuelle sept semaines après l’accouchement. Mais ce premier rapport n’est pas toujours désiré par les femmes. Elles sont en effet 22 % à dire qu’elles y ont consenti pour faire plaisir à leur partenaire plutôt que par envie de leur part.

La suite après cette publicité

« Je n’avais clairement pas la tête à penser au sexe  »

Reprendre une vie sexuelle sans vraiment en avoir envie, c’est aussi ce qu’a vécu Angélique. Maman d’un petit Élior, 3 ans, elle a connu un accouchement difficile. Cette nuit de janvier 2020, le petit garçon peine à sortir, alors pour accélérer le processus, la jeune femme de 31 ans subit une épisiotomie, procédure qui consiste à sectionner partiellement le périnée pour faciliter l’expulsion. Pour Angélique, cela entraînera neuf points de suture. « Ça m’a fait mal pendant des semaines. Donc ça, plus des règles abondantes, l’arrivée d’un petit bébé et la fatigue que ça entraîne, je n’avais clairement pas la tête à penser au sexe », confie-t-elle au HuffPost.

Mais autour d’elle, ce sujet revenait régulièrement sur la table. « J’entendais beaucoup mes copines vanter leur vie sexuelle, y compris après l’accouchement. Alors, j’ai commencé à me dire que je devais m’y remettre aussi sinon on allait finir comme un vieux couple », raconte Angélique.

« Quand il y a eu un accouchement difficile, il peut être difficile de retrouver sa libido, explique Laurence Siroit, psychologue clinicienne et sexologue, dans un article de La Maison des Maternelles. Il y a la culpabilité de la maman qui se dit : Déjà ça a mal commencé avec cet accouchement’. Ensuite, la première préoccupation reste son bébé. Si elle est dans le faire plaisir pour faire plaisir à son homme [...] cela ne marchera pas. »

La suite après cette publicité

Arrêter « jusqu’à ce que l’envie revienne »

Contrairement au conjoint d’Adja, Nicolas, le mari d’Angélique, était très compréhensif, mais tentait tout de même des approches. « C’est normal, je pense. Ça faisait trois mois qu’on n’avait rien fait, du moins rien avec pénétration », raconte la vingtenaire, qui a fini par céder à la pression qu’elle ressentait malgré tout. « Les mots de mes copines résonnaient dans ma tête alors j’ai dit oui à un rapport sexuel alors que je n’en avais pas vraiment envie. »

Bien qu’elle ait consenti à reprendre des rapports sexuels, Angélique ne s’épanouissait pas sexuellement. En en discutant avec son époux, le couple s’est rendu compte qu’ils faisaient l’amour « machinalement ». Fatigue, charge de travail immense à la maison ou au boulot, nouvelle organisation familiale… Angélique et Nicolas étaient épuisés et le sexe n’était pas leur priorité. « En fait, on a tous les deux réalisé qu’on le faisait parce que, selon la société, il faut le faire. Surtout quand on est un jeune couple. »

« Ne pas faire l’amour est globalement considéré comme un problème. Surtout ne pas avoir de pénétration », confirme July Bouhallier, paléoanthropologue spécialiste de la naissance dans l’évolution humaine, dans un article de la revue Sorocité.

La suite après cette publicité

Angélique et Nicolas ont finalement décidé d’arrêter « jusqu’à ce que l’envie réelle revienne ». Selon l’enquête de l’Ifop, près de la moitié (48 %) des couples « indique faire moins l’amour qu’auparavant » après la naissance de leur enfant.

« Le bon délai, c’est celui de la femme »

« Ah bah ça, c’est clair qu’on fait moins l’amour, rit Marion, maman d’une petite fille de 2 ans et demi. On est débordés après l’accouchement, donc la sexualité n’est même plus tellement un sujet. » Les trois premiers mois, « c’était le désert ». Puis, petit à petit, l’équilibre s’est fait et les difficultés s’estompaient. Pourtant, le désir sexuel de Marion ne revenait pas.

« J’avais l’impression d’avoir même oublié ce que c’était vraiment. Alors, je me suis dit que peut-être qu’en le refaisant une fois, même en n’étant pas à 100 % dedans, ça allait m’aider. Et je voulais aussi satisfaire Alexandre qui, lui, se sentait prêt », explique-t-elle.

La suite après cette publicité

Avec du recul, Marion ne le referait pas et attendrait d’en avoir vraiment envie. D’abord pour respecter ce que lui dit son corps, mais aussi pour ne pas faire porter « une certaine culpabilité » sur les épaules de son conjoint.

Comme le rappelle le sage-femme Jean-Daniel Henry, auprès de L’Express : « Il n’y a pas de délai minimum ou maximum [à la reprise de la sexualité]. Le bon délai, c’est celui de la femme. Il n’est pas question de céder à l’injonction du partenaire. Faire l’amour tendue et contre son gré ne risque pas de rendre cette reprise agréable. »

C’est aussi la leçon d’Adja a retenue de sa séparation : « Je veux juste dire aux jeunes mamans d’arrêter de culpabiliser et de vouloir se plier en quatre pour tout le monde. Ce que vous vivez, c’est bouleversant, aussi bien émotionnellement que physiquement. Vous venez de donner la vie, il n’y a rien de plus beau. C’est normal que votre vie sexuelle passe au second plan pendant un moment. »

La suite après cette publicité

À voir également sur Le HuffPost :

Lire aussi