98% des femmes de la Génération Y a conscience des dangers du cancer de la peau. Alors pourquoi continue-t-elles de bronzer ?

Ce n’est pas surprenant d’apprendre que les gens s’adonnent à des pratiques dont ils savent qu’elles nuisent à leur santé. (Fritures, caféine ou bong de bière, n’est-ce pas ?) Cela dit, le concept du bronzage – s’étendre volontairement au soleil – semble être un choix particulièrement dépassé et risqué en 2016, vu à quel point le cancer du mélanome est mortel. Mais, selon un sondage de l’Académie Américaine de la Dermatologie, les gens continuent de rechercher cette « peau brillante », quand bien même ils ont conscience qu’il n’y a rien de tel.


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C’est une écrasante majorité de 98% de femmes âgées de 18 à 34 ans qui comprennent à quel point le cancer de la peau est meurtrier, selon ce sondage. En effet, 71 pour cent des sondées ont conscience qu’un « bain de soleil de santé » est une illusion. De plus, 66 pour cent des femmes interrogées savent qu’un bronzage de base ne les protège pas efficacement des effets néfastes des rayons ultraviolets.

« Le mélanome, la forme la plus meurtrière du cancer de la peau, est la seconde forme la plus courante chez les jeunes femmes, et nous pensons que c’est en partie dû aux habitudes de bronzage. Il est assez inquiétant que les jeunes femmes continuent de bronzer bien qu’elles aient conscience du danger », signale la dermatologue Elizabeth S. Martin, présidente du Conseil de Communication de l’Académie Américaine de Dermatologie (AAD), dans un communiqué de presse traitant des trouvailles du sondage. « L’exposition aux rayons UV, qu’ils proviennent du soleil ou des appareils de bronzage en intérieur, est le facteur de risque du cancer de la peau le plus endiguable. Les femmes doivent faire de leur savoir, des actions concrètes en se protéger du soleil et en évitant les lits de bronzage. »

Un nouveau Message d’Intérêt Public appelé « Arms » (ci-dessous), tente de communiquer les risques aux personnes qui n’arrêtent pas de bronzer. La vidéo met en scène deux amies qui ne cessent de comparer leurs bronzages au fil des ans, jusqu’à ce qu’une d’entre elles se retrouve dans un hôpital avec un diagnostic de mélanome de niveau 3. Pourquoi le message ne passe-t-il pas ?

Kasey Lynn Morris, un docteur en psychologie sociale sur le point de rejoindre l’Institut National du Cancer explique à Yahoo Beauté : « L’identité et l’estime de soi sont des motivations importantes dans l’adoption de comportements sains » — encore plus importants que la santé en elle-même. En d’autres termes : être en bonne santé est une chose, mais si avoir l’air bien bronzé (ou, de façon plus positive, manger sainement et faire de l’exercice) contribuent à vous faire sentir mieux dans votre peau, ces motivations prendront certainement le dessus.

Morris, qui a passé du temps à étudier le bronzage en rapport avec les risques du cancer de la peau, pendant qu’elle était étudiante à l’Université de Floride du Sud, explique que le bronzage pourrait être une pratique encore plus dure à vaincre que le tabagisme. « Le tabagisme est devenu une chose qui fait dire “Beurk, fumer c’est dégoutant”, et par conséquent on ne souhaite pas devenir une personne qui fume », explique-t-elle. « Mais pour les femmes en particulier, l’apparence est une source principale d’estime de soi, d’où ce dilemme entre vouloir être en bonne santé, mais également cherche à avoir cette “peau brillante”. »

Pour commencer, c’est à Coco Chanel que nous devons la perpétuation du mythe selon lequel le bronzage aurait des bénéfices sanitaires. Elle semble avoir pris le contre-pied de la tendance préindustrielle aux peaux pâles, en s’exposant trop longtemps au soleil lors d’une croisière méditerranéenne. Des photos d’elle ont rendu le teint hâle chic, et le bronzage est devenu un signe de réussite, un symbole de richesse et de loisir. Alors que cette idée a été laborieusement combattue depuis les années 1980, l’apparition des crèmes solaires avec des FPS plus élevés, a rendu la lutte encore plus rude.

Un sondage rapide et peu scientifique de cet article, qui demandait aux adeptes du bronzage pourquoi ils s’y adonnaient alors que c’est une pratique dangereuse, a permis de recueillir les réponses suivantes : « C’est une addiction de plus dont on se défait difficilement », « ça me fait sentir mieux d’être bien bronzé — et ça donne l’impression que mes dents sont plus blanches », et « Je pense juste que ça a l’air plus sain. »

Barbara Greenberg, une psychologue basée dans le Connecticut a déclaré à Yahoo Beauté, « Mon ressenti est que les personnes y voient un moyen rapide d’avoir l’air rafraîchis, ou comme s’ils venaient tout juste de vacances. Un peu comme le Botox et autres solutions rapides » explique-t-elle, « ça prend des airs d’addiction. Les hommes comme les femmes y en sont atteints dans les mêmes proportions. Ils ont également l’impression que ça les rend plus jeunes, étant donné qu’ils associent le teint hâle à la jeunesse ».

Le facteur jeunesse influence beaucoup. Marin explique à Yahoo Beauté que : « Malheureusement, je pense que plusieurs femmes (et hommes) continuent de bronzer parce qu’ils voient les résultats immédiats du bronzage sans reconnaître consciencieusement les risques du cancer de peau auxquels ils s’exposent dans le futur. Les jeunes perçoivent le cancer de peau comme une maladie de vieux » déclare-t-elle, alors que le mélanome est la seconde cause la plus courante chez les femmes âgées de 15 à 29 ans. « Malheureusement, plusieurs jeunes femmes continuent d’utiliser les lits de bronzage ; alors que l’utilisation de ces appareils avant 35 ans accroît le risque de mélanome de 59 pour cent, avec un accroissement du risque à chaque utilisation. »

Martin déclare qu’elle entend souvent les patients dire qu’ils ne se bronzent qu’à des occasions spéciales, ou avant des vacances, mais elle tient à les prévenir tout de même. « Je leur rappelle que le bronzage sous quelque forme que ce soit nuit à l’ADN dans leurs cellules, » nous dit-elle. « Je cite les statistiques. Je leur parle d’une de mes patientes qui avait un mélanome invasif à 19 ans, et à quel point ce fut une expérience effrayante pour cette patiente et sa famille… Je leur explique souvent que, bien que le bronzage les fasse paraître beaux pour ce bal ou ces vacances, ils auront l’air plus beaux que tout le monde lors de la réunion d’anciens élèves, s’ils choisissent de ne pas bronzer et de protéger leur peau ! Plusieurs fois chaque jour, je dis “Vous me remercierez quand vous aurez 40 ans. Je vous le garantis" ».

Beth Greenfield