Je suis prise d’une peur panique sur l’autoroute
La question de notre internaute :
Bonjour Madame, mon problème est bien précis et il dure depuis des années… Je suis prise d'une peur panique lorsque je suis sur l'autoroute. La peur est tellement forte que je ne peux plus respirer normalement, dès que je suis sur la voie d'insertion, j'ai des fourmis dans les mains. C'est vraiment insupportable, j'ai l'impression que je suis piégée et que je ne peux plus faire marche arrière. Il y a deux mois, j'ai eu tellement peur que je n'ai pas supporté, j'ai cru que j'allais me désintégrer. J'ai dû sortir de l'autoroute pour me calmer. Depuis, j'évite les autoroutes, ce qui n'est pas très pratique dans ma vie quotidienne… Je n'arrive pas à comprendre d'où cela peut venir… Je cherche, mais je ne vois pas ! Est-ce courant ? Y a-t-il une solution ? Mille mercis !
Ce qu'en dit Sarah :
Tremblements, hausse de la fréquence cardiaque, difficulté temporaire à respirer... La peur est une émotion tout à fait normale en présence d'un danger réel (exemple : faire une chute à vélo) ou lorsqu'on anticipe une situation objectivement déplaisante (exemple : s'apprêter à traverser, au milieu d'un chemin, une forêt obscure). La peur a même des origines évolutives très anciennes : elle permet aux animaux d'éviter des dangers pour eux-mêmes et pour leurs petits. En revanche, la peur devient handicapante quand elle n'est pas liée à un événement présent, réel. C'est vraisemblablement votre cas, Madame, et le problème dont vous avez souhaité me parler porte un nom : c'est une phobie.
Qu'est-ce qu'une phobie ?
Les phobies sont déclenchées par la présence d'un objet ou d'une situation qui ne présente pas de caractère objectivement dangereux (par exemple un ascenseur, un avion, un poney, une voiture, un supermarché rempli de monde...). Dès que le sujet se retrouve en présence de cet objet ou qu'il anticipe sa présence, il va développer des comportements contraphobiques :
- En évitant l'objet ou la situation phobique. Par exemple, ne jamais prendre l'autoroute quitte à ce que cela soit un handicap pour la vie affective, familiale ou professionnelle. Préférer monter treize étages à pied plutôt que de prendre l'ascenseur. Se priver de voyages par peur de prendre l'avion. Changer de trottoir quand il y a un chien.
- En tentant de se rassurer via l'usage d'objets (personnes ou choses) contraphobiques :
par exemple, prendre un petit gri-gri dans sa poche avant de prendre la voiture, répéter une sorte de formule magique personnelle avant de monter dans le métro...
La voiture, une projection de son propre corps ?
Dans votre cas précis, vous souffrez d'une forme d'agoraphobie liée à la peur de quitter votre environnement proche et de vous retrouver dans un lieu (l'autoroute) dont il vous serait très difficile de vous extraire.
Parfois, cette peur peut survenir après avoir assisté ou vécu un accident de voiture — mais pas seulement. Il existe une multitude d'autres raisons qui peuvent conduire une personne à paniquer au volant. Et la peur de conduire peut cacher d'autres peurs, plus anciennes, et bien plus profondes...
Les mots que vous employez, Madame, pour décrire votre peur, sont très parlants. A peine vous retrouvez-vous dans votre voiture, insérée sur l'autoroute, toute seule et anonyme, parmi tous les autres véhicules, que vous vous sentez oppressée, « piégée » et que, surtout, vous avez l'impression que vous allez vous « désintégrer ». Comme si, face à ce flot de véhicules qui déferle d'endroits dont vous n'avez pas idée pour se rendre, à grande vitesse, vers des destinations multiples, soudain, votre corps à vous ne faisait plus le poids, ne faisait plus bloc. Comme si l'habitacle de votre voiture, qui pourtant a été conçu pour être un lieu sûr et sécurisé, ne vous semblait plus suffisamment contenant pour vous rassurer. Résultat : vous angoissez. Vous paniquez. Vous avez peur de mourir. Et vous vous sentez désespérée.
Alors, en résumé, comment reprendre le contrôle de la situation ? Si votre peur persiste, trois possibilités s'offrent à vous :
Première étape : prendre des cours de perfectionnement de conduite dans une auto-école agréée. Ces cours sont accessibles à toute personne qui a déjà le permis et peuvent permettre de reprendre confiance en soi au volant, accompagné d'un moniteur qui a l'habitude de ce genre de situations. Demandez à conduire sur l'autoroute.
Si vous sentez que votre peur est décidément trop forte, vous pouvez soit :
- Vous interroger sur les causes profondes de cette peur qui vous handicape au quotidien et plus largement sur la façon dont vous avez conduit votre vie jusqu'à présent, en vue d'un réaménagement profond de votre existence, en entreprenant une thérapie analytique ou une analyse.
- Régler spécifiquement ce blocage sur les autoroutes en entreprenant une thérapie cognitive et comportementale (TCC). Vous ne vous attaquerez pas aux causes de votre symptôme mais vous y apprendrez concrètement, via une série d'exercices, à désamorcer votre peur et à avoir un comportement plus approprié sur l'autoroute.
Bon courage à vous !
Sarah Chiche
www.sarah-chiche.blogspot.com