"Cela nous aide à aborder le patient de façon plus humaine" : ces ateliers de médecine narrative qui aident à développer les qualités d'écoute des soignants
Depuis 5 minutes, une trentaine de participants contemplent la toile n°8 de Mark Rothko en prenant des notes. Face à cette peinture abstraite où flottent deux blocs de couleur rouge et jaune, ils sont invités à poser des mots sur les émotions ressenties et à donner libre cours à leur imagination. "Maison dans la savane", "tapis rouge devant une cheminée", "tunnel qui défile", "une symbolique de la naissance", les participants partagent les histoires saisissantes que leur ont inspiré la toile. Des étudiants en art ? Non, des soignants, médecins, infirmières, secrétaires médicales, qui assistent, au CHU de Bordeaux ou en visioconférence, à un atelier de médecine narrative. Cette discipline clinique et académique née aux Etats-Unis consiste à développer les qualités d’écoute du soignant à travers des textes littéraires et des œuvres artistiques.
Comment l’observation d’un tableau d’art abstrait peut-elle aider les soignants dans leur travail au quotidien ? "Le soignant est d’abord décontenancé devant le tableau car il n’y a, a priori, pas de sens", précise Isabelle Galichon, docteure en littérature et enseignante en médecine narrative. Un nouveau patient en consultation, c’est un peu comme cette toile d’art abstrait. Au début, ses propos sont décousus. C’est au médecin de trouver du sens au récit du patient, en se focalisant à la fois sur certains détails, et aussi en l’examinant dans sa globalité. Exactement le type d’observation que viennent de réaliser les soignants devant la (...)