Les chefs cultivent leurs jardins

C’est une révolution des codes de la gastronomie. Fini, le temps où les étoilés faisaient venir leurs ingrédients du monde entier. Désormais,
ils produisent en artisans les mets de leurs assiettes.

Les grandes révolutions culturelles s’accomplissent toujours dans l’ombre, discrètement, sans même que l’on s’en aperçoive. Ainsi, au cours de la dernière décennie, la plupart de nos grands chefs ont-ils totalement changé leur conception du métier de cuisinier. Pierre Gagnaire témoigne : « Quand j’ai commencé à la fin des années 1960 et au début des années 1970, on prenait les produits qu’il y avait sans se poser de questions, même si beaucoup, je m’en rends compte maintenant, étaient d’une qualité plutôt médiocre. [Ah ! le poulet nourri à la farine de poisson, le veau aux hormones qui diminuait de moitié dans la poêle !] C’est d’ailleurs pour cela que j’ai inventé une nouvelle façon de cuisiner. Être créatif m’a permis de contourner, de dépasser et de faire oublier cette médiocrité de la matière première… Aujourd’hui, c’est le contraire : l’origine, la pureté et la qualité du produit sont devenues une obsession ! De ce point de vue, on est beaucoup plus pointus qu’on ne l’était. »

Dans tous les livres de recettes, il y a des produits basiques, comme les œufs et le lait. Pourtant, rien n’est plus difficile que de trouver de très bons œufs et du très bon lait, leur goût standard étant devenu infect la plupart du temps ! Après avoir repris La Poule au Pot en 2018, aux Halles, à Paris, Jean-François Piège nous confiait avoir passé des mois avant de trouver une ferme bretonne capable de lui en fournir d’excellente qualité, comme si les produits les plus simples étaient aussi les plus rares… Le luxe, aujourd’hui, c’est cela : pouvoir manger une tomate et des fraises du jardin cultivées en pleine terre et gorgées de soleil.

Le chemin du jardin potager, de l'étable et du poulailler

Le chef cuisinier du XXIe siècle ne se(...)


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