Ils vivent une "demi-relation" et cela les rend heureux
Ils n'ont pas le temps, l'envie ou l'espace intérieur pour entrer de plain-pied dans une véritable relation amoureuse. Alors ils partagent des demi-relations, sans pour autant exclure les sentiments. Ils nous expliquent en quoi cela consiste.
Quand elle rencontre Steven en 2016, Alya est jeune, plutôt solitaire et pas forcément prête à s'engager. Par "chance", ce dernier, bien qu'âgé de six ans de plus qu'elle, ne souhaite pas non plus renoncer aux plaisirs de sa vie de célibataire. Mais les deux Parisiens éprouvent une attirance et une tendresse irrépressibles l'un pour l'autre. Alors ils entament naturellement une relation... en pointillés. "Former un couple était impossible car l'un comme l'autre ne voulions pas nous sentir obligés de nous voir régulièrement et exclusivement. Mais ne pas se comporter comme tel quand nous nous voyions l'était tout autant, car nos sentiments nous emportaient".
Plus qu'un plan cul mais moins qu'un vrai couple
Lorsque ses amis qualifiaient sa relation de "plan cul", Alya s'insurgeait. A ses yeux comme à ceux de Steven, il s'agissait de bien plus que cela. "Certes, il nous arrivait de passer trois semaines sans nous voir. Mais nous avions une forte connexion émotionnelle. D'ailleurs, même si nous faisions beaucoup l'amour, nous parlions énormément et sortions au cinéma, ou au resto avec nos amis".
Pour la jeune femme, le terme “sex friend” ne décrit pas non plus leurs rapports. “Nous n’étions pas amis avant de démarrer notre ‘demi-relation’”, explique-t-elle. “L’attirance et les sentiments sont venus tout de suite, tout comme l’envie mutuelle de mettre de l’air entre nous”. Un fonctionnement qui leur permettra de maintenir leur demi-relation pendant trois ans...
Dans nos sociétés modernes où l'accent est mis sur l'épanouissement personnel, difficile parfois de trouver l'espace pour s'engager dans une relation "complète". Quand ce ne sont pas nos peurs qui dirigent malgré nous notre attention vers toute autre chose. Alors la demi-relation, ou relation "in-between", peut nous apparaître comme l'alternative idéale. A mi-chemin entre le plan cul et le couple, elle permet à des personnes de partager des moments de toutes sortes à deux, sans forcément faire de l'autre une priorité. En d'autres termes, passer du bon temps au lit mais aussi ailleurs, sans obligation de fréquence, fidélité ni investissement supplémentaire.
"Notre relation ne devait pas grignoter son temps de travail"
Sarah, travailleuse freelance, en est elle aussi une adepte, un peu malgré elle : "Comme j'ai été célibataire longtemps, j'ai rempli ma vie autrement qu'avec des relations amoureuses. Je fais un métier que j'adore et qui me prend un temps fou, j'ai pas mal d'amis et je fais des tas d'activités sportives et artistiques. C'est mon équilibre ! Alors quand je rencontre un homme qui me plaît, je n'ai pas très envie de tout bousculer".
Aux hommes qui croisent sa route, Sarah propose donc spontanément une demi-relation, sans forcément la nommer comme telle. Si certains prennent la poudre d'escampette, d'autres partagent miraculeusement le même fonctionnement qu'elle. "Arnaud, le dernier en date, était un entrepreneur qui ne vivait que pour son projet de boîte. Parfois, il me donnait rendez-vous entre 12h et 13h45 pour déjeuner par exemple. Ou pour une nuit jusqu'au lendemain matin 9h, pas davantage. C'était minuté ! Non pas parce qu'il me considérait comme un "plan cul", mais parce qu'il ne fallait pas que le fait de se voir grignote son temps de travail. Et moi, cela m'arrangeait !". Malgré tout, de vrais sentiments les lient.
"Grâce aux demi-relations, je me sens paradoxalement plus complète"
L'intérêt d'une telle relation ? Pouvoir combler ses besoins intimes, affectifs ou relationnels avec une personne qui n'aurait comme elle aucune autre attente. "Arnaud et moi ne faisions pas de projet d'avenir commun. Ce qui fait que nous n'avions pas besoin de garantie de présence ou d'exclusivité". Preuve de leur bonne foi, ni Sarah ni Arnaud n'a d'ailleurs jamais demandé à l'autre s'il fréquentait d'autres personnes.
"Quand on se voit si peu, on n'est pas en droit de régenter la vie de l'autre ou d'imposer quoique ce soit", soutient la jeune femme. Aujourd'hui séparée de l'entrepreneur, elle est sur le point de proposer une demi-relation à un homme qu'elle vient de rencontrer : "Plus on a de demi-relations, plus on organise le reste de sa vie en fonction, et plus il est difficile de tendre vers une relation dite 'normale'". Mais cela n'a rien d'un problème pour celle qui affirme que ce fonctionnement lui permet de consolider les autres aspects de son existence, et donc se sentir solide. "Je ne mise par sur une personne pour me sentir épanouie. En ayant des demi-relations, je me sens paradoxalement plus complète".