Don Quichotte, vu par une psychanalyste

Le cabinet d'un psy n'est pas un moulin. Sauf pour le héros de Miguel de Cervantès, qui est venu nous consulter alors qu'il danse, chaque soir, sur la scène de l'Opéra Bastille, dans le ballet de Noureev*.

Un hidalgo de la Mancha – ou Manche – (région au sud de Madrid), surnommé « le chevalier à la triste figure », prend les moulins à vent qu'il croise sur sa route pour des géants menaçants, et les troupeaux de moutons pour des armées ennemies !

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De là à penser qu'il est complètement dingo… Surtout que Cervantès lui-même, dans le prologue de son roman écrit en 1605, n'hésite pas à l'appeler « mon fils un peu fou ». Mon fils ? De quoi faire se dresser les antennes à névroses de tout psy digne de ce nom.

Mancha ou manchot ?

Eh oui, on peut considérer Don Quichotte comme le rejeton d'un ancien combattant polytraumatisé : Cervantès lui-même, parti peu après ses 20 ans en Italie, où il se fit enrôler pour combattre l'Empire ottoman. Devenu soldat d'élite, il perd l'usage de sa main gauche et devient « le Manchot de Lépante » (la ville de Grèce où s'est déroulée la bataille). Alors qu'il revient en Espagne, sa galère est prise en otage par des pirates ottomans. Il est esclave pendant cinq ans au bagne d'Alger avant de revenir dans son pays.

Comme si cela ne suffisait pas, à peine rentré, il se retrouve accusé de fraude et jeté en prison… C'est alors qu'il écrit son livre. Don Quichotte, dans le délire permanent qu'il incarne, apparaît comme la mémoire traumatique de Cervantès : il décrit la folie de la guerre, montre ce que tout le monde ne...

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