« On n’est pas bien là, paisible, à la fraîche ? Décontracté de l’esprit » : le dernier voyage de Bertrand Blier
Venus rendre un dernier hommage à Bertrand Blier à l’église Saint-Roch (Paris 1er), nous savions, espérions même, qu’un peu d’irrévérence se glisserait dans une célébration que le cinéaste aurait détestée obséquieuse ou, pire encore, nimbée de pathos. Nonobstant, quand le prêtre commença son homélie par les fameux derniers mots des « Valseuses » : « On n’est pas bien là, paisibles, à la fraîche ? », l’assemblée fut saisie, à la fois effrayée et excitée à l’idée que le notable religieux enchaîne : « Décontracté du gland, et on bandera quand on aura envie de bander. ». Et alors ? Et alors il s’en sortit par une jolie pirouette en forme de pastiche : « On n’est pas bien là, paisible, à la fraîche ? Décontracté de l’esprit, et on croira quand on aura envie de croire. » Sourires et, pour la plupart, soulagement. À l’aune de cette messe qui n’avait rien de funèbre et où la tristesse avait poliment laissé sa place à la nostalgie et, forcément, à la mélancolie.
Respectant la causticité et l’insolente effronterie du cinéaste, ses fidèles se gardaient bien de pleurer ou d’afficher des mines de circonstance. Bertrand Blier allait mal depuis bien longtemps et sa disparition, prévisible, se déroula paisiblement auprès de ses proches. Pour autant, à la vue d’une église remplie à moitié seulement, une pointe d’amertume gâcha la douceur des adieux. On n’était pas plus de deux cents à honorer le défunt. On ne demandait pas aux 4951 membres de l’académie des césars de faire le déplacement,...