Ces femmes célibataires ont choisi l’abstinence et racontent pourquoi elles ont renoncé au sexe

Ces femmes ont quitté les applis de rencontre et choisi l’abstinence.
NURPHOTO / CSA IMAGES // GETTY IMAGES Ces femmes ont quitté les applis de rencontre et choisi l’abstinence.

SEXE - « Vous savez très bien que l’abstinence n’est pas la solution. » L’application de rencontres Bumble ne pensait sûrement pas créer un tel tollé avec ce nouveau slogan, affiché fièrement sur des panneaux publicitaires à Los Angeles. Qualifiée de sexiste et condescendante sur les réseaux, la nouvelle campagne a pourtant très vite été retirée par la marque.

Je n’ai jamais eu envie de faire l’amour, je ne savais pas que j’étais asexuelle

Il faut dire que l’abstinence est un choix fait par un nombre croissant de femmes, lassées – justement – des applis de rencontre. Sur TikTok, l’actrice Julia Fox, connue pour son rôle dans Uncut Gems, a ainsi raconté : « Deux ans et demi d’abstinence et, honnêtement, je n’ai jamais été aussi bien. »

Les experts observent depuis des années une « récession du sexe », qui est aussi reflétée dans les études sur le sujet. Une enquête de l’Ifop avec Lelo, parue en février de cette année, montrait par exemple que les indicateurs concernant l’activité sexuelle des Français n’ont jamais été aussi bas. Les plus concernés par cette baisse ? Les 18-24 ans. Plus d’un quart des jeunes initiés sexuellement admettent ne pas avoir eu de rapport sexuel en un an, soit cinq fois plus qu’en 2006 (ils étaient alors 5 %).

[Note : Cet article est une traduction réalisée par la rédaction du HuffPost France, à partir d’un article paru en mai 2024 sur le Huffington Post américain. L’article original à lire ici. Il a été traduit, raccourci et édité dans un souci de compréhension pour un lectorat francophone.]

Des applis « insipides et superficielles »

Et n’en déplaise à Bumble et sa campagne, les applis de rencontre jouent visiblement un rôle dans cette récession. Chez les femmes en tout cas : près de 80 % de celles qui ont utilisé des applications comme Bumble sur une longue période affirment avoir été victimes d’épuisement ou de fatigue, selon une enquête de Forbes Health datant de mars 2024.

Ashley Kelsch, coach en rencontres à Austin, au Texas, considère que Bumble a « raté sa cible » avec sa pub. Pour elle, si arrêter le dating et mettre sa vie sexuelle en pause est « une question très personnelle » pour les femmes qui le font, « la raison la plus commune est que les applications de rencontre sont superficielles et font perdre du temps ».

Après la fin de sa dernière relation en 2019, Talia, trentenaire influenceuse à Washington, a quitté les applis et est restée abstinente pendant un peu moins de trois ans. « Les applications de rencontres sont devenues tellement superficielles et insipides, explique-t-elle. C’est une entreprise mercantile. Et c’est un business basé sur la répétition. La drague, c’est cool sur le moment, mais ce n’est pas satisfaisant à long terme. »

Il y a de quoi être fatiguée, entre les photos explicites non sollicitées et la désillusion liée à la « gamification » de nos vies amoureuses. Les applications de rencontres nous offrent un « paradoxe du choix », nous convainquant qu’un meilleur parti est toujours au coin de la rue, n’attendant que d’être matché.

Une question de sécurité

Destiny, hôtesse de l’air californienne, n’a pas eu de relations sexuelles depuis plusieurs années. Pour elle, les applications de rencontres ont enlevé la magie de la connexion humaine. « Elles donnent aux gens l’impression d’être jetables, et les hommes y agissent de manière encore plus dégoûtante que dans la vie réelle, estime-t-elle. Pourquoi moi, ou n’importe quelle femme, voudrions-nous faire autant d’efforts pour qu’on nous manque constamment de respect ? »

Pour Destiny, quitter les applis a aussi été une question de sécurité. Une question est récemment devenue virale sur TikTok : si vous étiez seule dans une forêt préféreriez-vous rencontrer un homme inconnu ou un ours ? Pour la Californienne, comme pour de nombreuses femmes sur le réseau social, la réponse est claire : elles choisissent l’ours.

« Je me suis retrouvée dans d’innombrables situations dangereuses avec des hommes rencontrés sur des applications et je me suis sentie extrêmement mal à l’aise », se souvient-elle. Lors d’un deuxième rendez-vous avec un homme rencontré sur Bumble, celui-ci s’était mis à frapper son volant de colère parce que Destiny lui avait demandé, en plaisantant, s’ils pouvaient parler d’autre chose que de son salaire.

Un rapport aux hommes différents

Rebecca Wierman, elle, a choisi de s’abstenir de relations sexuelles pendant trois ans en réaction à la violence sexuelle qu’elle a subie et à la culture du sexe sans lendemain. « C’était ma façon de guérir, en tandem avec la thérapie, de me reconnecter à mon corps et de reprendre mon pouvoir », raconte-t-elle.

Chez beaucoup, l’abstinence reflète aussi un changement de rapport vis-à-vis des hommes et une réappropriation de son corps. Pour l’humoriste Hope Woodard, qui a inventé le terme « boysober » (« sobre des hommes »), le fait de ne pas sortir avec des hommes est un antidote à la croyance selon laquelle les femmes doivent valider les émotions, les pensées et les sentiments des hommes par le sexe.

« Je suis un peu en colère contre moi-même et contre toutes les relations sexuelles que j’ai eues et que j’ai l’impression de ne pas avoir choisies, a-t-elle déclaré au New York TimesPour la première fois, j’ai l’impression d’être propriétaire de mon corps. »

« J’ai appris à aimer ma solitude »

Sophie, 31 ans, abstinente depuis un an et demi, rejoint ce constat. « Il y a tellement d’hommes qui traitent les femmes comme des objets sexuels, et je suis vraiment fatiguée de ceux qui essaient de coucher avec moi simplement pour relever un défi », argue-t-elle.

Alors, plutôt que de gaspiller son temps dans des dates décevants, Sophie, qui considère que « les applis de rencontre ont ruiné les relations », consacre son temps libre à des projets personnels. « Cette année et demie n’a fait que renforcer ma volonté d’être célibataire », confie celle qui affirme apprécier sa tranquillité d’esprit maintenant qu’elle ne pense plus aux hommes dans sa vie.

Talia, qui a quitté les applis qu’elles trouvaient trop mercantiles et insipides, ne regrette pas non plus d’avoir renoncé à des relations sexuelles pendant plusieurs années au début de la trentaine. « J’ai une plus grande confiance en moi. J’ai accompli tellement de choses sans les distractions, dit-elle. Je sais exactement ce que je veux et ce que je ne veux pas dans ma relation. J’ai appris à aimer ma solitude. Les dates sont moins frustrants après tout cela. »

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