EN IMAGES - Kirk Douglas : retour sur la vie et la carrière de la légende en 16 anecdotes
Spartacus, Les Ensorcelés, Les Sentiers de la gloire, Seuls sont les indomptés… Kirk Douglas a marqué au fer rouge le cinéma américain en tournant dans plus de 80 longs-métrages, parmi lesquels de nombreux chefs-d’œuvre. Le 5 février 2020, Michael Douglas annonce le décès de son père à l’âge de 103 ans. Un an plus tard, retour sur les histoires d’amour, les écarts sentimentaux, les expériences douloureuses et les engagements politiques du monstre sacré.
Faire confiance à sa vocation
Le 9 décembre 1916, Kirk Douglas, de son vrai nom Issur Danielovitch Demsky, voit le jour à Amsterdam, dans l’État de New York. Ses parents ont quitté la Biélorussie pour fuir l’antisémitisme et la pauvreté. Malgré la désapprobation de sa famille, il décide de devenir acteur. Après avoir combattu dans le Pacifique, le comédien rentre aux États-Unis en 1944 et pense se consacrer au théâtre.
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Considérant ne pas être à la hauteur pour le cinéma, il se laisse néanmoins convaincre par son amie Lauren Bacall, qui lui présente le producteur Hal Wallis. Ce dernier lui confie son premier rôle dans le film noir L’Emprise du crime. Le long-métrage de Lewis Milestone marque le début d’une carrière monstrueuse.
"Notre première épouse"
Kirk Douglas rencontre Diana Dill durant leurs études à l’American Academy of Dramatic Arts, à New York. Les deux célébrités se marient en 1943. Leur premier enfant, Michael, voit le jour un an plus tard, suivi d’un deuxième garçon prénommé Joel, en 1947. Le couple se sépare en 1951. Diana Dill devient par la suite très amie avec Anne Buydens, la seconde compagne de la star. Cette dernière la surnomme avec affection "notre première épouse". Après leur divorce, l’actrice donne la réplique à deux reprises à son ancien compagnon, dans le western La Rivière de nos amours et la comédie dramatique Une si belle famille.
Le coup de foudre
En 1953, Kirk Douglas se rend à Paris pour le tournage d’Un acte d’amour. Il rencontre Anne Buydens, attachée de presse qui travaille sur le film. Née en Allemagne, elle a fui le nazisme avec sa famille, obtenu la nationalité belge avant de s’installer dans la capitale française. Sous le charme, la star hollywoodienne invite la jeune femme à dîner, mais celle-ci refuse.
"Je n'ai jamais été insulté aussi poliment", confie l’acteur à Paris Match en 1981. "Dès que je l’ai vue, Anne m’a fasciné, se souvient-il, toujours auprès de l’hebdomadaire, en 1985. Je voulais à tout prix la séduire. J’en faisais de tonnes pour capter son attention. Résultat : j’ai abandonné. C’est alors qu’elle a commencé à s’intéresser à moi. Elle m’a dit : 'Enfin vous êtes vrai !'"
La famille s’agrandit
Kirk Douglas propose à Anne Buydens de le suivre à Los Angeles et elle accepte. Le 29 mai 1954, ils se disent "oui" à Las Vegas, pour ne plus jamais se quitter. En 1955, naît leur fils Peter. Trois ans plus tard, Eric vient agrandir la famille. Le couple reste soudé jusqu’au décès du monstre sacré. Lorsque Paris Match célèbre leurs 30 ans de mariage, la mère de famille assure que sa relation avec l’acteur a "évolué de telle sorte qu’[ils n’étaient] pas seulement mari et femme, amant et maîtresse, mais aussi des partenaires dans la vie".
Un terrible accident évité
En 1957, Anne Buydens évite un sort funeste à son mari, alors âgé de 41 ans. Un ami propose à Kirk Douglas un long trajet dans son avion, mais son épouse lui fait part d’un mauvais pressentiment. "Mike Todd, le mari d’Elizabeth Taylor, m’avait proposé de me ramener de Palm Springs à New York dans son avion privé. Ma femme s’y était fortement opposée. L’avion s’est écrasé, Mike a été tué, toutes les autres personnes à bord aussi. Pourquoi ne suis-je pas monté dans cet avion ? Pourquoi certaines personnes vivent et d’autres meurent ?", s’interroge-t-il en avril 2004 dans les colonnes de Paris Match.
Kirk Douglas contre le maccarthysme
En 1960, Kirk Douglas porte le péplum Spartacus, réalisé par Stanley Kubrick, qui l’a déjà dirigé dans Les Sentiers de la gloire. L’acteur principal et producteur confient l’écriture du film à Dalton Trumbo, scénariste qui figure sur la "liste noire" du maccarthysme entre 1950 et 1954. Un geste politique engagé, dont la star se souvient en 2012 lors de la projection d’une version remasterisée du long-métrage. "À l'époque du maccarthysme, je vivais dans un monde... La plupart d'entre vous n'étiez même pas nés, débute-t-il. Vous ne pouvez pas imaginer combien ces années étaient dures, quand il y avait la 'liste noire'. Personne ne voulait employer les gens qui étaient sur cette liste." Honni de l’industrie cinématographique, Dalton Trumbo est contraint de vivre caché et de signer le script sous un pseudonyme. Réhabilité grâce au soutien du comédien, il le retrouve ensuite sur El Perdido et Seuls sont les indomptés.
Des infidélités ? "Je plaide coupable"
Dans son autobiographie intitulée Le Fils du chiffonier, parue en 1988, Kirk Douglas assure avoir eu des liaisons avec les actrices Rita Hayworth, Patricia Neal ou encore Christina Crawford. "Quand j’ai donné le manuscrit [à Anne], je lui ai dit : 'Je te dédie ce livre mais je veux d’abord savoir si tu l’aimes […]'. Il y a beaucoup de choses qu’elle aurait pu critiquer mais elle ne l’a pas fait", confie-t-il à Paris Match, un an après la publication de l’ouvrage. En 1993, il affirme une nouvelle fois à l’hebdomadaire : "Vous voulez savoir si j’ai beaucoup trompé ma femme ? Eh bien oui ! Je plaide coupable. Je ne peux pas croire qu’un homme marié trente-neuf ans comme moi n’a pas eu des tentations. Ou alors, c’est qu’il est impuissant".
"La femme idéale, c’est elle"
Malgré les infidélités de l’acteur et les drames, à commencer par la mort de leur fils Eric en 2004, le couple formé par Anne Buydens et Kirk Douglas traverse les décennies. "Anne est la femme la plus intelligente que j’aie connue. Sans elle, je ne serais pas là où je suis aujourd’hui. Elle est la seule qui m’a vraiment aimé pour moi, pas pour ce que je représentais. La femme idéale, c’est elle", assure le comédien à Paris Match à propos de leur relation. Les deux époux travaillent ensemble, puisqu’Anne Buydens est la vice-présidente de Bryna, la société de production de la star. "Je m'occupe des hommes d'affaires, des contrats, lui des scénarios, du côté artistique", explique-t-elle au magazine. En 1993, son mari déclare à son sujet : "Anne n’a pas la reconnaissance qu’elle mérite. Sans elle, je ne serais pas là où je suis aujourd’hui. Elle est avec moi d’une patience infinie. […] C’est une femme et une amie exceptionnelle, je l’aime plus que tout au monde".
Une relation conflictuelle
La rupture entre Diana Dill et Kirk Douglas en 1951 provoque une scission entre ce dernier et son fils. "Je lui en voulais d'avoir abandonné maman", révèlera Michael Douglas. Interrogé par Le Monde, l’acteur raconte un souvenir du tournage du film noir Les Ensorcelés de Vincente Minnelli, dans lequel son père donne la réplique à Lana Turner. Lors d’un baiser langoureux entre les deux partenaires, le jeune homme les observe, avant d’être renvoyé d’un geste par son partenaire : "Un mouvement sévère, sans appel. Je devais f*utre le camp, disparaître de son champ de vision".
"Dieu merci, il est tellement mauvais"
En voyant son fils Michael jouer dans une pièce de Shakespeare à l’adolescence, Kirk Douglas lance : "Dieu merci, il est tellement mauvais qu'il ne deviendra jamais comédien !". Adulte, la future star de Basic Instinct et de The Game subit à nouveau une remarque assassine de son père, qui assure qu’il vivra toujours dans son ombre : "Pas de risques que tu viennes sur mes plates-bandes. Tu es mauvais comme un cochon ! Ce métier-là n'est pas pour toi, bonhomme". Pour tracer sa propre voie, le jeune homme suivra un conseil donné par le monstre sacré, comme il l’explique au Monde en 2013 : "Un gamin doit savoir donner un grand coup de pied dans les c*uilles de son père".
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"Ça lui a brisé le cœur"
En 1975, Kirk Douglas propose à son fils Michael de coproduire l’adaptation de la pièce Vol au-dessus d’un nid de coucou de Dale Wasserman. La star de Spartacus se réserve le rôle de McMurphy, le patient d’un hôpital psychiatrique qui se rebelle contre une infirmière cruelle. Mais son fils aîné en décide autrement en l’offrant à Jack Nicholson. Ce dernier décroche l’Oscar du Meilleur acteur, et le long-métrage de Milos Forman celui de Meilleur film. Kirk Douglas, qui n’a jamais réussi à décrocher la statuette dorée, garde cette décision en travers de la gorge. Ce dernier confie au Monde : "Il dit que ça lui a brisé le cœur. Peut-être. Mais j'ai pris une décision professionnelle, pour l'intérêt du film. J'ai payé mes dettes".
La réconciliation
En 1992, malgré de nombreux succès et l’Oscar du Meilleur acteur pour Wall Street, Michael Douglas combat ses démons et entame une cure de désintoxication. La vedette explique aux médecins qu’il mène une "lutte acharnée pour réussir, pour égaler enfin Kirk, [son] père". Ce dernier est alors convié à une séance de thérapie familiale et s’y rend avec les meilleures intentions du monde. Mais les choses ne se passent pas comme prévu. "Je me disais qu'en le voyant, j'allais lui dire : 'Viens fiston, on va discuter tranquillement'. Mais je n'ai fait que lui aboyer à la tête !", confie-t-il. Heureusement, un dialogue plus sain naît entre eux par la suite. Le père et le fils parviennent enfin à se réconcilier. En 2003, ils se donnent pour la première fois la réplique dans Une si belle famille, qui réunit également Diana et Cameron Douglas, la mère et le fils aîné de Michael. Une comédie dramatique où il est question de problèmes de communication…
"Je prenais soudain conscience de la fragilité de l’existence"
Le 13 février 1991, Kirk Douglas monte à bord d’un hélicoptère à Santa Paula, en Californie. Son ami Noël Blanc lui propose alors de le ramener chez lui à Los Angeles. Mais lors du décollage, l’engin percute un avion, chute d’une dizaine de mètres et s’écrase sur le tarmac. L’acteur est grièvement blessé. L’accident coûte la vie aux deux passagers de l’avion, un pilote de 46 ans et son élève de 18 ans. Pendant des années, la star est rongée par un sentiment de culpabilité, comme il le confie à Paris Match en 2004 : "Depuis l’accident, je me sens coupable d’être en vie. Moi, dont toute la vie était basée sur l’illusion, pour la première fois, j’étais obligé de faire face à moi-même. Je prenais soudain conscience de la fragilité de l’existence. Depuis, quoi qu’il m’arrive, je me dis que ça pourrait être pire ! Quand je vais mal, je pense à ce gamin de 18 ans qui avait l’avenir devant lui, comme si je devais me faire pardonner. Au lieu de me morfondre sur mon sort et de ruminer les mêmes choses, j’essaie de me tourner vers les autres pour les aider".
Réapprendre à parler
Kirk Douglas est âgé de 80 ans en 1996 lorsqu’il est victime d’un AVC, qui le prive de la parole. Pendant un temps, il est hanté par des pensées noires et songe au suicide. "Quand j’ai eu mon attaque, j’ai cru que je ne pourrais plus jamais parler et je me suis dit : ‘Autant en finir tout de suite, un acteur qui ne peut pas parler ne sert plus à rien’, déclare-t-il auprès de Paris Match en 2004. J’avais un pistolet dans la main, je l’ai mis dans ma bouche, au moment de tirer, le canon a heurté une dent. J’ai poussé un hurlement. Sur le point de me tuer, c’est la douleur d’une dent qui m’a fait arrêter. La vie est parfois pleine d’humour." Le comédien suit une thérapie du langage, qu’il raconte dans l’ouvrage My Stroke of Luck. S’il garde des difficultés à parler jusqu’à la fin de sa vie, il réapprend néanmoins à s’exprimer. L’année de son accident, la star est récompensée par un Oscar d’honneur. Malgré une partie du visage paralysée, elle monte sur scène et prononce quelques mots pour faire part de sa fierté.
Dans l’ombre d’une légende
Le 6 juillet 2004, le corps d’Eric Douglas est retrouvé sans vie dans son appartement new-yorkais. Selon le rapport d’autopsie, le fils cadet de Kirk Douglas a succombé à une overdose de drogue et d’alcool. L’acteur, notamment apparu dans L’Enfant sacré du Tibet et Delta Force 3, a toujours vécu dans l’ombre de son père et de son frère aîné Michael. "La pression d’être le plus jeune fils d’une famille célèbre m’a parfois touché, avait-il confié. J’avais l’habitude de penser que je devais me comparer à eux." Grandir dans l’ombre d’une légende a donc provoqué un mal-être chez plusieurs membres de la fratrie de Michael Douglas.
Un hommage poignant
Kirk Douglas s’éteint le 5 février 2020 à l’âge de 103 ans. "Pour le monde, il était une légende, un acteur de l'âge d'or du cinéma, mais pour moi et mes frères, Joel et Peter, il était simplement papa, déclare son fils Michael avec émotion. Kirk a eu une belle vie et il laisse derrière lui des films pour les générations à venir, et le souvenir d'un philanthrope reconnu qui a œuvré pour le bien public et la paix dans le monde."