Les enfants comme Millie Bobby Brown devraient-ils porter de la haute couture ?
Millie Bobby Brown est la star qui fait la couverture du magazine So It Goes, et la journaliste du Telegraph, Victoria Moss, n’est pas enthousiaste à cette idée. L’actrice de Stranger Things, âgée de 12 ans, est en train devenir le chouchou des médias, et cela pour une bonne raison – non seulement elle est extrêmement talentueuse dans la série de Netflix, mais elle est également adorable et charmante. Mais le problème de Victoria Moss n’a rien à voir avec Millie, cela concerne plutôt les magazines et les marques qui ont un public adulte et qui exposent les enfants comme des gravures de mode. Victoria Moss conteste particulièrement le fait qu’une jeune fille prenne la pose dans des vêtements qui valent des milliers de dollars.
Millie Bobby Brown en couverture du magazine « So It Goes ». (Photo : “So It Goes”)
« À aucun moment, la question de savoir si une enfant de douze ans devrait poser pour une robe Chloé de 4 500€ n’est soulevée. Pas si cela permet que vous ayez vraiment envie de l’acheter. Voilà ce qu’elle porte en couverture de So It Goes ». La robe en question est garnie de volants, et elle est associée à des boots, à un t-shirt gris et à un blouson aviateur. « La mode a toujours été un contraire, l’opinion divisant la foule, mais où est la limite ? Peut-être là où commence la fiction. Ai-je envie que Millie Bobby Brown interprète Eleven dans la saison deux ? Oh oui. Ai-je envie de voir une fillette de douze ans faire un shooting de mode ou lire son interview ? Hum. Pas vraiment. Oui, elle est mignonne. Mais la médiatisation du « look » d’un enfant mineur est sinistre au possible ».
Comme le souligne Victoria Moss, dans l’industrie de la mode, c’est une véritable tradition de présenter les jeunes enfants comme des icônes de mode. Dakota et Elle Fanning sont deux anciennes enfants stars qui nous viennent rapidement à l’esprit. À seulement 13 ans, Dakota a débuté dans une publicité pour Marc Jacobs. À l’âge de 17 ans, Marc Jacobs la choisie pour apparaitre dans la campagne de pub du parfum Oh Lola!, publicité qui a finalement été interdite au Royaume-Uni car jugée trop provocante. « Nous avons remarqué que le mannequin tenait la bouteille de parfum sur ses genoux, entre ses jambes, et la position nous a paru sexuellement provocante. Nous avons compris qu’elle était âgée de 17 ans, mais elle paraissait avoir moins de 16 ans », a expliqué l’ASA au Telegraph au moment des faits. « Nous considérons que la longueur de sa robe, ses jambes et la position de la bouteille de parfum attirent l’attention sur sa sexualité. À cause de cela et de son apparence, nous considérons que la publicité pourrait être vue comme sexualisant une enfant ».
La star de Mad Men, Kiernan Shipka, n’a que 16 ans, mais elle porte déjà régulièrement du Dior, et elle a fait la couverture du numéro d’Avril 2016 du magazine W aux côtés de Willow Smith (15 ans) et de Zendaya (20 ans). Willow Smith est l’ambassadrice de la marque Chanel, tout comme Lily-Rose Depp qui est âgée de 17 ans. Hailee Steinfeld a posé pour la campagne Miu Miu en 2011, qui a été interdite après que l’ASA ait jugé que la publicité « était irresponsable et violait le code en montrant une enfant dans une situation dangereuse ou risquée ».
Nous sommes tous d’accord pour dire qu’une publicité mettant en vedette un enfant dans une situation sexuellement provocante n’est pas acceptable, mais le fait que des non-adultes posent pour vendre des vêtements coûteux destinés aux femmes et aux hommes adultes ne serait-il pas un problème pour les enfants impressionnables ?
D’après l’experte en parentalité Michele Borba Ed.D., ça l’est. « Le souci est que si elle est une idole pour les préadolescents, alors cela devient problématique. En tant que société, nous valorisons les marques et l’apparence extérieure, au lieu de mettre en avant ce que l’on est à l’intérieur, ce qui compte réellement », a-t-elle expliqué à Yahoo Style durant une interview téléphonique. « C’est un âge très difficile pour les préadolescents car c’est la période à laquelle ils créent leur identité, et bien souvent, ils s’inspirent des personnes qu’ils admirent ».
Les tabloïds et les sites de mode (dont celui-ci) exposent également les garde-robes luxueuses des enfants de stars. La fille de Tom Cruise et Katie Holmes a fait plusieurs fois la une des journaux grâce à ses vêtements hors de prix. Harper, la fille de Victoria Beckham, portait des collants Chloé avant même de pouvoir en apprécier la valeur. Blue Ivy Carter portait des vêtements DIOR en 2015, lors de la remise des Grammys à Rihanna. North West possède une garde-robe de créateurs qui ferait pâlir d’envie n’importe quelle férue de mode.
Michele Borba explique que l’obsession concernant les garde-robes des enfants de stars augmente le problème. « Voici ce que nous devons réaliser. Cela impacte [les enfants], leur estime de soi et leur identité, mais cela impacte également ce qu’ils souhaitent devenir en grandissant. Il y a 15 ans, lorsque l’on demandait à nos enfants ce qu’ils voulaient faire plus tard, ils répondaient « patron, médecin, avocat ou instituteur ». Et aujourd’hui ? C’est « riche » ou « star ». L’argent prend une valeur disproportionnée à cause de l’étalage, c’est en première page, en couverture et on en parle. Tout est question de notoriété, et nous devons tempérer cela ».
Mais Michele Borba pense qu’il y a de l’espoir. « Les gens prennent conscience du fait que l’enfance passe trop vite. On commence à se poser la fameuse question « pPourquoi faisons-nous cela à nos enfants alors que l’enfance est bien trop précieuse pour être gâchée ».
Rédactrice adjoint
