Littérature : les 5 livres coup de cœur de la semaine du journaliste et écrivain David Lelait-Helo

Dans trois jours, elle cassera sa pipe, "le temps qu’il a fallu au Christ pour revenir d’entre les morts", écrit-elle dans cette ultime missive. Dominique Biron a 82 ans et derrière elle, une vie d’ennui de "vieille bourge". "Entre votre père et moi, c’était aussi rasoir qu’un spectacle d’école quand vos enfants ne sont pas dedans", se lamente-t-elle. Depuis six mois, elle se sait atteinte d’Alzheimer, alors autant se retirer avant le naufrage, et pourquoi pas laisser sur la table de cuisine une note qui dirait simplement Adieu les cons. Les cons, ce sont ses enfants, les deux qui lui restent, Catherine et John, et aussi son stupide gendre, Gaétan, et même son petit-fils "à qui j’ai rêvé d’arracher les bras (…) un petit manchot. Mon petit Gaspard". Dorothée, sa fille adorée, elle, lui a été enlevée. La faute à ce maudit cancer que Dominique aurait voulu accueillir dans son propre sein. "Tu étais un merveilleux et douloureux mystère", lui adresse-t-elle, regrettant de ne pas l’avoir suivie dans son exigeante quête de beauté et de vérité. La médiocrité du monde la taraude, et plus encore la sienne, elle l’enfant "de la génération qui a fait crever la planète." Pourquoi donc a-t-elle vécu sans conscience, sans folie ni prise de risque ? "Comment ai-je pu employer si mal le temps qui m’a été imparti ?" Vieille dame enfin indigne, elle profère les pires insanités, des jurons atroces qui lui donnent le plus grand plaisir et lui rappellent surtout la liberté de Dorothée. Entourée d’objets (...)

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