Livres : le top 10 du mois de janvier
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Livres : le top 10 du mois de janvier
Notre bonne résolution pour cette nouvelle année ? Continuer d’entretenir notre appétit littéraire (insatiable). Après le tourbillon des fêtes de fin d’année, on s’octroie quelques soirées beaucoup plus calmes, pour bouquiner. Alors si vous avez d’ores et déjà terminé de dévorer les livres reçus à Noël, nous vous proposons une sélection de dix coups de cœur, lue et approuvée par la rédaction.Des livres pour tous les goûtsAu programme de ce mois de janvier : des livres pour s’émouvoir, s’évader ou bien encore se cultiver. Piochez - au gré de vos envies - dans ces pépites littéraires, vous trouverez forcément votre bonheur. À vos marques, prêt.e.s, dévorez !© Getty - 2/7
« Chienne et louve », de Joffrine Donnadieu (Gallimard)
Joffrine Donnadieu a reçu le prix de Flore, une sacrée bonne nouvelle ! Il y a trois ans, quand a paru le premier roman de Joffrine Donnadieu, on savait bien peu de choses de cette jeune romancière : elle avait 29 ans, écrivait sous pseudonyme, était originaire de Lorraine. Aujourd'hui, pas besoin d'en savoir plus pour affirmer qu'elle est une écrivaine qui compte. Avec des mots crus, des images fortes et un style qui ose tout sauf l'esbroufe, Donnadieu impose la voix retentissante de son héroïne dans un deuxième roman saisissant. Enfant à la merci d'une abuseuse manipulatrice dans « Une histoire de France », Romy est devenue une jeune adulte, à Paris. Le jour, elle étudie au cours Florent, court les castings de pub et de figuration en rêvant aux grands rôles qui l'attendent. Le soir venu, pour payer les factures mais aussi pour combler le vide et éprouver ce corps maltraité qu'elle punit en retour, Romy devient Any-Doll et s'effeuille pour des hommes avides de son amour monnayé et de ses caresses expertes. Jouer des rôles, servir les autres (personnages, clients, parents), Romy sait faire. Quand, poussée par la nécessité, elle emménage chez Odette, vieille chouette isolée et excentrique de 89 ans, la jeune femme pense avoir conclu un marché simple avec sa logeuse : un toit contre une compagnie. Mais il n'y a pas de transaction facile quand le cœur est en jeu. Sans faux-semblants, et avec un humour noir qui évoque par endroits « Misery », de Stephen King, ou l'extravagance du classique hollywoodien « Qu'est-il arrivé à Baby Jane ? », Donnadieu piétine les convenances pour libérer Romy. Chienne, louve, bouleversante.
Clémentine Goldszal
© Presse - 3/7
« Les idéalistes », de Kristopher Jansma (Le Cherche Midi)
Comme il semble lointain, le temps évoqué dans ce roman ! Kristopher Jansma, auteur prodige de « New York Odyssée », livre une nouvelle histoire d'amitié, née à la fin de l'ère Barack Obama. Le narrateur, prof d'histoire, croise la route de Teddy Ruiz, la députée de la ville où il est né, et s'embarque sans réfléchir dans sa campagne. À la tête de l'équipe, Waldo, génie des mots, bourru, peu fiable mais attachant, car attaché à des idées qui le dépassent et transcendent l'Amérique. Plus que la course au poste de gouverneure du New Hampshire, c'est le duo Teddy-Waldo qui passionne le jeune prof. L'élue et sa plume se connaissent depuis leurs débuts dans la vie, portés par la recherche de solutions à tous les problèmes du monde. Tous deux ont connu l'avènement d'Obama, la date de naissance de leur génération de progressistes. Avec éclat, l'auteur transmet la fougue et le cynisme de l'engagement politique. Novice en la matière, son personnage fait l'expérience de tous les états vertigineux décrits par ceux qui s'y sont frottés. Comment, avec acharnement, on se bat pour faire « partie du processus », pour en être, au détriment du reste. Les nuits données sans compter, les déplacements répétés jusqu'à l'épuisement… Telle est l'extase inédite procurée par ce monde. Mais lorsque l'illusion se rompt et les convictions s'effondrent, seulement quelques « idéalistes » survivent à la chute.
Flavie Philipon
© Presse - 4/7
« Dans les rêves », de Delmore Schwartz (Rivages)
Il n'est question que de rêves dans les nouvelles de Delmore Schwartz, ceux que l'on fait la nuit, mais plus encore ceux qui naissent le jour : les attentes d'une société américaine obsédée par la réussite, les espoirs démesurés que les parents projettent sur leurs enfants, les aspirations que ces derniers nourrissent pour eux-mêmes. Seulement aucun protagoniste ne parvient jamais à émerger des « ténèbres familiales », à l'instar du jeune Shenandoah qui ploie sous le poids de la logorrhée maternelle dans le second texte du recueil, intitulé « L'Amérique ! L'Amérique ! ». Dans l'univers de Schwartz, cette génération d'intellectuels désœuvrés, issue de l'immigration européenne dans le New York de la Grande Dépression, personne n'a ce qu'il désire. Ce monde d'esprits éclairés est rattrapé par la trivialité du réel, finissant par s'empêcher eux-mêmes. Il y a du désenchantement fitzgéraldien dans ces nouvelles, où l'on retrouve l'idée que toute vie est « un processus de démolition ». Les personnages, tour à tour en proie à l'exaltation et à la mélancolie, s'affrontent dans des joutes verbales qui les laissent exsangues, évoluent dans des espaces confinés qui exacerbent leur sensation d'étouffement. Schwartz a passé les derniers mois de sa vie ivre et reclus dans une chambre d'hôtel. Si quelqu'un s'absorbe entièrement dans un sujet, « alors ce sujet devient pour lui le monde entier », écrivait-il. Sans doute cette chambre était-elle peuplée de toutes ces solitudes qu'il avait su dépeindre avec une acuité douloureuse ; sans doute contenait-elle le monde entier.
Flavie Philipon
© Presse - 5/7
« Le royaume désuni », de Jonathan Coe (Gallimard)
L'Angleterre de 1945 à nos jours racontée par Jonathan Coe est un tour de force de narration et un enchantement. « Personne n'a l'air de savoir ce qui va se passer », constate une Britannique d'un âge avancé dans les premières pages. Nous sommes en mars 2020, la pandémie commence, et la perplexité ouvre le nouveau roman de Jonathan Coe : comment le Royaume-Uni en est-il arrivé à un tel recroquevillement ? Ce territoire inventif et fantaisiste que le reste de l'Europe regardait comme un exemple s'est isolé et a placé à sa tête « un bouffon », Boris Johnson. Jonathan Coe cherche l'origine de la dégringolade en dressant un portrait ironique de son pays, pardon, de son « île ». Il la suit de 1945 à nos jours. Il en ressort que l'orgueil n'est pas bon conseiller. Né en 1961 dans les Midlands, l'auteur de « Testament à l'anglaise » renoue ici avec sa veine satirico-politique. L'histoire s'incarne dans une famille de la middle class et originaire des Midlands, elle aussi. Remarquable conteur, Coe en retrace la saga. Elle débute à Bournville, village qui vaut son pesant de cacahouètes : « L'air ne sentait pas le chocolat, mais il y avait du chocolat dans l'air. » L'entreprise Cadbury a installé là une usine autour de laquelle se construit le destin des habitants. Sept dates importantes scandent la trajectoire de la famille Lamb. Outre la victoire de mai 1945, il y a le couronnement d'Élisabeth II, le mariage de Charles et Diana, et, pour finir, le 75e anniversaire de la Victoire, en mai 2020. Le refus de l'État-providence et de l'égalitarisme est quelques-uns des points qui divisent les membres de la famille, mais aussi séparent le Royaume-Uni du reste de l'Europe. Bien que le ton de Jonathan Coe soit sarcastique, il se dégage de son roman douceur, tendresse et mélancolie.
Virginie Bloch-Lainé
© Presse - 6/7
« Quand l’arbre tombe », d'Oriane Jeancourt Galignani (Grasset)
Est-ce son père qui perd la tête, ou les arbres s'effondrent-ils vraiment dans le parc ? Pour en avoir le cœur net, Zélie quitte quelques jours Paris, mari et enfants. À 20 ans, elle s'est réfugiée dans la musique ; au fil des années, elle s'est construite, femme de devoir sans mémoire, sans se retourner sur son passé, sans revenir sur les lieux de son enfance ni de sa jeunesse. Et la voilà contrainte de se rendre à Chandelle, la propriété familiale où la forêt est le théâtre des retrouvailles entre une fille pudique et son père taiseux. Entre eux, un fantôme plane… « Quand l'arbre tombe » est le roman déchirant de blessures doublement assassines. À la déflagration du malheur s'ajoute le silence qui le recouvre, les mots qui ne sont pas prononcés, les larmes qui ne coulent pas. Avec une délicatesse inouïe, Oriane Jeancourt Galignani dépeint la loyauté sans faille de Zélie qui, telle une Antigone moderne, donne une tombe à son frère suicidé. Ce faisant, elle tire le portrait de son père, bouleversant roi Lear qui refuse de reconnaître les défaites de la vieillesse, orphelin de son fils à jamais, magnifique écorché par l'existence et la maladie. Sa plume gracieuse se joue des genres, récit ou roman, conte ou tragédie, se balade du côté de chez Pasolini : Luc, cet invité surprise dans le huis clos entre ce père et sa fille, est-il un ange ou un démon comme dans « Théorème » ? Qu'il est doux de rendre les armes, d'accepter d'être vulnérable, qu'il est beau ce roman d'une sœur aux mots retrouvés.
Olivia de Lamberterie
© Presse - 7/7
« Le radeau des étoiles », d'Andrew J. Graff (Gallmeister)
Cette fois, Fish n'abandonnera pas, hors de question de laisser son ami Bread affronter seul la violence de son père. Un coup de feu plus tard, les deux enfants prennent la fuite vers l'immense forêt qui borde la rivière. Le shérif, accompagné du grand-père de Fish, part à leur recherche. Une course contre la montre s'engage : les garçons ont construit un radeau, il faut les intercepter avant les chutes. Si tous les personnages de Graff sont habités par un feu intérieur qui les anime en même temps qu'il les dévore, il semble que la véritable héroïne du roman soit la forêt elle-même. Une forêt qui effraie d'abord, tant elle menace de tout engloutir – lumière, sons, individus –, mais qui, comme celle des contes, éprouve aussi les hommes pour les faire grandir. Bread, Fish et les autres en ressortiront tous libérés de quelque chose, y auront gagné la possibilité d'une rédemption.
Car la nature, chez Graff, si elle conserve sa part de sauvagerie, console et répare les enfants qu'elle porte en son sein. Dans ce premier roman puissant et poétique, l'auteur rend un hommage vibrant au vivant et à la puissance de la nature, miroir de l'âme humaine. Les cœurs des hommes y gémissent comme la rivière et murmurent comme le ciel, leurs yeux s'emplissent de pluie. Mais quand ils les lèvent vers « le manteau réconfortant des étoiles », ils n'ont plus peur : « La terreur de la nuit s'était fondue dans les remous du courant. »
Avril Ventura
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© Presse
On commence l’année par la meilleure des façons en savourant nos dix coups de cœur littéraire du mois.Notre bonne résolution pour cette nouvelle année ? Continuer d’entretenir notre appétit littéraire (insatiable). Après le tourbillon des fêtes de fin d’année, on s’octroie quelques soirées beaucoup plus calmes, pour bouquiner. Alors si vous avez d’ores et déjà terminé de dévorer les livres reçus à Noël, nous vous proposons une sélection de dix coups de cœur, lue et approuvée par la rédaction.Des livres pour tous les goûtsAu programme de ce mois de janvier : des livres pour s’émouvoir, s’évader ou bien encore se cultiver. Piochez - au gré de vos envies - dans ces pépites littéraires, vous trouverez forcément votre bonheur. À vos marques, prêt.e.s, dévorez !