Une entreprise a lancé le #MeToo Kit, un kit de viol DIY, et on hésite entre rire ou pleurer
Une entrepreneuse a lancé une trousse do it yourself, à utiliser à domicile, destinée aux victimes de viol et agression sexuelle. Sauf que rien qu’en lisant la phrase précédente, on voit bien qu’il y a un truc qui cloche.
Deux solutions : soit ça partait d’une bonne intention et c’est complètement raté. Soit ça surfe sur la vague du mouvement #MeToo et c’est bien triste. Une entrepreneuse américaine a créé un kit de viol à destination des hommes et des femmes violés ou agressés sexuellement, qui n’osent pas aller porter plainte auprès de la police ou bien se faire ausculter à l’hôpital ou dans un établissement médical.
Parce que si vous ne le saviez pas encore, la première chose à faire si vous avez subi un tel acte - ou si c’est le cas d’un de vos proches - il faut immédiatement se rendre au commissariat et recueillir des preuves de ce qu’il vous est arrivé. Donc ne pas prendre de douche, pour entrer dans les détails.
Bad buzz
Le #MeToo Kit (oui, c’est vraiment comme ça qu’il s’appelle), inventé par Madison Campbell, propose d’effectuer un prélèvement ADN tranquillou chez soi. Une sorte de DIY post-rapport sexuel non consenti. Plus glauque, ça n’existe pas. Et quand on voit le petit adhésif rouge sur lequel il est inscrit “Evidence” (comprenez “preuve”) comme dans les films américains, là on touche le fond.
every day, i find 35 brand new things to be mad at. today, it's this at-home "me too" kit, that capitalizes on sexual assault while also making survivors believe they're collecting evidence that will be permissible in court (it won't), among other problems https://t.co/E9k8R9QQwj
— Rosemary Donahue (@rosadona) September 4, 2019
Cette trousse n’est pas encore sortie mais devrait être disponible au printemps 2020. Enfin, sauf si elle n’est pas annulée face à la polémique qu’elle a générée. Alors oui, peut-être que sa créatrice a voulu bien faire en donnant aux victimes de violences sexuelles un moyen de prouver le mal qu’elles ont subi sans avoir à passer par la case commissariat (avec tout le traumatisme que cela sous-entend et le risque de ne pas être prises au sérieux, comme cela arrive encore trop souvent).
De là à se servir du mouvement de libération de la parole de femmes pour baptiser son produit… C’est un peu limite.
Un concept par définition contre-productif
Mais là où ça coince VRAIMENT, quoi qu’on en pense, c’est que légalement le kit est inutilisable et risquerait de faire plus de tort aux victimes qu’autre chose. "Cette start-up essaie sans vergogne de tirer un avantage financier du mouvement #MeToo en incitant les victimes à penser qu'un kit d'agression sexuelle à faire soi-même à la maison sera utilisé devant les tribunaux", a affirmé Dana Nessel - aka le procureur général du Michigan - à CNN.
Madison Campbell says her DIY rape evidence kit empowers sexual assault survivors like her.
But Utah critics call such kits 'misleading' and object they are 'profiting off somebody’s trauma.'
via @ruthyjacobs @report4america https://t.co/sc89SqXufB— Sheila R. McCann (@SheilaRMcCann) September 6, 2019
Les professionnels médico-légaux ont eux aussi tiré la sonnette d’alarme en expliquant que non seulement il fallait que l’examen (qui est un peu plus poussé qu’un auto-prélèvement) soit réalisé par un professionnel mais aussi que les utilisatrices pourraient être soupçonnées d’avoir falsifié leur échantillon en le présentant aux autorités. Logique. Sans compter sur le fait qu’elles ne bénéficieront pas d’un accompagnement psychologique ni d’échange avec une personne compétente pour ce genre de cas. Bref, une fausse bonne (ou mauvaise) idée.
The so called “#metookit” an at home rape kit is dangerous. They will give people a false sense of security, they do not replace a forensic rape exam done by a SANE nurse, and they cannot be used as evidence in a prosecution. This is a shameful attempt to profit off of #rape.
— Jennifer Storm (@JenniferRStorm) August 30, 2019