Pierre Palmade dans Convictions : "Si j'avais pu choisir, j'aurais été hétéro. Il n’y a pas à être fier d’être gay, c’est dur d’être gay"

Il occupe le cœur des Français depuis maintenant plus de 30 ans. À l'affiche d'une nouvelle pièce de théâtre intitulée "Assume, bordel", Pierre Palmade prend à bras-le-corps son rapport compliqué à sa propre homosexualité. À 53 ans, l'acteur et humoriste revendique son droit à militer comme il le souhaite, sans avoir à cacher que son orientation sexuelle n'a pas toujours été facile pour lui à assumer.

Aussi drôle que brutalement honnête. Si Pierre Palmade a si bien su séduire les Français, c'est parce qu'il a toujours su se montrer tel qu'il était : un homme complexe, qui a longtemps dû travailler sur lui pour arriver là où il en est aujourd'hui. Et alors qu'il est à l'affiche de la pièce de théâtre au titre équivoque, Assume, bordel, il s'est confié au micro d'Alexandre Delpérier pour Convictions, la toute nouvelle émission de Yahoo. Des confessions tendres, parfois teintées d'une pointe de colère, mais qui dressent un constat clair sur la vie du camarade de Muriel Robin et Michèle Laroque.

L'histoire de sa vie

Dans Assume, bordel, Pierre Palmade incarne le rôle d'un mec en couple avec un autre homme, mais qui a bien du mal à se faire à ce "statut d'homosexuel". Une histoire que le principal intéressé connaît malheureusement très bien : "La pièce est née, effectivement, de longues périodes que j'ai mis à assumer cette homosexualité qui me pesait, et donc j'en ai fait un spectacle. Je ne veux pas repartir dans un message comme quoi c'est une souffrance, parce que maintenant je le vis bien. Et maintenant, la communauté gay est toujours très réactive quand je parle de la souffrance que ça a été. Mais ça a été la naissance de ce spectacle : c'était pour montrer qu'il y avait différentes façons de le vivre. Et effectivement, Assume bordel, c'est un couple avec un homo qui n'assume pas vraiment, ou qui aurait préféré être hétéro."

En effet, s'il affirme avoir "assumé (son) homosexualité", l'humoriste le rappelle : "Assumer, ça ne veut pas dire être heureux de vivre avec. Si j'avais eu le choix, je pense que j'aurais été hétéro. Parce que c'est plus facile d'être hétéro dans cette société." Une société où l'homophobie fait encore et toujours des ravages, que ce soit avec des crimes haineux ou à travers du cyberharcèlement sur les réseaux sociaux, ou tout simplement avec ces politiques qui veulent faire annuler le mariage pour tous.

L'homme qui voulait aimer les femmes

Oui, s'il avait eu le choix de son orientation sexuelle, Pierre Palmade aurait préféré aimer les femmes, et ces dernières le lui rendent bien. "Ne pas avoir le choix, c'est voir que tu plais énormément aux femmes lorsque tu les fais rire, alors que les mecs ça les rend plutôt jaloux. On plaît énormément aux femmes quand on est célèbre, alors que les mecs, ça les rend jaloux... Alors tous les atouts qu'on a, qui font qu'on peut plaire aux femmes, ça ne sert à rien puisque finalement, on est homo. C'est rageant de savoir qu'on a beaucoup de choses en nous qui peuvent faire tomber une femme amoureuse, et ça m'est arrivé dans ma vie. En ce qui me concerne, c'est plus difficile de séduire un homme qu'une femme."

Des femmes amoureuses, l'acteur en a connu une en particulier : Véronique Sanson. Leur relation durera de nombreuses années, et pendant six ans, ils ont été mari et femme. "Véronique Sanson m'a connu dans une boîte gay, donc elle savait que j'étais homo. Mais je lui disais, et je me disais que j'étais bi, et assez bi pour l'aimer et oublier mon attirance pour les garçons. Je pensais vraiment que j'allais me consacrer entièrement à elle, ce que j'ai fait pendant pratiquement un an. Et puis, petit à petit, les envies de voir des garçons sont revenues. Elle m'en a voulu, parce qu'elle m'aimait. Je me suis menti à moi-même, et je lui ai menti aussi. Elle aurait voulu que je sois aussi bi que je le prétendais. Et puis un jour, elle a vraiment compris. Et le jour où elle me l'a dit, elle a rajouté : "Mais je t'aime quand même", et ça m'a rassuré."

Sa quête désespérée de l'hétérosexualité

Au-delà de la souffrance imposée à son ex-compagne, Pierre Palmade a souffert de ne pas "réussir" à être assez hétéro, et ce pendant une bonne partie de sa vie. "J'ai commencé à me poser des questions quand j'ai réalisé que mon meilleur ami, c'était toujours le plus beau de la classe, même s'il n'était pas le plus intéressant. J'ai craqué sexuellement vers l'âge de 18 ans, et là, je me suis dit que ma vie allait être compliquée. En 1988, à Bordeaux, ça ne réjouissait pas d'apprendre ce genre de vérité sur soi."

Face à cette réalisation, il confie s'être "séparé en deux" : "Je me suis dit : "Je suis hétéro, et une fois de temps en temps, je vais avoir une relation avec un copain." Puis après, je me suis dit que j'étais peut-être bi. J'ai poussé l'expérience jusqu'au mariage, pour me prouver que j'avais une part d'hétéro en moi. Et après, je me suis dit : "Pierre, il faut te rendre à l'évidence : tu n'es heureux dans l'intimité qu'avec un homme"." Une évidence qu'il aurait aimé réaliser un peu plus tôt.

VIDÉO - Convictions : Retrouvez l'intégralité de l'interview de Pierre Palmade

Un rapport compliqué avec la communauté LGBTQIA+

Avec ses prises de parole très honnêtes sur son rapport à l'homosexualité, Pierre Palmade ne s'est pas fait que des amis. "La communauté voudrait que je milite à sa façon, que je sois fier d'être gay. Moi, je pense que ça ne sert à rien de traiter les homophobes de sales homophobes, il faut leur expliquer qu'on souffre de ça, qu'ils aient de l'empathie." Lui l'affirme : "Elle est bizarre ma façon de militer, car je suis tiraillé parce que je veux qu'on foute la paix à tous les homos de la Terre, mais je ne peux pas m'empêcher de dire que dans cette société-là, c'est dur de l'être, de le vivre, de le dire. Je ne peux pas m'empêcher de le dire : il n'y a pas à être fier d'être gay. C'est dur d'être gay. Et encore, je suis à l'endroit le plus privilégie : en France, dans le milieu artistique..."

C'est d'ailleurs aussi un peu pour ça qu'il a décidé de prendre le sujet à bras-le-corps sur les planches du théâtre : "Ce spectacle, c'est pour montrer qu'il n'y a plus seulement la division entre hétéro et homo, mais qu'il y a plusieurs façons de le vivre, d'être homo. On nous dit souvent cette phrase un peu criminelle, je trouve : "Toi, tu ne fais pas homo". Sous prétexte qu'on est un peu viril, on nous dit : "Tu ne fais pas homo", sous le prétexte, "Cache-le, pour être plus tranquille." Donc on se dit que puisqu'on ne fait pas homo, on va faire hétéro pour être tranquille. C'est moins facile à dire quand on ne fait pas homo que quand on fait homo, c'est-à-dire quand on fait un peu précieux, un peu efféminé, ou quand on a envie de le revendiquer et qu'on est très à l'aise avec ça. C'est pour ça que mon copain dans la pièce me dit : "Assume, bordel", parce que je ne veux pas aller à la gay pride, je ne veux pas me marier... Je n'ai pas de problème pour le vivre, mais j'ai un problème vis-à-vis de moi et de la société. Cette pièce, c'est vraiment pour dire aussi à la communauté : "Bien sûr que vous avez raison, bien sûr que je suis de votre côté. Mais je ne veux pas m'empêcher de parler de ma souffrance et de ma complexité de le vivre. Respectez-là"."

Interview : Alexandre Delpérier

Article : Laetitia Reboulleau

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