Shein : la nouvelle plateforme de revente du géant de la fast-fashion est « du greenwashing complet »

Une plateforme de revente des vêtements Shein va être lancée en France.
Allen J. Schaben / Los Angeles Times via Getty Imag Une plateforme de revente des vêtements Shein va être lancée en France.

CONSOMMATION - Non content de dominer le marché de l’ultra fast-fashion, Shein envahit désormais celui de la revente de vêtements d’occasion. Donald Tang, le président exécutif du groupe, a annoncé ce lundi 3 juin dans Les Échos, le lancement en France de la plateforme « Shein Exchange », qui permettra de revendre des produits de la marque chinoise. Selon l’homme d’affaires, cette initiative « favorise l’économie circulaire », une « demande forte des consommateurs français ».

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Cette annonce a lieu quelques mois après l’adoption à l’unanimité par l’Assemblée nationale d’une proposition de loi visant à pénaliser Shein et les autres enseignes d’ultra fast-fashion pour leur impact environnemental. Un impact qui ne va pas être compensé par cette nouvelle plateforme, au contraire.

« C’est du greenwashing complet, résume Pierre Condamine, chargé de campagne surconsommation aux Amis de la Terre France. C’est une couverture verte de dire “on s’inscrit dans l’économie circulaire et dans la seconde main”. Cela sert à occulter le fait que leur modèle de production et la quantité de vêtements qu’ils produisent ne sont pas compatibles avec le respect de l’environnement. »

« L’impact environnemental de Shein est énorme »

Shein met en effet en ligne plus de 7 000 nouveaux modèles chaque jour, le tout à un prix dérisoire. Une offre délirante quand on sait que, selon les calculs de l’association En Mode Climat, pour que nos niveaux de consommation soient compatibles avec les objectifs de l’accord de Paris, il faudrait se limiter à cinq nouveaux vêtements par an par personne (chaussures et linge de maison compris).

Aux accusations de surproduction, Donald Tang, le président exécutif de Shein, répond que leur « modèle économique est meilleur pour la planète » que celui de leurs concurrents. « À la différence d’autres enseignes, qui produisent en grande quantité et accumulent des stocks et donc des invendus, nous ne produisons que ce que nos clients nous demandent de produire », défend-il dans Les Échos.

Un argument fallacieux, pour Pierre Condamine. « C’est totalement faux, ils produisent trop, peu importe si c’est vendu ou pas, explique-t-il au HuffPost. Ce n’est pas que ce qui est invendu qui pollue, c’est tout ce qui est produit et leur impact environnemental est énorme. »

La surproduction textile a en effet un coût environnemental très clair. Aujourd’hui, à l’échelle mondiale, l’industrie textile représente 10 % des émissions de gaz à effet de serre. Selon l’Agence de la transition écologique (Ademe), si la surconsommation actuelle se poursuit ce chiffre pourrait atteindre 26 % en 2050. À elle seule, la fast-fashion est responsable d’environ un tiers du transport aérien de marchandises dans le monde.

Pourquoi acheter d’occasion n’est pas si écolo

Et ce n’est pas la seconde main qui va venir compenser cet impact. Certes, consommer d’occasion permet de réutiliser plutôt que d’acheter neuf. Mais comme Pauline Debrabandere, coordinatrice de campagne chez Zéro Waste France, nous le rappelait il y a quelques mois, la hausse de la seconde main a accompagné celle de la fast-fashion pour une raison : « cela peut légitimer parfois le fait que des gens achètent plein de choses et les remettent en vente immédiatement après ».

Sous couvert d’économie circulaire, la nouvelle plateforme de revente de Shein – qui sera exclusivement dédiée aux vêtements de la marque – est un très bon outil pour encourager les consommateurs à acheter toujours plus.

« Cela légitime et encourage le fait d’acheter Shein en permettant aux gens de se dire “ce n’est pas grave, je peux consommer autant que je veux parce que ça deviendra de la seconde main et ça ne sera pas jeté”, résume Pierre Condamine. Mais les déchets, ce n’est qu’une partie de la pollution. Le problème vient de la surproduction. Et la marque se cache derrière la seconde main pour ne pas changer son modèle de production. »

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