"Pendant plus de 2 ans, il n'y a pas eu de miroir chez moi" : les confidences de Tristane Banon sur son image après l'affaire DSK

PARIS, FRANCE - 11/24/2021: Writer Tristane Banon poses during a portrait cession in Paris, France on 11/24/2021. (Photo by Eric Fougere/Corbis via Getty Images)
"Pendant plus de 2 ans, il n'y a pas eu de miroir chez moi" : les confidences de Tristane Banon sur son image après l'affaire DSK. (Photo by Eric Fougere/Corbis via Getty Images)

Romancière, journaliste, chroniqueuse : Tristane Banon multiplie les casquettes, mais pour bon nombre de personnes, elle reste l'une des femmes qui a pris la parole contre Dominique Strauss-Khan en l'accusant d'agression sexuelle et de tentative de viol, alors qu'elle n'avait que 24 ans. Des accusations qui lui ont valu de violentes critiques et qui ont détruit sa confiance en elle.

"Ce qui a été étrange à ce moment-là, c’est d’avoir le sentiment d’avoir des comptes à rendre à tout un tas de gens […] Personne ne connaissait ma vie privée, personne ne connaissait rien et tout le monde avait l’impression de connaître tout." Dans le podcast "Miroirs" d'Amélie Marzouk, Tristane Banon revient sur l'un des drames qui a marqué sa jeunesse, et sa construction en tant que femme adulte, et en tant que féministe. En 2011, alors que Dominique Strauss-Kahn est accusé d'agression sexuelle aux États-Unis, la mère de la jeune femme révèle que sa fille a elle été aussi victime de l'ancien homme politique, et qu'elle regrette de l'avoir découragée de porter plainte.

Quelques semaines plus tard, Tristane Banon décide finalement de faire appel à la justice, rapportant des faits datant de février 2003, et évoque une agression sexuelle et une tentative de viol. Une plainte qui sera classée sans suite pour cause de prescription, mais qui mettra la jeune femme sous le feu des projecteurs... Et sous celui des critiques. "Menteuse", "opportuniste"... La jeune journaliste et romancière sera violemment prise à partie pendant des années, et il lui arrive de l'être encore aujourd'hui, surtout depuis sa participation au documentaire sur l'affaire DSK. Et ces violences morales n'ont pas été sans effet.

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Elle ne pouvait "plus se voir en peinture"

Invitée par Amélie Marzouk dans son podcast "Miroirs", Tristane Banon se confie sur cette exposition, elle qui était pourtant habituée des plateaux télé, de par son métier. Très secrète, elle s'était rarement confiée sur sa vie privée, et pour certaines personnes, aux vues des accusations qu'elle portait, il y avait "quelque chose de louche." "On m'a inventé une vie complètement dingue, on m'a dite droguée, on m'a inventé un passé sulfureux..." regrette-t-elle. En revanche, elle confie qu'une personne a vécu les choses beaucoup mieux qu'elle : "Ma mère a beaucoup apprécié la surexposition, dont elle n'était pas bégueule quand il s'agissait de parler aux médias et de se confier."

Epiée, décortiquée, Tristane Banon affirme : "Je n'ai jamais réussi à ne pas regarder" ce qui était écrit à son sujet, dans les articles comme sur les réseaux sociaux. "Je voyais passer les insultes, les messages, les menaces. Je voyais tout ça, et c'était compliqué." En particulier les attaques des gens qui ont affirmé qu'elle faisait ça "pour être connue", alors qu'elle n'était pas en quête de notoriété, ou du moins de ce type de notoriété : "Je ne voulais pas qu'on parle de moi pour quelque chose que je n'avais pas fait, que j'avais subi." Résultat, à l'époque, elle prend une décision radicale : "J'ai retiré tous les miroirs. Tous. Je ne pouvais plus me voir en peinture. C'est quand même très étrange de promener son chien à 3h du matin pour ne pas croiser trop de monde, et de voir sa tête sur les kiosques à journaux. (...) Pendant plus de deux ans, il n'y a pas eu un seul miroir ici, je ne me suis pas maquillée, j'avais vraiment beaucoup de mal avec ça."

Une reprise de contrôle sur son image

Finalement, ce n'est pas une volonté de retrouver son visage qui a poussé Tristane Banon à racheter des miroirs. "J'adore chiner, aller dans les brocantes, et un jour j'ai trouvé un miroir des années 20, presque une sculpture. J'ai voulu l'acheter, et c'est comme ça que l'objet "miroir" est revenu chez moi, que je me suis réhabituée petit à petit, et où j'ai détaché mon image de l'affaire." Car c'était bien ça le problème : la romancière n'arrivait plus à dissocier son image, son reflet, de l'affaire DSK. "Je voyais les Guignols de l'info, les dessins humoristiques, les photos dans la presse... Rien de ce que j'avais eu auparavant l'habitude de voir." Elle confie également qu'elle ne voyait "plus que les défauts, qui ont été amplifiés" par les critiques, les moqueries, les attaques. "Je préférais ne pas voir."

Près de 20 ans se sont écoulés depuis les faits dont elle accuse Dominique Strauss-Khan. Plus de 10 ans depuis l'explosion de l'affaire. Mais encore aujourd'hui, Tristane Banon avoue avoir un rapport difficile avec son reflet : "J'ai toujours eu un rapport très ambigu et très compliqué avec mon miroir, car j'ai à la fois toujours aimé travailler avec des photographes, parce qu'ils me réconciliaient avec mon image. Mais en revanche, si j'ai toujours aimé faire des photos, je n'ai jamais aimé me regarder dans le miroir." La romancière ne s'est jamais trouvée jolie, souffrant de la comparaison avec sa mère, qu'elle décrit comme "une belle femme" qui ne l'a jamais rassurée sur son apparence. Et aujourd'hui encore, les choses n'ont pas vraiment changé. Même si elle fait en sorte de faire son maximum pour rassurer sa fille, afin qu'elle n'ait pas à subir les mêmes complexes que ceux qu'elle a affrontés.

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