Vols d’enfants, contrainte et pression sociale : pour les mères, le traumatisme de l’accouchement sous X

Cet été-là, Mauricia* devint mère pour la première et la dernière fois. « Est-ce qu’on peut vraiment dire que je suis une mère… », s’interroge-t-elle, émue, les yeux baissés. En 1966, alors qu’elle n’était encore qu’une adolescente, elle mit au monde un petit garçon dans le plus grand des secrets. Aucune trace, nulle part, ne subsiste de cet accouchement, si ce n’est un souvenir inaltérable. « J’étais si jeune, vous savez… Il n’y avait pas la pilule, l’avortement, toutes ces choses là », se justifie la septuagénaire.

A cette époque, la société ne donnait que deux possibilités aux femmes comme Mauricia : garder l’enfant ou le donner. « L’IVG fut interdite jusqu’en 1974 avec une répression très sévère pour les femmes qui transgressaient la loi », rappelle Antoine Rivière, maître de conférences à Paris 8 et spécialiste de l’abandon au XIXe et XXe siècle. Avant cette date cruciale, toutes les femmes risquaient des maternités contrariantes, non désirées, douloureuses et… solitaires.

« Pour comprendre l’accouchement dans le secret, il faut le contextualiser. Mais il révèle, dans bien des cas, l’immense violence sociale qui est faite aux femmes, et témoigne d’une inégalité de genre, mais aussi d’une inégalité de classe », soutient l’historien.

Pour Mauricia, la décision finale fut de confier son enfant, en ne lui laissant rien d’elle, pas même un prénom. « Je l’ai fait pour lui, pour qu’il puisse construire sa vie sur une page blanche », confie-t-elle avant de s’exclamer : « Qu’aurais-je (...)

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