Dans les Ehpad, les repas ressemblent trop souvent à « une punition » selon 60 millions de consommateurs

En France, on estime qu’environ 30 % des résidents d’Ehpad souffrent de dénutrition
Halfpoint Images / Getty Images En France, on estime qu’environ 30 % des résidents d’Ehpad souffrent de dénutrition

ALIMENTATION - Dans les Ehpad, les plateaux-repas ont souvent des airs de punition. C’est ce que met en lumière une enquête de 60 millions de consommateurs, publiée ce jeudi 26 octobre, qui pointe une forme de maltraitance des personnes âgées dans les pratiques alimentaires des établissements d’hébergement.

Grâce à un sondage en ligne, la revue a interrogé 250 résidents et leurs proches sur leurs habitudes nutritionnelles en Ehpad. Les résultats sont inquiétants : loin d’un moment de plaisir, les assiettes servies dans ces établissements sont trop souvent sans saveur, voire immangeables, et les conditions des repas ne permettent pas toujours de répondre aux besoins énergétiques des résidents.

En Ehpad, environ un résident sur trois souffre de dénutrition

« Ma mère me dit souvent qu’elle n’a pas touché à son assiette, que le repas était immangeable » soupire Anne*, dont la mère est résidente depuis trois ans dans un Ehpad dans la région PACA, qui témoigne auprès du HuffPost. Elle n’est pas la seule à faire ce constat. D’après l’étude menée par 60 millions de consommateurs, dans les Ehpad, seulement une personne sur quatre termine son assiette à chaque repas. Ils sont un sur deux à la finir « parfois », et un sur cinq à ne jamais terminer leur plat.

Un chiffre qui fait écho à une autre donnée effarante relayée par l’article de 60 millions de consommateurs : en France, on estime qu’un tiers des résidents d’Ehpad souffre de dénutrition. Pour décrire leurs repas, les interrogés de l’enquête parlent de « bouillie immangeable », de plats « peu appétissants » ou « sans aucun goût ». Anne raconte que sa mère en fait l’expérience régulièrement : « On nous envoie chaque semaine le menu de l’Ehpad, et on peut y lire des choses très élaborées, avec des termes ampoulés. Mais en réalité, dans les assiettes, la nourriture est pire que basique, on ne leur met même pas de beurre. On sent bien qu’il y a une volonté de faire des économies. » Un enjeu budgétaire d’importance, en période d’inflation.

Anne dénonce par ailleurs un décalage flagrant entre la communication menée par les établissements et la nourriture servie. « La dernière fois, le menu indiquait un “pain moelleux à la ricotta au miel et au paprika façon fougasse”. Quand j’ai demandé à ma mère si elle avait mangé ça, elle m’a répondu “J’ai eu un bout de pain dur, je ne sais pas ce que c’était, je n’ai pas pu y toucher”. »

Des périodes de jeûne trop longues

Mais la qualité de la nourriture n’est pas le seul vecteur de problèmes d’alimentation chez nos aînés en Ehpad. D’après les résultats de l’étude, les horaires de service des repas leur imposent un jeûne trop long entre le dîner et le petit-déjeuner. Alors que les gériatres recommandent de ne pas dépasser douze heures, les chiffres récoltés par 60 millions de consommateurs indiquent que la pause entre le dernier repas de la journée et le premier de la suivante « avoisine souvent les quatorze heures ».

Durant les repas, le niveau d’accompagnement des résidents semble trop faible par rapport à leurs besoins : dans un tiers des cas seulement, une personne est présente tout au long du repas. Pour celles et ceux qui ont des problèmes de motricité qui rendent difficile le fait de s’alimenter seul, il faut attendre - longtemps - et manger un plat froid.

Pour améliorer la situation, 60 millions de consommateurs demande l’augmentation du taux d’encadrement des résidents, une plus forte contribution des collectivités et de l’État au budget, et un suivi du poids des résidents régulier et systématique, avec une prise en charge médicale en cas d’amaigrissement persistant. Quant à la qualité des plats servis, le magazine met l’accent sur la nécessité d’un effort de présentation systématique au moment des repas, une plus grande diversité de plats proposés, et la possibilité de choisir au minimum entre deux plats.

*Le prénom a été modifié.

À voir également sur Le HuffPost :

À Mars-la-Tour, l’Ehpad a perdu près de la moitié de ses résidents

Dans la maladie d’Alzheimer, Élie Semoune trouve «tout dégueulasse»