Elles ont fait de la chirurgie esthétique à l’adolescence et regrettent d’avoir franchi le pas

Ces dernières années aux États-Unis, il n’est pas rare qu’une jeune de 16 ans vienne demander des interventions de médecine esthétique, comme des injections dans les lèvres.
Robert Daly / Getty Images Ces dernières années aux États-Unis, il n’est pas rare qu’une jeune de 16 ans vienne demander des interventions de médecine esthétique, comme des injections dans les lèvres.

BEAUTÉ - À l’âge de 16 ans, Zoé a subi une septorhinoplastie, une intervention chirurgicale qui permet à la fois de corriger une déviation de la cloison nasale (septoplastie) et de modifier l’aspect cosmétique du nez (rhinoplastie).
L’intervention visant à corriger la déviation de la cloison nasale était nécessaire ; la rhinoplastie ne l’était pas, bien qu’elle puisse paraître comme telle à une adolescente de 16 ans.

Retoucher son visage, les personnalités le faisaient déjà sur les portraits au XVIIe siècle

« Au collège, un garçon m’a dit que j’avais un gros nez, ce qui a fait naître un complexe », se souvient Zoé aujourd’hui. Lorsqu’elle a émis l’idée de profiter de l’opération pour subir une rhinoplastie, son médecin n’y a vu aucune objection : le nez de Zoé avait, selon lui, besoin d’un peu de travail. Bientôt, l’adolescente passait donc sous le bistouri.

La cicatrisation fut longue et difficile et le résultat final loin d’apaiser les complexes de la jeune fille. Quinze ans plus tard, la désormais trentenaire pense qu’elle souffrait alors de dysmorphophobie (une préoccupation obsédante concernant un « défaut » physique léger, voire imaginaire). « Je regarde des photos de mon nez et il n’avait aucun problème, analyse-t-elle aujourd’hui. Je regrette l’opération, j’étais trop jeune pour prendre cette décision. Si j’avais attendu d’être plus âgée, j’aurais certainement changé d’avis. »

Si de nombreux jeunes ne regrettent pas d’avoir eu recours à la chirurgie esthétique, Zoé n’est pas la seule à se demander si elle a fait le bon choix en modifiant quelque chose qu’elle aurait pu apprendre à accepter avec l’âge.

[Note : Cet article est une traduction réalisée par la rédaction du HuffPost France, à partir d’un article paru en 2022 sur le Huffington Post américain. L’article original à lire ici. Il a été traduit et édité dans un souci de compréhension pour un lectorat francophone.]

« Garder le nez de mes ancêtres »

En 2022, Kylie Jenner avait confié regretter sa pose d’implants mammaires à 19 ans. La top model Bella Hadid a aussi exprimé des remords au sujet d’une rhinoplastie subie à 14 ans seulement. « J’aurais aimé garder le nez de mes ancêtres », a déclaré la mannequin d’origine palestinienne.

Comme Bella Hadid, Dulce Candy Ruiz, une influenceuse de 34 ans, regrette sa rhinoplastie. Adolescente, c’est sur les réseaux sociaux que la Californienne avait développé un complexe sur son nez. En voyant, photo après photo, des petits nez « parfaits », elle avait commencé à remettre en question son propre visage.

« L’opération du nez que j’ai fini par subir m’a fait me sentir encore plus mal quand j’ai pris conscience, quelques années plus tard, que j’avais fait une énorme erreur », estime celle qui regrette aujourd’hui d’avoir effacé un trait de visage partagé par tous les membres de sa famille maternelle.

Sur sa chaîne YouTube, Dulce Candy Ruiz fait souvent part de ses sentiments compliqués envers la chirurgie plastique, en espérant que les jeunes filles y verront une mise en garde. « La dernière chose que je souhaite, c’est qu’une fille se fasse opérer parce qu’elle ne s’aime pas, explique-t-elle dans une vidéo. C’est ce que j’ai fait lors de ma rhinoplastie. J’ai abîmé mon nez en essayant de “réparer” quelque chose qui n’était pas cassé. »

L’influence d’Instagram

L’opération de l’influenceuse a eu lieu il y a plus de dix ans, alors qu’Instagram en était encore à ses balbutiements. Depuis, les normes de beauté ont encore évolué avec l’essor des filtres et d’un idéal esthétique qui imite les traits des Kardashian ou de mannequins comme Bella Hadid.

Ces jours-ci, les adolescentes apportent des selfies filtrés de stars d’Instagram aux chirurgiens esthétiques dans l’espoir d’obtenir un look similaire. « Tout le monde utilise des filtres et certaines passent à l’étape suivante en me l’apportant en disant : “c’est à ça que je veux ressembler” », expliquait Matthew Schulman, chirurgien plastique basé à New York, au HuffPost US en 2018.

Anthony Youn, chirurgien plastique et auteur de The Age Fix, a observé une tendance similaire. Selon lui, à cause d’Internet, les adolescentes sont de plus en plus précises sur les opérations qu’elles souhaitent.

« Nous avons constaté une augmentation du nombre d’adolescentes qui demandent des interventions, et je pense que les médias sociaux jouent un rôle important à cet égard », explique-t-il. Ces dernières années aux États-Unis, il n’est pas rare qu’une jeune de 16 ans vienne demander des interventions de médecine esthétique, comme un lifting du sourcil, un remplissage des joues ou des injections dans les lèvres.

Des interventions « inacceptables »

Bien entendu, toutes les interventions pratiquées sur des adolescents ne le sont pas pour des raisons purement esthétiques, précise Anthony Youn. Les interventions de chirurgie plastique couramment pratiquées sur les adolescentes pour des raisons médicales sont souvent des opérations de réduction mammaire pour celles souffrant de douleurs au dos, ainsi que certaines opérations du nez ou des oreilles.

Lorsque des adolescents se présentent à son cabinet, le docteur Anthony Youn se montre prudent. « Il y a des interventions que je considère comme inacceptables lorsqu’elles sont pratiquées pour des raisons purement esthétiques, comme l’augmentation mammaire et la liposuccion, mais elles sont pratiquées par des chirurgiens plastiques des milliers de fois chaque année dans tout le pays », explique-t-il.

Si certaines peuvent avoir des regrets, celles qui se font opérer se disent en grande majorité généralement satisfaites du résultat de leur intervention, selon David B. Sarwer, doyen au College of Public Health de l’université de Temple (Floride) et psychologue spécialiste des implications psychologiques de la chirurgie esthétique.

« Cela dit, certains patients ayant subi une rhinoplastie affirment qu’il leur faut un certain temps pour s’adapter à la nouvelle apparence de leur visage, et certains expriment également des sentiments de regret, en particulier s’ils ont modifié une caractéristique que l’on retrouve fréquemment chez d’autres membres de leur famille », analyse-t-il.

L’influence des parents

Lorsque les adolescents se sentent poussés unilatéralement par un ou plusieurs de leurs parents à passer sous le bistouri, la déception postopératoire est également plus fréquente. C’est ce qui est arrivé à Megan. Elle avait 18 ans lorsqu’elle s’est fait poser un implant mammaire du côté gauche - son sein gauche ne s’étant jamais développé comme le droit.

Megan n’avait jamais été gênée par la différence de taille, mais sa mère a insisté pour qu’elle subisse une intervention chirurgicale. « Elle me disait qu’elle voulait m’aider à me faire opérer et que mon mari me remercierait un jour », raconte-t-elle aujourd’hui.

Dix ans plus tard, Megan regrette toujours l’opération. « J’étais satisfaite de mon corps, même de mon sein non développé. Je faisais des blagues à ce sujet, mes amies le savaient et faisaient des blagues de temps en temps », se souvient-elle.

Bien conscient que ce type de situations existe, Rod Rohrich, chirurgien à l’Institut de chirurgie plastique de Dallas, s’efforce de distinguer les patients adolescents qui viennent de leur plein gré de ceux qui le font sous la pression de leurs parents ou de leur entourage.

Pas de mal à attendre

Les femmes avec lesquelles nous nous sommes entretenues dans le cadre de cet article ont fait la paix, à des degrés divers, avec leurs interventions esthétiques passées. Mais elles sont toutes d’accord sur un point : il n’y aurait pas eu de mal à attendre quelques années de plus.

« Si je pouvais remonter le temps et me donner des conseils à celle que j’étais alors, je l’encouragerais à attendre au moins le début de la trentaine pour envisager de se faire refaire le nez, estime Dulce Candy Ruiz. Le manque de maturité, d’acceptation de soi et le fait de ne pas savoir qui l’on est ou ce que l’on veut dans la vie peuvent conduire à faire des choix radicaux qui ne pourront jamais être inversés. »

Zoé, quant à elle, espère que les adolescents d’aujourd’hui qui envisagent des soins esthétiques se rendent compte que passer sous le bistouri n’est pas une mince affaire. « J’ai remarqué que la chirurgie esthétique était normalisée et encouragée pour les jeunes, en particulier sur TikTok, regrette-t-elle. Des clips de trente secondes peuvent donner l’impression que la chirurgie plastique est une simple “mise en beauté”, mais ce n’est certainement pas une décision à prendre à la légère. »

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