"Je me sentais très moche et grosse" : Helena Noguerra traumatisée par sa carrière de mannequin
Ce jeudi 24 novembre 2022, M6 diffuse le premier épisode de sa nouvelle série originale, "L'homme de nos vies", avec Helena Noguerra. Une artiste touche-à-tout qui a commencé sous le feu des projecteurs en étant mannequin. Et dès son plus jeune âge, la comédienne a été confrontée à la violence d'un milieu hyper-normé, où les codes de beauté sont sanctuarisés et imposés avec une brutalité sans nom.
"Je suis une artiste saltimbanque" lance Helena Noguerra lorsqu'il faut se définir. Il faut dire qu'elle fait partie de celles que l'on ne range pas dans une case. Un peu comme sa soeur aînée, Lio, elle est sur tous les fronts : comédienne, écrivaine, chanteuse et militante, Helena Noguerra fourmille sans cesse de projets, refusant d'être emprisonnée dans le moindre rôle. Pour elle, le succès a commencé à 15 ans, lorsqu'elle choisit de quitter l'école et sa Belgique natale pour la grandeur de Paris et les auditions de mannequinat. Son visage de poupée tape alors dans l'oeil des directeurs d'agence, mais cette expérience créera chez l'adolescente de puissants complexes...
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Une carrière de mannequin entre succès et complexes
Déjà lorsqu'elle n'était qu'une petite fille, Helena Noguerra a grandi avec les mots forts de ses parents au sujet de son physique. "J’étais un petit peu boulotte et courte. Ma maman disait : ‘Elle est tellement mignonne, mais c’est dommage, elle va être petite et grosse.’ Et mon papa disait : ‘Non je ne crois pas !'" se souvenait-elle en 2017 dans l'émission "Thé ou Café". "J’étais un peu costaud jusqu’à mes 5 ans. Et je suis devenue une espèce de longue liane. Un peu trop maigre d’ailleurs." Petite, Helena Noguerra nourrit des rêves de spectacle. Mais finalement, son physique la mène sur une autre voie : "Je voulais être clown. Après je suis devenue mannequin. La preuve que c’est parti en c*uilles tout ça !" s'en amusait-elle sur France 2. Car poser sous l'oeil des photographes de mode ou des caméras de publicité ne l'a pas vraiment amusée.
En 2016, dans l'émission "Folie Passagère", Helena Noguerra revenait sur cette expérience de mannequin, qui, au début, lui a offert de nombreuses choses : "On rencontre des gens de milieux socioculturels très différents, c’est un monde qui était très ouvert dans les années 80. Il y avait beaucoup d’homosexuels, de liberté, de folie. Tout ça, c’était fantastique. J’ai appris énormément." Sauf qu'il y a un "mais". Car, même si elle est alors très jeune, Helena Noguerra rencontre très vite des difficultés dans cet exercice, confrontée à un milieu dans lequel elle doute sans cesse : "J’ai trouvé ça débile de faire une pub et de mettre du rimmel en étant très heureuse. Et je leur disais : ‘Mais on participe à une idée de la femme qui est un peu idiote ou pas ?’ Et on me disait : ‘Ferme-la, et puis t’as accepté !’ Ils avaient raison, je n’avais qu’à pas le faire. Mais tout ça me posait beaucoup de questions." Viennent alors les premiers complexes à force d'écumer les castings et shootings photo : "D’une jeune fille de 15 ans qui se sentait bien, d’un seul coup on se sent très moche, grosse d’ici, grasse de là, le genou ne va pas, l’orteil, les dents."
Et puis il y a les remarques terriblement douloureuses à entendre, surtout lorsque l'on est en pleine construction. Comme ce jour où Helena Noguerra se rend avec sa mère à un rendez-vous avec la très célèbre agent de mannequins, Eileen Ford. Face à la jeune Belge, l'Américaine enchaîne les mots durs sur son physique : "Il faudrait refaire les dents", "Elle a la paupière un peu basse !", "Et de très grosses joues, il faudrait enlever les molaires" se souvenait Helena Noguerra. D'abord interdite face aux mots d'Eileen Ford, la maman de l'adolescente a finalement perdu ses nerfs : "Ma mère lui a dit : 'F*ck you, you understand ? f*ck you !' Et ma carrière chez Eline Ford s’est terminée ce jour-là !"
Helena Noguerra, une artiste engagée et féministe
Échaudée, Helena Noguerra a finalement trouvé sa voie, ou plutôt ses voies. D'abord dans la chanson dans les années 80, puis en tant que comédienne, sur petit et grand écran. Pour autant, son rôle de mannequin a marqué pendant longtemps son estime personnelle. Pas évident de se construire sur des bases aussi fragilisées. "Très longtemps, j’ai cru que j’étais un individu de qualité, et que j’obtenais les choses par mes qualités intrinsèques. Et maintenant je me rends compte que dans un monde géré par les hommes, j’avais accès aussi à des rendez-vous qui n’aboutissaient pas à des choses, à cause de la manière qu’avaient ces hommes-là de m’envisager... comme une possibilité de récréation" confiait-elle dans "Thé ou Café".
En grandissant dans le milieu du show business, Helena Noguerra a su appréhender les clichés autour de sa position de belle femme, et apprendre de ce qu'elle considère aujourd'hui des erreurs. Comme le fait de poser nue, qu'elle regrette aujourd'hui : "Parce qu'on est toujours réduites à notre corps. Notre liberté passe par notre corps. Quand Brigitte Bardot s’est mise nue, on a parlé de la libération de la femme (...) On s’objective nous-mêmes. Et puis une fois qu’on se met nues, on trouve qu’on redevient l’objet. C’est très difficile d’échapper à cette position qu’est toujours notre entrejambe, est le désir ou le non désir qu’elle suscite. Est-ce qu’on s’en cache ? Est-ce qu’on le montre ? J’ai refusé très longtemps de poser nue parce que j’avais la jeunesse, que je trouvais que c’était trop facile, trop évident, et que je n’avais pas trouvé autre chose de plus intéressant que cette beauté à exposer (…) À 40 ans j’ai voulu l’exposer en posant nue. Mais maintenant que j’en ai 47, je me dis ‘Mais en fait, à 40 ans j'en suis encore à me dire : ‘Je ne suis pas vieille, je ne suis pas périmée, je suis encore désirable !’ Donc je me remets encore à cet endroit de l’objet, du désir."
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"Tiraillée comme toutes les femmes" entre l'envie de se libérer des clichés sexistes, et la liberté d'être soi-même et d'agir selon ses propres choix, Helena Noguerra s'est jetée à corps perdu dans le militantisme. Comme sa soeur Lio, la comédienne n'hésite jamais à délivrer de puissants messages féministes, quitte à se dresser face à ses modèles d'enfant. Comme en 2018, lorsque Catherine Deneuve co-signait une pétition sur "la liberté d'importuner" dans le sillage, et à l'encontre, du mouvement MeToo. Déçue, Helena Noguerra s'était publiquement indignée. "Je trouvais que ce n’était pas le moment opportun. Quand la parole existe, il faut être un peu humble devant la cause et attendre pour s’exprimer. La guerre entre femmes, ça ne m’intéresse pas du tout. Taper sur les féministes ou la parole féminine. Je trouvais que la guerre qui s’est mise en route était exagérée, mais le moment n'était vraiment pas opportun" expliquait-elle en 2018 dans l’émission de Canal+.
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