Mélanie Laurent longtemps victime d’un violent bashing : "J’en ai souffert, je l’ai payé cher"

The 74th Cannes Film Festival - Screening of the film
Mélanie Laurent longtemps victime d’un violent bashing : "J’en ai souffert, je l’ai payé cher" - REUTERS/Reinhard Krause

Ce lundi 7 novembre 2022, France 3 diffuse "Inglourious Basterds", le film culte de Quentin Tarantino avec un casting cinq étoiles dont une Française : Mélanie Laurent. Si elle est parvenue à se faire une place de choix au sein de l’industrie française et américaine, l’actrice a traversé des moments de doutes, particulièrement éprouvants, sur fond d’un lynchage médiatique en bonne et due forme. Des années après, le traumatisme est toujours aussi vif.

Elle fait partie de celles que l’on ne présente plus. À 39 ans, Mélanie Laurent est une actrice connue et reconnue, et sa carrière déjà basée sur de nombreux succès sur grand écran. Engagée, passionnée et sensible, chacun de ses projets suscite toujours beaucoup d’intérêt, qu’elle soit devant ou derrière la caméra en tant que réalisatrice. Mais cette renommée s’est aussi construite dans la douleur. Car si bien des célébrités doivent composer avec de vives critiques à l’égard de ce qu’ils font ou ce qu’ils sont, Mélanie Laurent, elle, a longtemps été la cible d’une campagne de dénigrement intense et sans limites, l’inscrivant, sans que l’on ne sache plus vraiment pourquoi et selon qui, dans la liste des stars qui agacent le plus.

Vidéo. La Minute de Mélanie Laurent

Mélanie Laurent égocentrique ?

Si les contours de ce dénigrement public sont toujours aussi flous, c’est parce qu’il s’est d’abord joué sur Internet, royaume de l’anonymat. L’année 2014 marque un tournant. Sur Youtube, une vidéo baptisée "Mélanie Laurent - Compilation d’égocentrisme en interviews" dresse alors le portrait d’une comédienne suffisante, très sûre de son talent et de ses capacités. C’est en tout cas ce que le montage, composé de plusieurs bouts d’interviews décontextualisés, veut vous amener à penser. Le message est aussi limpide que grossier : Mélanie Laurent est terriblement égocentrique. Les réseaux sociaux s’emparent alors de la compile, et le phénomène prend une ampleur sans précédent. La comédienne semble alors condamnée à porter cette étiquette de diva égocentrique, alors même qu’aucun écho sur son comportement sur les plateaux de tournage ne vont dans ce sens. La machine Internet a fait son travail. Mais cela n’est évidemment pas sans conséquences. Si Mélanie Laurent a continué de briller sur grand écran, décrochant même un deuxième César en 2016, elle n’a rien oublié du bashing dont elle a été victime.

"J'en ai souffert à un moment mais je l'ai tellement cherché que je ne pouvais pas en vouloir aux gens. Mais j'ai mis du temps pour le comprendre, il fallait que je sorte de tout ça pour me remettre moi en question" déclarait-elle en 2018 dans les colonnes de Télérama. Avec du recul, Mélanie Laurent tente d’expliquer l’inexplicable férocité de ses haters par son omniprésence de l’époque : "La vidéo sur les réseaux sociaux était due à mon ultra-présence médiatique. Ce fut un concours de circonstances et je peux comprendre l'allergie que j'ai provoquée. Trop de choses que j'avais lancées ou acceptées sont sorties au même moment (…) Mon album de chansons avec Damien Rice, mon rôle de maîtresse de cérémonie à Cannes, et Respire, mon deuxième film en tant que réalisatrice." Pour autant, l’actrice dit avoir tout fait pour se protéger de la haine en ligne. À commencer par ne jamais regarder la fameuse vidéo Youtube. "Je l’ai payé cher. Tout le monde m'en parle depuis trois ans ! Pour avancer, je préfère garder mes oeillères" confiait-elle à Télérama, concédant qu’elle s’était sentie "blessée" que "personne ne prenne (sa) défense dans les médias". Mais Mélanie Laurent n’est pas dupe, et sait que derrière cette situation se cache un sexisme qui ne dit pas son nom : "Ce genre de bashing arrive rarement aux hommes."

"On nous laisse exister, mais on n’a pas le droit à l’erreur"

Depuis le temps qu’elle gravite dans l’univers (impitoyable) du septième art, Mélanie Laurent a cerné tous les rouages de l’industrie, et n’a jamais hésité à dénoncer le sexisme qui y fait rage. Comme en 2021, dans les colonnes de Femina : "Je crois en l’éco-féminisme. On oppresse autant la femme que l’on oppresse la nature. Il y a quelque chose dans la force de la nature et dans la force de la femme que l’on ne comprend pas et que l’on veut maîtriser. On détruit la nature en essayant de la dompter et on craint les femmes qui pensent, dirigent, rêvent, vivent. Dans bien des pays, le cauchemar n’est d’ailleurs pas fini pour elles. Et #MeToo n’a pas réglé le problème des violences sur les femmes et les enfants, qui ont explosé pendant le premier confinement. En revanche, dans le cinéma, on a réussi à s’imposer, à avoir de plus en plus de choix. Mais le mouvement féministe, qui a réussi à faire bouger ces lignes-là, ne doit jamais oublier ce qui se passe pour les autres" déclarait-elle avec conviction.

Vidéo. Mélanie Laurent mère "poussive", rares confidences sur ses enfants

Si elle s’estime chanceuse d’avoir pu mener à bien son métier de réalisatrice en France, nation où l’on laisse "éclore les réalisatrices à l’inverse d’autres pays", Mélanie Laurent dresse un bilan amer sur la place des femmes au sein de la profession : "La différence de salaire reste absurde, tout comme la position des noms sur une affiche de cinéma. La critique sur une femme qui réussit sera également plus dure. On nous laisse exister, mais on n’a pas le droit à l’erreur. Et il faut aussi être une bonne mère, à l’écoute de son mari… Il y a encore du boulot !" Justement, la comédienne sait de quoi elle parle. Maman d’une fille, Mila, et d’un garçon prénommé Léo, Mélanie Laurent prend "conscience de certaines réalités" aux côtés de ses enfants : "Je suis heureuse d’avoir une petite fille. Elle a du caractère, parle déjà beaucoup, mais son énergie n’a rien à voir avec celle des garçons de son âge. Elle peut rester impassible face à un gamin qui s’agite dans tous les sens devant elle. C’est amusant, finalement, comme c’est ancré en nous : les femmes gardent leur calme face à l’hystérie des hommes. Ce constat me fend le cœur car, quand les filles sortent du calme qu’on leur connaît depuis toujours, qu’elles osent bouger et porter leur voix, on essaie de les faire taire, de les anesthésier. Cela se joue dès le jardin d’enfants" analyse-t-elle, avant de se montrer plus optimiste pour l’avenir : "Mais, heureusement, il y a une nouvelle génération d’écologistes et de féministes. Le changement passera par eux."

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