Quand les codes vestimentaires au travail sont influencés par le sexisme d’autres femmes

Lisa, rédactrice vivant à New York, a débuté sa carrière il y a de nombreuses années ; elle a subi alors une discrimination de la part d’une autre femme.

Ok, c’est elle la chef mais pourquoi est-elle aussi sexiste ? (Photo: 20th Century Fox)

« Ma toute première chef m’a demandé de porter du rouge à lèvres » explique la rédactrice dont le nom a été changé.

« Elle m’a prise à part après le travail et m’a dit que j’avais mis du rouge à lèvres le jour de mon entretien d’embauche puis que j’avais cessé d’en mettre par la suite, en sous-entendant que j’aurais dû continuer à en utiliser. J’avais alors 23 ans mais j’en paraissais 15. C’était en 1998 et j’étais mal informée. Si une chose pareille se produisait aujourd’hui, cela aurait naturellement des conséquences. »

Mais apparemment c’est toujours d’actualité. On peut lire dans le Washington Post Magazine : « je suis chercheuse dans une firme très conservatrice. Ma chef m’a demandé de porter du maquillage et des chaussures à talons en présence des clients. Est-ce illégal, sachant que mes collègues masculins ne sont pas obligés d’en faire autant ? Comment évoquer ce problème avec ma chef ? J’ai été engagée pour mes travaux de recherche mais sa requête me laisse à penser que j’ai été engagée pour paraître jolie. »

Karla Miller lui a répondu que cette situation était compliquée sachant que « les employeurs avaient le droit d’imposer des codes vestimentaires. Mais ceux-ci ne doivent pas être inéquitables en termes de genre, de croyances, de races ou autres.

(Photo: ChinaFotoPress/Getty Images)

D’un autre côté, Miller a ajouté qu’en 2006, une cour fédérale avait défendu le dress code d’un casino qui demandait aux femmes de porter du maquillage et une coiffure sophistiquée. « La cour a alors dit que les codes vestimentaires pouvaient établir quelques distinctions basées sur le genre. La plaignante n’avait réussi à prouver que ces exigences étaient inéquitables. » écrit-elle. « Ainsi, les codes vestimentaires basés sur le genre ne sont pas nécessairement considérés comme discriminant. Tout dépend des faits, des preuves et de la cour. »

Ce genre de message provenant d’une chef est insultant. « Quelqu’un m’a dit un jour que je devais couper ma frange parce qu’elle était horrible. Et également que mon pantalon était froissé, ce qui était inacceptable. » « J’étais alors une guide de montagne proposant des randonnées à la journée dans le Wyoming. C’est incroyable que les femmes ne se soutiennent pas plus que ça. »

Une autre femme, cadre commerciale, qui s’identifie plus volontiers au genre masculin qu’au genre féminin en termes d’habillement, était alors vendeuse lorsqu’on lui a dit de « porter des ‘vêtements de femme’ tels que des jupes et du rouge à lèvres. » dit-elle. « On m’a dit que je n’aurais jamais de promotion sinon ». « Je suis désormais cadre dans l’entreprise et la personne qui m’a dit ça ne figure plus parmi nos effectifs. Rira bien qui rira la dernière… »

Une autre femme, travaillant dans le secteur des assurances, a eu une expérience similaire. « On m’a demandé de porter du maquillage et d’avoir les cheveux parfaitement coiffés parce que mon style hippie bohème n’était pas raccord avec le bureau. » dit-elle. « C’était il y a 10 ans. Devinez qui est toujours ici ? »

Il y a aussi cette écrivain vivant à Los Angeles et qui souhaite rester anonyme. « Lorsque je travaillais pour un certain magazine, ma chef, appelons-la Susan, était tirée à quatre épingles : robes tendance, stilettos, jolies coiffures et des tonnes de maquillage. Ceci eut des conséquences sur le personnel qui se mit à s’habiller de manière plus recherchée. « La mode, c’est pas vraiment mon truc, mais je me suis mise à porter de ravissants petits hauts, des jeans skinny, des bijoux d’oreille et des chaussures à talons hauts. Un jour, ma manager m’a conseillé ceci : « Susan raffole de ton sac vintage et de ta veste courte. Elle la préfère à ta veste longue. » J’étais abasourdie. Non, je ne serais peut-être pas la mieux habillée du bureau mais dans tous les cas, j’aurais l’air professionnel. Ma collègue portait un kimono au bureau et était encensée par notre chef parce que celui-ci provenait d’un designer. »

Ces commentaires sont restés gravés dans sa mémoire un bon moment.

« Ces remarques m’ont rendu parano et j’en ai déduit que j’avais été jugée pour mon style et non pour mon talent. » dit-elle. « Ceci a commencé à affecter mon travail et ma confiance en moi ; je n’ai pas mis longtemps à partir pour aller travailler dans une entreprise où j’ai enfin été jugée à ma juste valeur. »

Cette réaction est plutôt fréquente d’après la psychologue Barbara Greenberg, vivant dans le Connecticut. « Ceci peut rendre la salariée peu sûre d’elle et elle risque ainsi de se focaliser sur de mauvais objectifs. Sa productivité se détériorera sous l’effet de l’anxiété. » explique-t-elle à Yahoo Beauté.

Miller nous suggère de préférer une conversation sincère à un procès, après s’être assuré qu’on était dans son bon droit. « Vous pouvez alors demander de manière aussi neutre que possible pourquoi le maquillage et les talons sont essentiels pour elle. Vous pouvez ensuite conclure que vous ne trouvez pas ces accessoires particulièrement confortables et qu’ils risquent de vous distraire dans votre tâche. »

Greenberg ajoute que quelles que soient les motivations de ces propos, ceux-ci sont « très sexistes et servent à désarmer les femmes. » Elle ajoute que cette situation n’est pas surprenante sachant que 80 % des cas de harcèlement au travail émanent d’autres femmes. « Les femmes tendent à être très compétitives au travail. Mais les supérieures hiérarchiques devraient prendre en considération ce type de requêtes car leur comportement risque de les désavouer. »

Beth Greenfield
Rédactrice senior