Secrets de famille - Laurent : "Mon grand-père aurait eu honte que ça se sache. Ma mère m'a supplié de ne rien dire"
Laurent souhaitait faire un manuscrit pour rendre hommage à son grand-père décédé 10 ans plus tôt. En allant interroger des amis de la famille, il apprend le secret longtemps caché de son aïeul. Un fait qui l'a laissé sans voix.
Laurent découvre le secret de son grand-père à la faveur d’une conversation avec un ami de celui-ci : "Mon grand-père est décédé il y a 10 ans et je voulais faire comme un petit journal avec des textes et des photos pour lui rendre hommage et pour que les plus jeunes générations en apprennent plus sur lui. J’ai donc récupéré des photos auprès des personnes qui en avaient. Et j’ai rencontré des amis à lui, encore vivants, pour avoir quelques anecdotes inédites à raconter. J’avais fait quelque chose d’un peu similaire à son décès. Je ne veux pas que les anciens soient oubliés. Et je pense que c’est notre rôle de transmettre ces souvenirs là. En tout cas, j’ai changé la liste des personnes que je voulais voir. J’ai trouvé un voisin de chez mes arrières-grands-parents, un centenaire, qui a partagé quelques souvenirs d’enfance. Et puis un ami de l’armée. C’est lui qui m’a raconté que mon grand-père avait fait quelques mois de prison. J’en suis tombé de ma chaise. Je ne m’attendais pas du tout ça. Et surtout, je n’avais jamais entendu parler de ça. J’ai dû aller questionner ma mère sur son père et elle m’a avoué que c’était quelque chose qu’elle savait mais que tout le monde dans la famille avait décidé que ça n’avait pas eu lieu. C’était 6 mois pour vol parce qu’il s’était retrouvé embrigadé avec son groupe d’amis. Je n’ai jamais pu en savoir beaucoup plus."
"Il n'a tué ou n'a violé personne"
Laurent se retrouve confronté à un dilemme : "La question s’est posé de savoir si ce secret de famille devait mourir avec moi ou pas. Personnellement, je ne pense pas que ça soit un tabou. Il n’a tué ou n’a violé personne. Il était jeune et con et on lui avait vendu un "coup" facile pour mettre du beurre dans les épinards. C’est une erreur de jeunesse comme on dit. Et il a payé sa dette à la société aussi. Donc pour moi, ça ne servait à rien de le cacher plus longtemps. Je tâtonnais pour savoir comment l’aborder dans mon petit courrier à la famille et puis ma mère m’a supplié de ne pas en parler. Pour elle, son père avait honte de cette histoire et il aurait eu honte de savoir que ses petits-enfants et arrières-petits enfants étaient au courant. J’ai réfléchi quelques jours et j’ai accepté ça. J’ai gardé les notes que j’ai prises de cette "interview" où j’apprends cette histoire au cas où quelqu’un tombe dessus plus tard, mais j’ai décidé de respecter le souhait de mon grand-père. Je ne suis pas celui qui va éventer son secret."
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Pour Laurent, ces secrets sont quand même quelque chose de regrettable : "Je ne pense pas qu’une famille peut se sentir soudée si tout le monde réécrit l’histoire. Dans ce cas-là, on ne connait jamais vraiment personne et on n’a plus rien à se raconter et à se transmettre. Si tout le monde se refait une virginité après son décès, et même avant, alors ils n’existent plus vraiment. Moi je veux savoir si ma tante a fait une fausse couche avant de réussir à avoir son fils ou si mes grands-parents avaient du mal à boucler leurs fins de mois. Je pense que c’est important, pour les comprendre, pour les imaginer, de savoir tout ça. Une famille, ça va au-delà des dessins dans un arbre généalogique. En tout cas, c’est ce que je pense. Mais il faut croire que mes grands-parents et ma mère ne sont pas de cet avis. Ils ne veulent garder que ce qui donne une bonne image et ce qui, potentiellement, ne dérangera personne. Mais la vie c’est plus complexe que ça."
C’est pour cette raison que Laurent a commencé à écrire le récit de sa vie : "Je ne veux rien cacher, moi. J’ai des enfants et j’ai envie qu’ils sachent aussi qui j’ai été en tant que personne, en tant qu’homme. J’ai eu des doutes, je me suis posé des questions, j’ai eu des galères aussi. J’ai aussi eu des grands bonheurs, heureusement. Ils connaissent déjà une partie de ces histoires mais il y en a plein d’autres que je n’ai pas eu le temps, ou l’occasion, de leur raconter. Alors, je les écris. Je raconte aussi ce que je sais de notre famille. Quel genre de parents étaient leurs grands-parents, les souvenirs des fêtes de famille qu’on faisait quand j’étais petit, ce genre de choses. Le monde a tellement changé. Je pende que c’est important de garder une trace. Et ce n’est pas en cachant des choses aussi graves, aussi importantes, qu’on transmet vraiment une histoire. Alors je ne cache rien. Et tant pis si mes enfants lisent ce texte plus tard et qu’ils trouvent ça un peu impudique. J’aurais au moins été tout à fait honnête."
Certaines familles cachent des secrets qui peuvent avoir des conséquences sur plusieurs générations. Quels sont ces secrets ? Comment refont-ils surface ? Et enfin, quelles sont les conséquences que cela peut avoir sur les personnes qui les découvrent ? La série "Secrets de famille" revient sur cet épineux sujet du mensonge et de dissimulation au sein même des foyers.
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