"Subversive mais pas agressive" : la couverture de Paris Match sur Angèle fait polémique
En règle générale, faire la couverture d'un magazine est un honneur pour les célébrités, une marque de prestige. Mais tout dépend bien sûr des sujets qui sont traités à l'intérieur des pages en papier glacé. Sur la Une du dernier numéro de Paris Match, les lecteurs peuvent découvrir la chanteuse Angèle, toute de rose vêtue, avec la manchette suivante : "Subversive mais pas agressive". Une couverture jugée sexiste, qui provoque la colère des internautes.
Angèle, une chanteuse féministe ? La jeune belge l'a prouvé à plus d'une reprise, que ce soit à travers le morceau Balance ton quoi, son engagement auprès de l'organisation Nous Toutes, ou encore lors des nombreuses marches féministes qui ont eu lieu ces derniers mois. Il n'est donc pas surprenant de la voir présentée comme l'un des nouveaux visages de notre génération, chose faite par le magazine Paris Match en couverture du prochain numéro. Malheureusement, les mots comme la photo choisis font preuve au mieux d'une grave maladresse, et au pire d'une véritable forme de sexisme, et les lecteurs ne sont vraiment pas ravis.
Angèle, comme un ouragan https://t.co/JGjLrqrTmV pic.twitter.com/tUmCmFY9AE
— Paris Match (@ParisMatch) March 11, 2020
Une vision rose bonbon du féminisme
Cette couverture de Paris Match pose plusieurs problèmes. Outre le fait que le mot "féminisme" ne soit pas présent sur la Une, le magazine utilise un vocabulaire sexiste et réducteur. La jeune chanteuse y est qualifiée de "subversive" car elle n'hésite pas à donner son avis, que ce soit dans ses chansons ou lors de ses participations à des manifestations. Après tout, pourquoi pas. Subversif signifie en effet : "Qui renverse ou menace l'ordre établi", et l'objectif du féminisme est bien de modifier le système patriarcal actuel, largement considéré comme sexiste.
En revanche, le fait d'opposer "subversive" à "pas agressive" montre bien l'orientation "douce et féminine" que les opposants au féminisme préféreraient voir pour ce mouvement. Pas de slogans, de cris, de plaintes, pas d'actions ni de colère, mais des changements en douceur, sans brusquer ces messieurs. Car si certains hommes se présentent comme des alliés de la cause féministe, bon nombre d'entre eux restent très frileux à l'idée de certains changements. En outre, le terme “pas agressive” rappelle à bon nombre de femmes les nombreuses injonctions dont la gent féminine fait l’objet : “Sois souriante, ne t’énerve pas, ne contredis pas les hommes”, etc, etc.
Angèle est en colère contre Paris Match
Sans grande surprise, la principale intéressée n'a pas tardé à prendre la parole pour exprimer sa colère face à cette couverture qui sent bon le paternalisme. La chanteuse a mis les points sur les "i", et commence par préciser que la couverture utilise une photo qui ne date pas d'hier. "La photo date de 2018. Je ne l'avais jamais validée", précise-t-elle, avant d'énoncer : "Au-delà du fait qu'ils vendent cette photo en couverture sans mon consentement, en considérant que je n'ai pas mon mot à dire, ils rallient mon image, mon nom et toute une "génération" carrément, dans la case de : jeune fille (en rose) qui ose donner son avis (donc "subversive", il en faut peu hein), mais sans être agressive."
Le tout avant de conclure : "Oulala, heureusement que je ne fais pas partie de ces VILAINES féministes VIOLENTES et HYSTERIQUES. Parce que ok on l'ouvre, mais en restant jolies et polies, s'il vous plait, hein. Plus décrédibilisent et sexiste, tu meurs."
Les couvertures de magazines en ont-elles contre le féminisme ?
Au lendemain de la cérémonie polémique des César et des marches féministes, dont certaines se sont soldées par l'arrestation violente de plusieurs manifestantes, le féminisme est un sujet au coeur de l'actualité, un sujet qui fait vendre. Il n'est donc pas étonnant de voir certains magazines en profiter pour faire des ventes. Paris Match a pris le parti du féminisme "doux", un peu rêvé par le patriarcat, et où les femmes restent bienveillantes à l'égard des hommes, prenant le temps de les éduquer sans trop les brusquer, et sans demander de changements trop brutaux.
Le magazine Valeurs Actuelles, qui s'est illustré à plus d'une reprise pour son sexisme et son anti-féminisme, a pris une approche nettement plus virulente. Sur sa dernière Une, la publication titre : "Comment les féministes sont devenues folles", avec une manchette qui précise : "Elles censurent notre culture, insultent la police, fantasment le "patriarcat", s'assoient sur la présomption d'innocence, dégradent la langue française, préfèrent le foot féminin, demandent l'égalité aux WC, cassent l'ambiance en soirée..." Une liste de plaintes qui fait beaucoup rire les principales concernées tant ces reproches semblent puérils. Dans le numéro, le magazine s'en prend notamment à Virginie Despentes, Alice Coffin, Lauren Bastide, Caroline de Hass ou encore Anne-Cécile Mailfert, qualifiées de "harpies."
🔴[CETTE SEMAINE DANS VA]
➡️Comment les féministes sont devenues folles
🤐Elles censurent notre culture
🤯Fantasment le "patriarcat"
🧑⚖️S'assoient sur la présomption d’innocence
🤬 Dégradent la langue française
🥳 Cassent l'ambiance en soirée
Disponible : https://t.co/Ugsyrqk8Pb pic.twitter.com/IaGUWQmoUY— Valeurs actuelles ن (@Valeurs) March 12, 2020
Ce n'est d'ailleurs pas la première fois que Valeurs Actuelles s'en prend au féminisme et à ses représentantes. En mai dernier, le magazine avait épinglé une dizaine de féministes connues sur les réseaux sociaux dans leur numéro consacré à "la nouvelle terreur féministe", qui reprochait aux femmes de réclamer... La parité. Rien que ça.
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