Burn out amoureux : "J'ai porté notre relation à bout de bras et suis tombé en épuisement total à 28 ans"
Ces témoins ont beaucoup donné pour faire fonctionner leur couple, jusqu'à étouffer leurs frustrations et états d'âme. Ils ont été déçus, découragés, épuisés, quand leur corps ne s'est pas carrément retrouvé à l'arrêt forcé. En bref, ils ont fait un burn out amoureux, un état à prendre très au sérieux.
William* a souffert d'un manque de considération récurrent de la part de sa petite amie d'il y a 5 ans. Une femme qui avait tendance à fuir toutes les responsabilités. "J'étais compréhensif, car c'est quelqu'un qui a eu des parents très instables voire irresponsables. Je l'aidais pour trouver du travail, pour ses rendez-vous médicaux, je fermais les yeux sur les fois où elle ne répondait pas à mes messages, où elle se laissait draguer par d'autres, ou sur ses promesses non tenues... Mais en échange, je n'avais pas grand chose malgré mes appels du pied : c'est souvent moi qui me déplaçais jusqu'à chez elle, qui nous portais à bout de bras. J'ai supporté cela deux ans, puis j'ai commencé à avoir de gros problèmes digestifs, un manque d'énergie dans les muscles, des insomnies et à perdre complètement confiance en moi. Et enfin, je suis tombé en épuisement total, au point de devoir arrêter de travailler. À seulement 28 ans".
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Le burn out amoureux impacterait plus de deux couples sur trois
Olivia* a longtemps été en couple avec un homme qui "adorait les conflits" et se montrait très nonchalant dans leur relation : "Il mentait sur tous les sujets même les plus basiques, cherchait des histoires pour tout et rien, me faisait attendre longtemps quand on avait rendez-vous, et ne s'apprêtait jamais pour moi : pas de parfum, toujours en short, pas rasé etc, alors qu'il le faisait pour ses amis". Les efforts et les tentatives de communication pour sauver son couple étaient à sens unique. Se sentant négligée, la jeune femme a fini par développer des troubles anxieux, jusqu'à ne plus se reconnaître : "J'étais nerveuse limite exécrable, je perdais l'appétit, je dormais en journée mais plus la nuit car je cogitais".
Pour tomber en burn out amoureux, nul besoin de découvrir une énorme trahison ou de subir un choc émotionnel important au sein de son couple. "Cela peut se produire à cause de la répétition de petits refus, de demandes déraisonnables, de petites choses qui deviennent blessantes", explique François St-Père, psychologue spécialisé en thérapie de couple. Une accumulation de frustrations, qui toucherait plus de deux couples sur trois. Le résultat d'un idéal inatteignable ? Si on a plus d'attentes envers le couple qu'il y a 50 ans, considérer que celles-ci sont trop élevées serait faux et culpabilisant selon l'auteur du livre Le burn out amoureux. "Le problème est surtout le décalage entre les attentes de l'un et la capacité de l'autre à y répondre. Elles pourraient être perçues comme normales avec un autre partenaire qui serait en mesure d'y répondre naturellement".
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Malheureux, lessivés, mais incapables de partir
Encore faut-il accepter de quitter une relation pour une autre, plus nourrissante. Et c'est bien souvent parce que l'on est tiraillé et incapable de trancher dans le vif que le burn out amoureux apparaît : "C'est un état d'ambivalence où les gens ne sont plus en état de poursuivre la relation tellement ils sont malheureux, mais en même temps pas en mesure de conclure une séparation. Cela peut perdurer pendant des semaines ou des mois", explique le spécialiste. Pour éviter une rupture qui les fait paniquer, certains vont préférer "croire qu'ils ne sont pas si malheureux, qu'ils sont trop exigeants et garder espoir que cela puisse changer". Au point parfois de faire l'autruche en attribuant leurs souffrances à leur travail par exemple. D'où une tendance probable au surdiagnostic des burn out professionnels. "Ils résistent à réaliser que c'est principalement à cause de leur relation, car se séparer est l'un des événements les plus bouleversants dans une vie d'adulte".
L'arrivée d'un enfant fait parfois chuter spectaculairement le niveau de satisfaction conjugale, révélant des déséquilibres et des manques. C'est le cas pour 7 femmes sur 10 selon les recherches du psychologue américain John Gottman : "Au fur et à mesure, c'est moi qui me suis retrouvée à gérer la majeure partie du quotidien, le fameux tunnel du soir bain-dîner-coucher, les week-ends et toute la charge mentale associée", explique Charlotte*, qui ne prenait plus soin d'elle."Que ce soit pour des déménagements ou une décision parentale ou autre chose d'un peu structurant, si je n'amenais pas le sujet, il ne se passait rien. Alors oui, mon ex assurait quand il s'occupait de sa fille ou quand je lui demandais de faire quelque chose, mais il ne prenait aucune initiative". Quand les mises en garde ont l'effet de coups d'épée dans l'eau, l'énergie finit par s'amenuiser. Et l'espoir avec.
Le couple requiert aussi du travail
Personne ne serait à l'abri d'un burn out amoureux selon François St-Père. La faute à une tendance générale à négliger le couple, que l'on imagine à tort comme "une entité qui doit s'entretenir par elle même". Les femmes seraient a priori plus enclines à développer ce genre de syndrome, ou en tous les cas à oser en parler à leurs proches. Les hommes, de leur côté, se confient moins et "vivent leur détresse de façon plus isolée, ce qui peut être encore plus douloureux". Une chose est sûre, "une fois le burn out révélé, le statu quo est très peu envisageable".
Pour sauver le couple, il s'agira alors de travailler urgemment sur la relation, idéalement en thérapie de couple. "Apprendre à mieux communiquer, gérer les souffrances individuelles, pardonner certaines blessures du passé ou encore porter son attention sur ce que l'autre fait de bien", font partie des quelques clés à tester avant d'envisager la séparation.
*Les prénoms des témoins ont été modifiés