Ces jeunes (végans ou non) qui sont contre le principe des animaux de compagnie

Ils ont parfois grandi auprès d'un chat ou d'un chien auquel ils étaient très attachés, mais sont aujourd'hui contre le fait de “posséder” un être vivant chez soi. Rencontre avec ces jeunes, - végans (mais pas que) -, pour lesquels le principe même d'animal de compagnie est dérangeant.

Crédit Getty
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Si beaucoup d'entre nous se disent contre la présence d'animaux en appartement où ils restent enfermés entre quatre murs, d'autres vont beaucoup plus loin. Chats, chiens, lapins et autres êtres vivants n'auraient selon eux pas grand chose à faire chez les humains. Et n'auraient pas vocation non plus à les divertir ou à les sortir de leur solitude. “Pour moi, vouloir posséder à la manière d'un objet ce qui n'en est pas est dissonant. Le vivant, à mon sens, ne peut pas être acquis”, affirme Fanny, végane toulousaine de 33 ans.

Critique du business (juteux) des animaux de compagnie

La jeune femme n'a rien contre l'idée de recueillir un animal victime “d'un élevage intensif, d'un abandon – (ndlr : 100 000 animaux sont abandonnés chaque année en France) -, d'une maltraitance” si elle peut lui offrir des conditions de vie agréables. Bien au contraire. Mais elle déplore le commerce qui s'est développé autour des animaux, qui relève à ses yeux dans certains cas de la catastrophe écologique. “Je pense aux NAC, nouveaux animaux de compagnie comme les reptiles, les rongeurs etc dont certaines espèces peuvent être sérieusement menacées. Sans parler des conditions dans lesquelles ces animaux sont transportés puis exposés”.

Certaines espèces sont juste créées pour être mignonnes. Comme les bouledogues français qui sont volontairement reproduits pour qu'ils aient des petites pattes à l'arrière et fassent d'amusants bruits de cochon

Orlando, végétarien trentenaire résidant en île-de-France abonde en son sens. Ce grand voyageur est toujours choqué lorsqu'il passe par hasard devant une animalerie, et en découvre les vitrines “remplies d'espèces pensées pour plaire aux Hommes”. “Certaines sont juste créées pour être mignonnes. Comme les bouledogues français qui sont volontairement reproduits pour qu'ils aient des petites pattes à l'arrière et fassent d'amusants bruits de cochon”. Dans les commerces, les animaux de compagnie sont des produits marketing comme les autres, voués à susciter l'achat coup de coeur. A titre d'exemple, on sait grâce à une enquête IPSOS pour SantéVet, que les chats sont principalement achetés sur le critère de leur apparence.

Même si on pense bien faire, on ne peut jamais être sûr qu'un animal est heureux

Le business des animaux de compagnie est juteux, le marché représentant plusieurs millions d’euros de chiffre d’affaires annuel et augmentant d'année en année. Il faut dire que les dépenses post-achat (ou recueillement) de l'animal sont aussi très nombreuses : “les études montrent une augmentation des dépenses pour les animaux de compagnie depuis plusieurs décennies. Ce sont les dépenses d'alimentation qui constituent la plus grande partie, suivies de près par les dépenses de santé, qui ont vraiment explosé ces dernières années”, détaille Jérôme Michalon, chargé de Recherche au CNRS et spécialiste des relations humains/animaux. Preuve parmi bien d'autres que “les animaux de compagnie ont toujours été à la fois des produits marketing et des individus choyés”.

On peut penser que notre animal est heureux alors que pas du tout. Qu'un poney qui va se trimballer cinq mioches sur le dos toute la journée est content de le faire. Et donner du chocolat à un chien en pensant lui faire plaisir, alors que le chocolat est toxique pour lui

Sauf que pour certains réfractaires au concept d'animal de compagnie, ce soin porté aux animaux est au mieux maladroit, et au pire complètement biaisé par notre regard d'humain. “On a tendance à confondre les pratiques et émotions humaines avec celles des animaux”, déplore ainsi Leïla, Parisienne de 30 ans. “On peut penser que notre animal est heureux alors que pas du tout. Qu'un poney qui va se trimballer cinq mioches sur le dos toute la journée est content de le faire. Et donner du chocolat à un chien en pensant lui faire plaisir, alors que le chocolat est toxique pour lui”.

Mouvement pour la libération animale

Après avoir grandi à la campagne avec le chien de la famille, Bastien, devenu entre temps flexitarien, a développé la même réflexion. Même si le chien en question pouvait gambader dans leur grand jardin, rien n'assure selon lui qu'il y ait été vraiment bien. “Pourrait-on nous contenter en tant qu'humain d'un espace dont on connait tous les recoins, sans n'avoir jamais pu tenter de voir autre chose ? Aimerait-on être attachés à une laisse ?”, interroge celui qui pense que “posséder un animal de compagnie est une forme d'emprisonnement”. D'autant plus que le temps passé par un “propriétaire” à s'occuper de son chien ou de son chat est à ses yeux bien insuffisant. En moyenne 7,5 heures seraient consacrées aux chiens par semaine et seulement 5,2 heures aux chats selon l'enquête d'IPSOS. “Ce sujet est tabou dans notre entourage. Personne ne veut voir la réalité en face”, s'indigne Bastien qui réclame que l'on considère les animaux comme nos égaux.

Bien que “les critiques de l'utilisation des animaux pour l'homme ont émergé avec la protection animale au cours du XIXème siècle, elles épargnaient jusqu'à très récemment l'animal de compagnie”

Si ses réflexions ne trouvent que peu d'échos autour de lui, c'est peut-être tout simplement car elles sont neuves. Bien que “les critiques de l'utilisation des animaux pour l'homme ont émergé avec la protection animale au cours du XIXème siècle”, elles “épargnaient jusqu'à très récemment l'animal de compagnie”, explique Jérôme Michalon. Et pour cause, on le considérait comme “privilégié”, car “on ne le tue pas pour notre consommation, on ne le fait pas travailler et on l'entoure d'affection”. “Mais avec la diffusion de l'antispécisme, des idées de libération animale par exemple, les interactions entre humains et animaux […] sont dénoncées lorsque l'on estime que la volonté de l'animal n'est pas assez prise en compte””.

“S'ajoute à cela la prise de conscience de problèmes de bien être (obésité, manque d'activité physique, peu de contacts avec des congénères) que les vétérinaires constatent de plus en plus”. Les réfractaires à la marchandisation et à la servitude des animaux de compagnie attendent à cet égard des actes forts. A commencer par l'interdiction de la vente des animaux d'élevage dans les animaleries, qui inciterait à se tourner vers les refuges pour adopter.

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