Infertiles - Ali : "C’est tombé comme un couperet. Mon amoureux a pleuré pour moi"
Après 5 ans de relation, Ali s'est décidée à devenir mère. Une vraie joie pour son compagnon qui rêve de devenir père depuis de nombreuses années. Après avoir arrêté la pilule, la trentenaire pensait tomber enceinte plus ou moins rapidement. Les mois passent et Ali n'est toujours pas enceinte. Angoissée à l'idée que le problème ne "vienne d'elle", elle se décide à consulter. C'est là que le diagnostic tombe.
Ali a 34 ans et est en couple depuis 5 ans quand elle décide qu’elle est désormais prête à faire un enfant : "Avant ça, je savais que j’en voulais mais je ne voyais pas comment ça pouvait se faire. L’appartement était trop petit, je ne me sentais pas bien dans mon travail, ou alors c’est le travail de mon mec qui ne se passait pas bien. C’est arrivé aussi que ça aille trop bien pour que je veuille bousculer tout ça avec un bébé. J’ai eu un été en particulier où je me sentais super bien dans ma peau et je n’avais aucune envie de vivre les bouleversements que vivent les femmes quand elles font un enfant. Je savais que mon mec en avait envie et qu’il attendait que je me sente prête. Finalement c’est pendant ma soirée d’anniversaire, pour mes 34 ans, que je lui ai dit que c’était bon, qu’on allait le faire. Il était tellement heureux. J’étais sûre d’avoir pris la bonne décision."
"J'avais hâte d'essayer de tomber enceinte"
Ali prend rendez-vous avec son médecin traitant pour faire un point sur sa santé : "C’était important pour moi de voir mon médecin avant d’arrêter ma pilule. On a fait le point sur ce que je devais surveiller, il m’a donné des compléments alimentaires que je devais prendre pendant au moins un mois avant d’arrêter ma pilule. Avec la plaquette encore en cours, ça nous faisait environ un mois et demi avant l’arrêt et deux mois avant une possible prochaine ovulation. Après avoir attendu aussi longtemps, ça m’a paru long. Je me suis rendu compte que je le voulais tout de suite, ce bébé. Mais j’ai bien suivi les instructions. J’ai pris mes petites gélules, j’ai attendu pour arrêter la pilule. Ce jour là, ça a été une fête. J’étais assez émue. Ça faisait 15 ans que je prenais la pilule, ce n’est pas rien. J’avais hâte d’essayer de tomber enceinte même si je savais qu’il fallait plusieurs semaines. Mais à ce moment-là, on faisait quand même l’amour tout le temps. Et à chaque fois, après, je me disais que ça avait peut-être été la bonne. Ce n’était pas très réfléchi, c’était un sentiment, je voulais si fort que ça marche."
"J'avais le sentiment que le problème venait de moi"
Après 6 mois d’essais infructueux, Ali revoit son médecin : "Il m’a dit que ce n’était pas si étonnant à mon âge et qu’il fallait continuer à essayer. Il m’a conseillé d’acheter des tests d’ovulation pour surveiller les moments propices. Ce que j’ai fait. Mais les résultats des tests n’étaient jamais clairs. Je suis retourné le voir deux mois plus tard, complètement perdue. J’y pensais tout le temps, je ne supportais plus de voir une femme enceinte dans la rue. C’était au printemps, et on voyait beaucoup de femmes enceintes dehors avec des petites robes. Je ne pouvais pas m’empêcher de fixer leurs ventres. Je pleurais seule chez moi. Je n’arrivais pas à en parler à mon amoureux. Je ne voulais pas lui faire de mal et j’avais le sentiment très fort que le problème venait de moi. Je n’en dormais plus la nuit. J’étais obsédée par ça. Je me suis pourri la santé. Et en même temps, je culpabilisais parce que je savais que ça ne marcherait jamais si je n’allais pas bien. J’étais perdue dans un véritable cercle vicieux."
"Une malformation de l'utérus"
Après des tests plus poussés, Ali a la confirmation que l’infertilité vient bien d’elle : "J’ai appris que j’avais une malformation de l’utérus et que c’était très improbable que je réussisse à tomber enceinte et à garder le bébé. C’est tombé comme un couperet. Et de toutes les raisons auxquelles j’ai pensé, je n’avais pas imaginé ça. Je n’ai pas pleuré quand je l’ai appris. Mon amoureux a pleuré mais pas moi. Le soir, j’ai super bien dormi. Je savais enfin ce que j’avais et je savais ce qui allait se passer ensuite. Le deuil de ma maternité a été très facile. Plus facile que pour mon amoureux, qui rêvait d’avoir un enfant avec moi. J’ai été anesthésiée pendant un moment. Je ne ressentais plus la joie, je n’étais plus jamais heureuse et plus jamais triste non plus. Et un jour, ça avait disparu. J’avais accepté. Je n’ai jamais repris la pilule. J’ai hésité par habitude et pour marquer le coup de la différence entre la période où on essayait et cette nouvelle période mais finalement j’ai préféré ne pas reprendre. J’ai pensé que c’était meilleur pour ma santé. Ça m’arrive encore d’avoir des pincements au coeur quand j’entends parler d’une future naissance autour de moi mais ça n’a rien à voir avec le moment où on essayait et où j’étais désespérée. Je me suis apaisée."
15 à 25% des couples sont concernés par l’infertilité en France d'après les données de l'Enquête nationale périnatale (ENP) et de l'Observatoire épidémiologique de la fertilité en France (Obseff). Et ces chiffres ne font qu’augmenter en raison de plusieurs facteurs dont le recul de l’âge de la maternité. Ce sujet encore tabou mérite tout de même d’être exploré. Comment vit-on l’infertilité quand elle est subie ? C’est la question que nous avons décidé de poser à des femmes confrontées au problème.