"Je n’ai pas honte de ce qui m'est arrivé" : Sophie Fontanel se livre sur le viol dont elle a été victime

La journaliste et écrivaine Sophie Fontanel a écrit "Capitale de la douceur" (éd. Seghers), un ouvrage tout en vers dans lequel elle offre une bouleversante mise à nu.

La capitale de la douceur existe. C’est une petite île de la Méditerrannée. Sur 5% de sa superficie, on peut y vivre nu. Les 95% restants sont occupés par l'armée pour des tests de missiles. Sophie Fontanel y a passé 6 jours, nue. Dans son roman "Capitale de la douceur" (éd. Seghers), l’écrivaine analyse l’expérience de la nudité et tente de démêler un mystère : pourquoi sa vulnérabilité est à ce point exacerbée ? C’est dans cet écrin de douceur, encerclé par la rudesse de la guerre, que Sophie Fontanel "a osé revenir" sur son viol à l’âge de 15 ans.

"J’ai osé revenir sur un moment de ma vie où j’ai été nue, aussi, quand j’étais adolescente. J’avais suivi un garçon, j’avais très envie de le suivre, mais je ne savais pas ce qui allait se passer. Quand j’ai voulu partir, je ne pouvais pas."

"J’ai seize ou quinze ans"

C’est en vers que la journaliste confie cet événement traumatique. Elle a "seize ou quinze ans", elle défie l’autorité parentale. Au moyen d’un mensonge, l'adolescente sort en boîte de nuit et rencontre un Mexicain. Quelques jours plus tard, c’est son innocence à elle que l’on défie. Son prédateur abuse de ruse pour la piéger dans une chambre d’hôtel.

"Il me met sur le dos moi je me laisse faire"

"Je ne sais pas ce qui a démarré

Je suis un bébé, je commence à pleurer"

C'est avec cette pudeur que Sophie Fontanel décrit le viol dont elle a été victime.

"En plus de ça, la pratique sexuelle, que j’ai enterrée dans mon esprit pendant des années, était incroyablement violente, a généré une blessure irrémédiable.".

Une barbarie qui la fera saigner des jours durant. "C’est une blessure anale", lui révèlera le gynécologue.

Vidéo. "J'ai dit non, je ne balancerai pas un porc"

"On a tué ma vie sexuelle, pas ma douceur"

"Quelqu’un m’avait ouverte en deux si ahurissante que soit cette vision" écrit-elle. Et c’est dans ce corps entaillé, dans ses tripes, que Sophie Fontanel est allée rechercher sa douceur, son arme à elle.

Car le sentiment de vengeance, elle ne le ressent pas. "Ma douceur pouvait ressembler à une incohérence", concède-t-elle. C’est en réalité la solution qu’elle a trouvée pour ne pas sombrer.

Son livre, comme elle le précise, ne sert pas à raconter le viol. C'est une démonstration de la victoire de la douceur sur la violence. Si un homme a bafoué sa candeur, Sophie Fontanel a toujours refusé de lui concéder sa douceur et son amour pour l'être humain. L'homme ? Elle ne le hait pas. Même lui, l'agresseur, elle ne le déteste pas.

"Je n’ai jamais voulu "dénoncer". J’ai toujours voulu "énoncer". Mais qu’est-ce que c’est difficile d’énoncer. J’ai presque 60 ans et j’arrive seulement à le dire parce que j’attendais de pouvoir le dire avec de la tendresse.".

Si elle a attendu aussi longtemps avant d'énoncer, c'est pour faire passer un message : la tendresse n'est pas une défaite.

"Faire comprendre aux hommes qu’ils ont une capitale de la douceur"

La douceur de sa prose fait rejaillir une vérité : la vengeance ne règle pas tous les maux. Avec son roman, Sophie Fontanel invite les hommes à chercher "leur capitale de la douceur" et suggère aux femmes de les aider.

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