Nous avons rencontré des "tradwives", fières d'être femmes au foyer et dévouées à leur conjoint
À contre-courant des combats féministes actuels, elles ont décidé de devenir de parfaites petites femmes d'intérieur et des épouses irréprochables pour leurs maris. Nous avons rencontré ces tradwives, abréviation de “traditionnal wives”, qui pour certaines trouvent leur inspiration dans les mœurs et l'imagerie des années 50.
Ex-directrice clientèle, Eve était il y a encore deux ans une jeune femme aux dents longues, en quête de nouvelles responsabilités professionnelles. Mais son mariage et l'arrivée de son petit garçon l'ont métamorphosée. “J'ai réalise que le plus important pour moi était la famille. J'aurais vécu comme un sacrifice de continuer à travailler”. Après son congé maternité, Eve a tout simplement décidé de laisser tomber sa carrière pour devenir “responsable de sa propre maison”. Et si la Parisienne se reconnaît dans le mouvement “trad wife”, c'est qu'elle assume pleinement se plier en quatre pour son mari, et se fondre dans le rôle traditionnellement assigné aux femmes, dont nombre d'entre elles cherchent à s'extirper.
Être aux petits soins pour son mari, une ambition comme une autre ?
“Sachant que c'est un confort pour moi d'être à la maison, je trouve légitime de prendre soin de mon mari. Je veux qu'il se sente bien chez lui”. Au moment où il s'apprête à rentrer du travail, Eve s'active pour que tout soit parfait. “En plus de faire en sorte que le repas soit déjà sur la table, je range, j'allume une bougie parfumée, puis je me remaquille, me coiffe et enfile une tenue qu'il aime”. Eve vit avec une petite pression, celle de faire aussi bien que la mère de son mari, qui a toujours “été aux petits soins pour lui”, mais aussi de faire en sorte qu'il “n'envie jamais ses amis”.
En échange, la jeune femme apprécie d'être valorisée, et que son homme lui dise “qu'elle est une bonne épouse”, “la meilleure femme qu'il aurait pu avoir”, comme cela arrive parfois. Autour d'elle, ce choix de vie a plutôt suscité l'interrogation. Eve a dû expliquer à plusieurs personnes qu'il ne lui avait pas été imposé, et qu'elle se sentait plus heureuse ainsi. “Le problème de cette société moderne est qu'elle nie le droit, le choix et le désir que certaines femmes peuvent éprouver à se consacrer uniquement à leur foyer et à leur famille […] beaucoup de femmes sont culpabilisées, dénigrées, méprisées, et se sentent obligées malgré leur désir profond de se lancer dans une carrière professionnelle ou dans de longues études, alors que cela ne correspond pas du tout à leurs aspirations”, explique à ce sujet Virginie Vota, chroniqueuse politique et philosophique, dans sa vidéo Tradwife, éloge de la féminité.
Nostalgie d'une époque très genrée
C'est aussi ce qu'a réalisé Jade, une Australienne de 27 ans, peu de temps après avoir entamé ses études d'éducatrice : “Je sentais que je n'avais pas assez de temps pour investir ma maison et ce sentiment a grandi une fois que mon mari et moi étions mariés. J'ai commencé à cocooner, d'abord pour guérir un stress post-traumatique. Et au fil du temps, je suis tombée amoureuse de ce style de vie”. C'est à ce moment que la jeune femme a découvert le mouvement tradwives “accidentellement” sur internet. Elle s'est mise à visionner les vidéos de Mrs Midwest, dont la chaîne créée en 2019 se veut destinée “aux femmes à la féminité traditionnelle essayant de trouver leur place dans ce monde moderne”.
Puis a tapé le hashtag #tradwife sur Instagram, sous lequel on dénombre à ce jour plus de 17 000 publications, et s'est abonnée à plusieurs comptes. Ce qui l'a séduite avant tout ? L'image de femmes “épanouies vivant dans la simplicité”. “C'était comme trouver la communauté de femmes que j'avais toujours cherchée”.
Jade a alors embrassé la tendance jusque dans ses choix vestimentaires. Sur Instagram, elle poste régulièrement des photos d'elle en train de pendre le linge, d'accrocher son tablier de cuisine, de cirer le parquet, le tout dans de jolies robes vintage à motifs. Des photos visiblement étudiées et mises en scène qui sont la vitrine d'un quotidien minutieusement orchestré. “Ma journée commence vers 6h du matin. Je me douche et me prépare. Je range la vaisselle de la veille, puis je nettoie les comptoirs et tout autre meuble qui doit être dépoussiéré ou désinfecté. Et ensuite, je m'occupe des tâches quotidiennes que je me suis fixées ce jour-là. Le mercredi, c'est par exemple ma journée de lessive”.
Une tendance néo-tradi très virale
Si elle se fait un devoir de tenir parfaitement son foyer, Jade bichonne aussi son mari, à qui elle tient surtout à apporter un “soutien émotionnel” : “Je fais tout à la maison pour que son environnement soit sans stress”. Et elle respecte aussi l'un des préceptes controversés des tradwives les plus acharnées. “Je l'écoute et le laisse parler sans interruption pour qu'il se sente entendu”.
Une forme de soumission ? “Il ne s'agit en aucun cas d'obéir à un tyran aveuglément et d'être brimée, maltraitée, atrophier son potentiel et sa personnalité”, défend à ce sujet Virginie Vota dans sa vidéo postée sur YouTube. “C'est reconnaître l'homme comme étant le chef de la famille et donc user de ses talents et capacités pour le servir, de la même manière que l'homme est au service de sa femme en allant travailler, en subvenant à tous les besoins matériels du foyer. Et même par la reconnaissance et la fierté qu'il éprouve envers sa femme”.
Complètement dissonante dans la société actuelle, cette tendance néo-tradi née aux États-unis prend de l'ampleur au Brésil et au Japon, mais aussi au Royaume-Uni et en Allemagne. Le tout en grande partie grâce au talent de tradwives bien dans leur époque lorsqu'il s'agit d'utiliser les réseaux sociaux.
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