"J'ai 23 ans, et j'ai rencontré l'amour grâce à une agence matrimoniale"
À 20 ou 30 ans, ces jeunes préfèrent se tourner vers des agences matrimoniales pour trouver l'amour, que de passer par les applications et sites de rencontres. Déceptions en cascades sur internet, besoin d'écoute et de conseils personnalisés etc. Nous avons tenté de comprendre pourquoi ils sont prêts à payer, parfois cher, pour ce service.
Les agences matrimoniales n'ont plus vraiment vocation à marier
Après moult déceptions sentimentales par le passé, Doria*, une Brestoise de 23 ans, file le parfait amour depuis plusieurs semaines. Cette nouvelle rencontre, elle la doit à une démarche très singulière pour une jeune femme de son âge : son inscription à une agence matrimoniale. La vingtenaire n'a pas spécialement été repoussée par l'aspect financier du service, - “Un moment donné pour être heureux dans la vie, il faut faire des sacrifices !”-, ni par son image poussiéreuse. Contrairement à ce que leur appellation indique, les agences matrimoniales n'ont d’ailleurs aujourd'hui plus directement vocation à marier, mais plutôt à permettre aux inscrits de nouer des relations sérieuses et durables, quel que soit leur âge. Et si on pouvait les croire dépassées, voire has been, il semblerait qu'elles soient de nouveau plébiscitées. Chaque année, plus de 100.000 célibataires s'y inscriraient, et le nombre d'agences serait en progression constante.
“Les personnes mal intentionnées comme les pervers narcissiques ne vont pas payer d'honoraires avec le risque de se faire débusquer, elles vont s'exclure d'elles-mêmes des agences matrimoniales”
Béatrice Paul, responsable de l'agence de rencontres L'Oasis à Quimper, affirme y accueillir de plus en plus de jeunes. Après un premier date avec avec un jeune homme “gentil et très poli”, mais avec lequel elle n'a pas eu le coup de cœur, Doria y a rencontré Gaël*, jugé compatible avec elle. “Je voulais un homme de confiance et lui souhaitait une fille calme comme moi. Quand j'ai reçu son message à la fin du confinement, j'étais très contente. Au moment de la rencontre, je l'ai trouvé tout de suite très charmant, d'autant plus qu'il est venu avec des fleurs”. Preuve à ses yeux de sa volonté de vivre une histoire d'amour sincère.
Ne plus être qu'un numéro comme sur les sites internet
Contrairement aux applications et sites de rencontres, toute personne passant par une agence matrimoniale sérieuse voit en effet son identité et sa situation vérifiées. “Chez nous, on vérifie la situation, l'âge, l'état civil, la profession et/ou les revenus, justificatifs à l'appui. On reçoit les personnes en entretien d'une heure et vérifie la cohérence du profil”, corrobore Gilbert Andrianne, directeur du réseau Harmonie, agences implantées dans le Grand-Est.
Le tarif d'une telle démarche, 1200€ en moyenne minimum pour un accompagnement d'un an selon nos estimations, agit également comme un filtre. “Les personnes mal intentionnées comme les pervers narcissiques ne vont pas payer d'honoraires avec le risque de se faire débusquer, elles vont s'exclure d'elles-mêmes”. D'autant plus que les agences matrimoniales assurent généralement un suivi après les rendez-vous. Un encadrement personnalisé que convoitent de nombreux clients, soucieux de ne pas être qu'un numéro. 60 % des Français estiment d'ailleurs que les agences matrimoniales prennent le temps d’écouter et 57 % qu’elles favorisent le contact humain et personnel, selon un sondage Opinion Way pour Unicis réalisé en 2016.
Quand les parents conseillent l'agence matrimoniale à leur enfant
Des “garanties” qui ont beaucoup rassuré Doria, très échaudée par son expérience sur les sites internet de rencontres. “Je recevais tout le temps des messages parlant de sexe, et cela commençait à me peser. J'ai aussi discuté deux semaines avec un homme qui a fini par me dire qu'il était marié. Sans oublier tous ces hommes avec lesquels je discutais un mois, deux mois trois mois et qui disparaissaient quand la rencontre arrivait. Bref, étant une fille fragile qui s'attache facilement, j'étais tout le temps blessée”. Après cinq années de recherches sur la toile, la Bretonne a fini “vraiment découragée”, et a décidé de rester seule. Jusqu'à ce que sa maman ne lui conseille d'essayer l'agence matrimoniale, après avoir lu des articles dans la presse.
Les jeunes ont moins de complexe que leurs aînés à se lancer dans l'aventure. Ils sont nés dans une société de services, sont habitués à des services pour trouver logement, travail, formations, services juridiques etc, et l'agence matrimoniale est un service comme un autre
Une situation qu'a déjà observée Gilbert Andrianne de Harmonie. L'agence de l'est de la France communique beaucoup sur ses services via la presse quotidienne régionale, peu lue par les jeunes. Alors il n'est pas rare que les parents lecteurs soufflent l'idée à leur enfant. Le bouche à oreille aussi s'avère efficace. “J'ai rencontré une fille de 22 ans intéressée par nos services, qui était accompagnée de sa sœur de 20 ans, qui elle ne souhaitait pas s'inscrire. Mais un an plus tard, lorsqu'elle a vu que sa grande sœur avait trouvé un jeune homme sérieux, elle a changé d'avis !”. Une autre jeune femme de 27 ans vient de prendre rendez-vous à l'agence : ses parents s'y étaient rencontrés il y a plus de 30 ans et sont, semble-t-il, toujours très heureux. Elle souhaiterait connaître le même destin.
Les jeunes auraient peu de complexes à se lancer dans l'aventure
Problème : en agence matrimoniale, les profils de célibataires sont beaucoup moins nombreux que sur les sites et applications de rencontres. En apparence du moins, car sur internet, “les personnes vraiment célibataires et en quête d'une histoire sérieuse ne représentent que 1 à 5% des inscrits”, rappelle Gilbert Andrianne. Selon ce dernier, les sites sont gorgés de profils fantômes, qui s’ajoutent aux faux profils et à ceux des personnes accros au virtuel. Des leurres qui, dit-il, “ne peuvent pas exister en agence matrimoniale, car le contrat des inscrits doit obligatoirement être renouvelé par écrit tous les ans”. Mais n'est-il pas difficile pour un jeune, habitué à l'anonymat d'internet, de prendre contact avec une agence ?
“Ils ont moins de complexe que leurs aînés à se lancer dans l'aventure”, répond au contraire le responsable du réseau : “Ils sont nés dans une société de services, sont habitués à des services pour trouver logement, orientation professionnelle, travail, formations, services juridiques etc, et l'agence matrimoniale est un service comme un autre”. Certains manifestent cependant un grand besoin de confidentialité, explique Gilbert Andrianne, qui se rappelle d’un couple de jeunes formé par son agence, qui a refusé de signer le livre d’or. “Ceux-là préfèrent dire qu'ils se rencontrés par internet, car c'est certainement plus à la mode, ou moins culpabilisant...”.
*Les prénoms ont été modifiés.
A lire également :
25% des Français pensent que s'inscrire sur un site de rencontre est un geste “désespéré”