Victimes de tentative de kidnapping, ils témoignent : "Je me voyais déjà portée disparue, enlevée, violée, tuée..."
Il y a quelques jours, la chanteuse Carla Lazzari a révélé avoir été victime d'une tentative d'enlèvement. Elle n'est malheureusement pas la seule : au cours de leur vie, de nombreuses personnes évitent le pire de peu. Récits de drames évités de justesse.
Ces derniers mois, les affaires se sont multipliées dans la presse : tentative d'enlèvement devant une école, enfants portés disparus nécessitant le déclenchement du dispositif alerte enlèvement, sans compter les nombreuses disparitions d'adultes, plus difficiles à chiffrer, car faute de preuves, elles sont souvent considérées comme des disparitions volontaires.
En France, entre 40 000 et 50 000 signalements de mineurs disparus, et 8 000 de personnes majeures sont pris en compte par les autorités. De nombreux cas d'enfants qui n'ont jamais été retrouvés font régulièrement la Une de l'actualité. Et, quand il s'agit de femmes, bon nombre d'entre elles sont victimes de féminicides, et retrouvées des mois, voire des années plus tard.
"Au mieux, j'ai échappé à un viol, au pire, à un meurtre"
L'histoire de Carla Lazzari, qui affirme que deux hommes ont tenté de l'embarquer dans une camionnette, a fait écho chez Jade*, 29 ans. "Comme toutes les femmes, j'ai l'habitude du harcèlement de rue. Mais il y a un jour où j'ai vraiment eu peur pour ma vie. Je rejoignais des amis dans un coin un peu reculé de notre ville. Il n'était que 18h, mais en plein hiver, il faisait déjà nuit. J'ai remarqué une camionnette, qui roulait au ralenti à côté de moi.".
L'homme, au volant, s'adresse à elle à plusieurs reprises. "J'ai fait semblant de rien n'entendre avec mes écouteurs, même si j'avais coupé la musique, par sécurité. J'hésitais à faire un détour, quand il a d'un seul coup accéléré et disparu. Je pensais qu'il était parti, donc j'ai continué mon chemin. Mais 100 mètres plus loin, au moment où je passais devant une impasse, il est sorti de nulle part et m'a coincée entre l'angle de la rue et son véhicule. J'étais tétanisée. J'essayais de sortir mon téléphone pour appeler à l'aide, mais j'étais comme engourdie quand il a ouvert la porte arrière, laissant apparaître un autre homme."
A ce moment-là, Jade avoue avoir vu sa vie défiler devant ses yeux. "Je me voyais déjà portée disparue, enlevée, violée, tuée...", glisse-t-elle avec effroi. Son salut, elle le doit à l'arrivée inopinée d'une autre jeune femme. "Un petit bout de meuf de 20 ans a sprinté en hurlant "Police, police, à l'assassin", et en se précipitant vers moi. Ça m'a suffisamment réveillée pour que je fasse un pas en arrière. Elle m'a attrapée par la main et on a couru comme des dératées. Après avoir repris notre souffle, elle m'a dit : "Je t'emmène au commissariat, viens." On a tout raconté aux flics, j'ai porté plainte, mais il n'y a jamais eu de suite. Heureusement que cette nana est passée par là : grâce à elle, au mieux, j'ai échappé à un viol. Au pire, à un meurtre."
"J'ai failli être kidnappé quand j'étais enfant"
Maxence* avait 5 ans lorsqu'il a failli être victime d'un kidnapping. "Mes souvenirs de cette époque sont flous, mais j'ai quand même quelques images bien précises. Le reste, c'est ma famille qui me l'a raconté", explique-t-il. Alors qu'il était malade, son père s'est absenté faire des courses. Sa mère, pensant que son époux était toujours présent, est quant à elle partie chercher ses deux aînés à l'école : un aller-retour qui lui demande une quinzaine de minutes en voiture.
"J'étais en train de jouer à l'ordinateur quand j'ai entendu un bruit de verre cassé. Je me souviens avoir pensé que c'était l'un de mes parents, donc je suis allé voir, et j'ai vu deux hommes sur la terrasse de notre appartement, situé au premier étage d'une résidence calme. Je suis allé me cacher sous mon lit." Malheureusement, ses bruits de pas alertent les deux hommes, qui le suivent. "Ils ont commencé à me parler très gentiment, à me demander si j'étais tout seul. Je ne me souviens pas avoir répondu, juste d'avoir pleuré. Ils m'ont dit de me taire, et l'un d'entre eux a dit à son compère : "On ne peut pas le laisser là, pour l'instant, on l'embarque.".
Terrifié, le petit garçon commence à crier, jusqu'à entendre une voix qu'il reconnait : celle de la voisine. L'arrivée de cette dernière, qui avait un double des clés, met en fuite les deux individus, qui sautent du balcon pour prendre la fuite. "Elle avait vu la porte-fenêtre cassée en fumant une cigarette sur sa terrasse, et elle m'a entendu crier, alors elle s'est précipitée. Je me souviens qu'elle a passé un savon à mes parents. Plus de peur que de mal, mais j'en fais encore des cauchemars, 20 ans plus tard", conclut le jeune homme.
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"Ma mère a essayé de m'emmener à l'étranger sans rien dire à mon père"
Parmi les disparitions d'enfants signalées, selon l'association 116 000 Enfants Disparus, 96% des cas sont des fugues, 2,8% sont considérés comme des "disparitions inquiétantes, et 1,2% sont des enlèvements parentaux. Djamel*, aujourd'hui âgé de 20 ans, a fait partie de ces enfants. "Mes parents sont tous les deux originaires d'Algérie, mais se sont rencontrés en France, où je suis né. Quand j'avais deux ans, ma mère a voulu retourner s'installer là-bas, mais mon père, qui était employé en France, a refusé de quitter son travail. Il voulait rester ici, avec sa famille. Un jour où il était au travail, ma mère m'a embarqué. Elle a fait nos valises, direction l'aéroport."
Toutefois, à l'époque, le bambin n'avait pas encore de passeport, et s'est vu refuser l'embarquement. "Mon père a paniqué quand il est rentré et a trouvé l'appartement vide, les valises disparues. Il a immédiatement appelé la police, et surtout, il a mobilisé ses potes, sa famille, ses collègues. Sa soeur, ma tante, a débarqué à l'aéroport et nous a vus, ma mère et moi. Mais ma mère l'a repérée, et est partie. D'après ce que ma famille m'a raconté, on a passé trois jours dans un hôtel, avant que ma mère n'accepte de discuter avec mon père. Elle a essayé de le convaincre de ne pas porter plainte, mais il a refusé, par peur qu'elle essaye de recommencer.".
Aujourd'hui, les parents de Djamel sont séparés. "Ma mère s'est installée en Algérie, et j'ai été élevé par mon père. Jusqu'à mes 18 ans, il m'a emmené la voir chaque année, à Noël et en été. Il ne voulait pas me laisser y aller tout seul, mais il ne voulait pas non plus que je coupe les ponts avec elle tant que j'étais mineur. Le jour de mes 18 ans, c'est moi qui ai pris la décision de ne plus y aller. Je ne sais pas ce qui se serait passé si elle avait réussi à m'embarquer, mais je suis heureux que ça n'ait pas fonctionné.".
* Pour des raisons d'anonymat, les prénoms ont été modifiés
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