"Avez-vous des lesbiennes dans votre équipe ?" La question dangereuse posée par la BBC à Ghizlane Chebbak, la capitaine de l'équipe de football du Maroc
Ce mardi 8 août 2023, la France a affronté le Maroc dans les huitièmes de finale de la Coupe du monde féminine 2023. Mais, il y a quelques jours en conférence de presse, la capitaine marocaine Ghizlane Chebbak a été victime d'une question dangereuse sur l'homosexualité au sein de son équipe. Explications.
La coupe du monde féminine de football 2023 se poursuit en Australie et en Nouvelle-Zélande, et ce mardi 8 août 2023, les Bleues ont affronté les Lionnes de l'Atlas, dans le cadre des huitièmes de finale. Le 25 juillet dernier, Ghizlane Chebbak a été particulièrement déstabilisée par une question posée en conférence de presse, alors qu'elle s'apprêtait à affronter l'Allemagne au côté de ses coéquipières.
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Une question aberrante et dangereuse
Non content de se concentrer sur le sport, un journaliste de la chaîne britannique BBC a décidé d'envoyer la balle sur un terrain très personnel, et surtout, extrêmement polémique. "Au Maroc, il est illégal d'avoir une relation homosexuelle", a-t-il attaqué, face aux regards incrédules de la capitaine marocaine, et de son entraîneur, Reynald Pedros. "Avez-vous des lesbiennes dans votre équipe ? Pour elles, comment se passe la vie au Maroc ?", a-t-il poursuivi. Le service de presse a tenté de botter en touche en dénonçant une question "très politique", et en demandant aux journalistes de se recentrer sur des questions sportives. Ce à quoi le journaliste a rétorqué : "Ce n'est pas politique, merci de la laisser répondre."
Morocco captain Ghizlane Chebbak’s almost in disbelief reaction to the question, says it all.
A completely unethical out of line question that poses safety concerns to the players he asking to be named.
Bizarre push followed.
pic.twitter.com/MKk84O774E— SHE scores bangers (@SHEscoresbanger) July 24, 2023
Ghizlane Chebbak a finalement fait le choix de l'ignorer, et de passer à la question suivante. Mais la séquence, largement diffusée sur les réseaux sociaux, a créé un véritable vent de colère. Pour cause : elle est problématique à deux niveaux. D'abord, ce journaliste a purement et simplement demandé à la capitaine des Lionnes de l'Atlas d'outer, c'est-à-dire de révéler l'orientation sexuelle de ses coéquipières, sans leur accord. Mais surtout, il les a mises en danger, puisque l'homosexualité est toujours illégale au Maroc, en vertu de l’article 489 du Code pénal marocain, qui stipule que l’homosexualité est interdite, et punissable de six à trois ans de prison et d’une amende pouvant s’élever à 1 000 dirhams marocains, soit 92 euros.
Le journaliste était parfaitement conscient de cette illégalité, et savait donc à quoi il exposait la footballeuse avec sa question. Pour les internautes, il s'en moquait.
De nombreuses réactions indignées
Selon Steph Yang, journaliste de The Athletic présent dans la salle et cité par CNN : "Certains membres de médias marocains étaient visiblement consternés par la question. Pour Shireen Ahmed, journaliste de CBC Sports, la question était "complètement hors sujet". "Demander à une joueuse si ses coéquipières sont homosexuelles et comment cela les affecte, quand vous savez que ce n’est pas autorisé, est bizarre et hors de propos", clame-t-elle avant de préciser : "La capitaine ne peut pas outer ses joueuses ni commenter la politique car cela pourrait être également dangereux pour elle."
Sur Twitter comme sur TikTok, de nombreux internautes ont également pointé du doigt le manque d'éthique du journaliste. Si certaines personnes estiment que son objectif était simplement de mettre en lumière l'homophobie qui existe encore à travers le monde, d'autres l'affirment : il y a de bien meilleures façons de proposer des tribunes aux personnes concernées, sans mettre leur intégrité, voire leur vie en danger.
Bien consciente de la polémique, la BBC a présenté ses excuses : "Nous reconnaissons que la question était inappropriée. Nous n’avions aucune intention de causer du tort ou de la détresse." Des excuses insuffisantes pour bon nombre de personnes, qui demandent que l'accréditation du journaliste indiscret soit révoquée.
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